Dans l'univers de la tambouille au grand air, une foison d'engins "à cuisiner chaud" existe. Le gaz sous pression est le plus commun, mais toutes sortes de combustibles sont utilisées dans les réchauds modernes. Cela va de l'essence au pétrole, pressurisé ou non, en passant par l'alcool solide, et même le bois pour certains modèles. D'autres encore sont "œcuméniques" et fonctionnent aussi bien au gaz qu'au combustible liquide. On va donc, ensemble, essayer d'y voir plus clair dans cette jungle calorifique.
Le gaz
Ce qu'il y a de plus simple à l'usage. Le réchaud s'allume et s'utilise facilement. Sa technologie est simple ce qui le rend compact, léger et fiable. Et puis c'est le système le moins polluant ! Il ne noircit pas les casseroles. Certains modèles sont même équipés d'allumage piézo (pas toujours fiable), ce qui les rend encore plus faciles d'utilisation sans trop les alourdir… bref, beaucoup d'avantages.
Voyons maintenant les inconvénients. Les cartouches de gaz sous pression ne peuvent pas être transportées en avion (pas plus que le pétrole et ses dérivés d'ailleurs) : s'il n'existe pas la bonne cartouche dans le pays où vous allez, eh bien vous êtes coincé ! Pour le voyage dans les zones habituées au tourisme un peu roots, on trouve assez régulièrement des cartouches de type Primus/Coleman. Enfin ce n'est pas non plus la panacée et ce n'est pas dans les villages au milieu de la steppe que vous referez votre plein de gaz. Les réchauds MSR, Primus… sont compatibles avec ce standard. Seuls les réchauds Camping Gaz ne le sont pas - allez savoir pourquoi. De toute façon, les réchauds de cette marque ne sont pas ce qu'il y a de plus technique ; ils sont, en revanche, économiques et suffisants pour des treks en Europe. Il est à noter qu'un réchaud (Superfly de MSR) présente l'avantage de pouvoir se fixer sur tout type de cartouches à valves grâce à un système innovant.
Un autre souci lié au gaz, c'est le froid : le gaz ne se vaporise plus à basse température et devient alors inutilisable. Il faut donc essayer de garder les bonbonnes à une température convenable (les mettre au chaud dans les vêtements avant de s'en servir, garder les mains autour pendant l'utilisation…). Les mélanges contenant plus de propane sont moins sujets au froid. Alors que le butane ne se vaporise plus (il gèle) en dessous de 0°C, le propane continue de se vaporiser jusqu'à –44°C, ce qui augmente sa plage d'utilisation. Les cartouches Primus et Coleman, qui intègrent une plus grande quantité de propane, sont les plus adaptées à la haute altitude et au froid intense.
Nota : Evidemment n'oubliez pas de rapporter vos bonbonnes vides…
Le combustible liquide
Il existe deux types de réchauds : ceux qui fonctionnent simplement par mèche et ceux qui fonctionnent par mise sous pression du liquide. Ces derniers sont les plus couramment utilisés aujourd'hui et c'est d'eux que nous allons parler.
Comment ça marche ? La bouteille de combustible n'est pas complètement remplie pour laisser un espace d'air ; le bouchon du récipient est en fait une pompe et il faut l'actionner (plusieurs dizaines de coups), ce qui a pour effet de mettre sous pression le liquide. Le tuyau d'arrivée de combustible passe au-dessus du brûleur, ce qui augmente la température du liquide et le fait passer à l'état gazeux. Il est ensuite propulsé dans le brûleur, une flamme bleue et chaude en résulte. Si la flamme est jaune, cela signifie que la combustion n'est pas complète : le réchaud n'est, a priori, pas encore assez chaud. Ici on a un exemple typique de problème de "l'œuf et de la poule", car, pour que le liquide soit chauffé en passant au-dessus du brûleur, il faut que celui-ci fonctionne déjà... Pour contourner le problème, on est obligé de passer par une phase de préchauffage. Elle consiste à enflammer un peu de liquide recueilli dans une petite coupelle qui se trouve sous le brûleur: la flamme va mettre en température l'ensemble, et le réchaud est prêt à fonctionner au bout d'une minute environ.
Les réchauds à combustible liquide ont le gros avantage de fonctionner avec une source d'énergie disponible quasiment partout, dès qu'il y a des véhicules à moteur. Ils sont peu onéreux à l'usage (mais assez chers à l'achat). Le spectre de carburants utilisables pour ce type de réchaud est assez large: essence, pétrole, gazole, alcool… Autre avantage : ces réchauds continuent d'avoir un bon rendement par temps froid.
