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De mères en filles : trois générations sur le GR5

par Myrtille Gardet
12 mars
273 lecteurs

Myrtille reprend le flambeau. Elle a hérité de sa maman la passion de la montagne, et c’est elle maintenant qui passe le relais. C’est avec sa fille Louise (19 ans) puis sa maman Hélène (75 ans) qu’elle s’engage sur le GR5 pour une grande randonnée intergénérationnelle et une belle histoire de transmissions.

Fille-mère. Moments précieux et fous-rires garantis.
Fille-mère. Moments précieux et fous-rires garantis.
Mère-fille. Presque arrivées ! Montée interminable vers le col de la Leisse.
Mère-fille. Presque arrivées ! Montée interminable vers le col de la Leisse.

En décidant de traverser les Alpes françaises à pied sur le célèbre GR5, mon objectif était de relever un défi personnel, sans doute un peu sportif, certes, mais surtout de partager une partie de ce cheminement intellectuel et physique avec ma fille Louise et ma mère Hélène dans de magnifiques paysages. Mes attentes ont été largement dépassées, et ce voyage découpé en trois chapitres tissés par la montagne est rapidement devenu une expérience humaine intime et la célébration des liens qui unissent nos trois générations de femmes.

La jeunesse en marche

C’est au bord du Léman que l’histoire commence. À mes côtés, Louise, enthousiaste et pleine de cette énergie propre à celles qui s’élancent dans la vie adulte, m’épate. Physiquement, rien ne semble l’atteindre du haut de ses 19 ans, ni les premières ascensions abruptes et les sentiers escarpés, ni ces cinq jours d’itinérance et ces longs kilomètres entre France et Suisse à travers le Chablais, le Haut-Giffre et les Aiguilles-Rouges. Chemin faisant, nous partageons autant de discussions, de rêves, de doutes, que de longs silences bercés par le vent et les couleurs alpines. Les montagnes semblent être le décor parfait d’une complicité renforcée. Un orage menaçant, la décision de prolonger l’étape jusqu’à Samoëns, la descente interminable, les jambes lourdes, les pieds douloureux… Dans ces moments plus tendus, je me revois à son âge, bouillonnant intérieurement : « Mais qu’est-ce que je fais là ? » Je me souviens des marches éprouvantes de mon adolescence, des doutes qui surgissent au creux de la fatigue, du désir fugace d’être ailleurs, bien au chaud, loin de ces sentiers sans fin. Et pourtant, comme moi autrefois, Louise ne dit rien. Elle avance, concentrée, puisant dans des ressources invisibles cette force intérieure qui ne se révèle que dans l’effort. J’observe son silence, son regard fixe, et je devine en elle ce même combat entre lassitude et détermination. Mais je sais aussi qu’au bout de cette journée, il y aura l’apaisement, la satisfaction d’avoir tenu bon, le réconfort d’un repas partagé. Et plus tard, bien plus tard, peut-être se souviendra-t-elle avec tendresse de ces instants où elle a appris, sans le savoir, que la résilience se forge pas après pas. En l’observant marcher avec aisance et plaisir, je ressens une fierté discrète mais profonde. L’amour de la nature et de la contemplation, la capacité à trouver du réconfort dans l’effort et de la beauté dans l’instant, la volonté de se dépasser même modestement dans l’humilité, je les ai hérités de ma mère et les lui offre à mon tour, sans même m’en rendre compte. C’est ainsi que les savoirs immatériels se transmettent, dans la simplicité des gestes répétés et des expériences partagées. Aujourd’hui, je ne suis plus vraiment celle qui initie, mais plutôt celle qui observe et admire. Un jour peut-être, ce sera Louise qui ouvrira la voie à une autre, perpétuant ce fil invisible entre les générations.

... et la suite ?