Passons maintenant aux inconvénients. L'allumage est périlleux et un peu long, il faut passer par la phase de préchauffage qui libère de grandes flammes jaunes rendant très dangereux l'usage sous tente, et de plus ces flammes encrassent tout.
Le réchaud est plus complexe (surtout à cause de la pompe) donc plus fragile, le système de pompage, pour la mise sous pression, casse parfois sur certains modèles répandus. En fonctionnement, il faut surveiller constamment et re-pomper quand la flamme diminue ; si vous laissez éteindre le réchaud, vous allez probablement devoir repasser par la phase de préchauffage.
Le réchaud s'encrasse et il faut nettoyer les buses d'alimentation régulièrement, bien que certains réchauds soient donnés comme étant auto-nettoyants…
Un autre désagrément : ça sent mauvais… lorsque, par mégarde, on renverse un peu de liquide, ou même, parfois, pendant la phase de fonctionnement.
Sur la plupart des modèles, le réglage ne s'effectue qu'au niveau de la pompe, ce qui le rend très grossier ; de plus, il y a un délai entre le moment où l'on règle et le moment où la taille de la flamme est réellement modifiée. Les modèles sont de plus en plus vendus avec une molette de réglage au niveau du flexible, ce qui supprime le problème.
Ce type de réchaud est plus dangereux à l'usage que le gaz, pas mal d'histoires d'expés avortées à cause d'un accident de réchaud circulent (par exemple la tente de Mike Horn qui a brûlé durant l'expé Arktos – voir le récit dans Carnets d'Expé n°1 –, une expé polaire contrainte à l'abandon à quelques jours de l'objectif à cause d'une fuite de pétrole qui a rendu les vivres immangeables…)
En conclusion, ces réchauds, moyennant une bonne maîtrise qui supprime la plupart des inconvénients, se révèlent très efficaces. Ils sont, de toute façon, bien souvent indispensables.
Les autres systèmes
D'autres systèmes existent, notamment les réchauds basés sur les pastilles et l'alcool gélifié. Ils sont assez compacts mais leur apport calorifique est très faible. La possibilité de se passer du réchaud en en bricolant un soi-même permet de faire de ce système une solution de secours : on emporte un peu de combustible et, en cas de besoin, on fabrique un réchaud de fortune. Par ailleurs, il existe un réchaud à bois, voir l’encart.
Pour les longues expéditions en milieu sauvage, et dans la mesure où il n'y a pas de risques pour le milieu, la solution reste le bon vieux feu à base de bois, d'herbes ou de bouses séchées.
Le réchaud à bois Sierra
Nous présentons ici ce réchaud qui a attisé notre curiosité : bien que peu connu, il nous paraissait intéressant et nous l’avons donc testé.
Quand le combustible naturel ne manque pas (on oublie donc la haute montagne), ce réchaud offre l’intérêt de s’affranchir des sources d’énergie “industrielles”. “Pourquoi ne pas faire un simple feu de bois ?” demanderont certains. Quelques avantages principaux se détachent :
- Notons tout d’abord l’optimisation des ressources en bois. Le réchaud fait “feu de tout bois” du fait de son principe de ventilation ; une fois lancé, tout brûle. Nous avons testé avec du bois sec et mouillé, de la bouse séchée (et oui, on ne fait pas les choses à moitié), et des écorces. Encore grâce au ventilateur, l’énergie est libérée rapidement, ce qui donne au réchaud une plus forte puissance qu’un feu de bois classique (pour la même quantité de combustible).
- Au niveau écologique, c’est mieux qu’un feu dans la mesure où c’est moins dangereux pour l’environnement et ça ne laisse pas de traces.
- Le système fait très peu de fumée, ce qui est parfois bien agréable.
Un petit inconvénient : il faut utiliser une pile (AA) pour le ventilateur. Ceci dit, une pile fait fonctionner le réchaud en puissance max pendant 5 heures environ, cela laisse tout de même de la marge. Et puis une pile ou deux de rechange pèsent moins lourd que ce qu’il faudrait en équivalent gaz ou essence. Une défaillance du moteur mettrait le réchaud hors service, mais a priori un moteur électrique c’est simple et donc fiable, reste à voir comment il se comporte dans un milieu humide. Nous allons tester le réchaud en forêt tropicale humide (où il est parfois difficile de faire un feu tant le bois est trempé) et nous vous livrerons nos conclusions. Ce réchaud est disponible aux alentours de 60 euros. Le magasin Expé est, à notre connaissance, le seul importateur (www.expe.fr). On peut également le commander a priori pour moins cher sur le site du fabricant (www.zzstove.com).
Lire l'encart "Le pouvoir énergétique de quelques combustibles"
Dossier (texte et photos) réalisé par Olivier Nobili publié dans Carnets d'Expé n°2