Partie 1 : Un peu d’histoire : pourquoi des vêtements respirants ?
La question de la « respirabilité » a été mise en avant par l’entreprise Gore au cours les années 80. Mais pourquoi donc ? Ça n’allait donc pas avant ? Pour mieux comprendre, explorons le chemin de ce produit (« le » Gore-tex), qui n’en est qu’un dans une entreprise aujourd’hui gigantesque.
Tout le monde a entendu le discours : « laisse passer la vapeur d’eau vers l’extérieur, empêche l’eau liquide d’entrer ». Tout le monde à l’image en tête, laissant imaginer une sorte de sens unique. Mais d’où vient-il ?
Il était une fois…
L’histoire, comme souvent, a commencé avec un véritable besoin : le vêtement médical. Lorsqu’on réalise des blouses ou des champs de bloc opératoire, il est essentiel qu’aucun fluide ne rentre, mais que le confort soit acceptable. Pour cela, on a vite utilisé un matériau assez exceptionnel, le Téflon expansé.
À l’époque uniquement fabriqué par DuPont de Nemours (donc en situation de monopole), le Téflon, ou poly-tétra-fluoro-ethylène (dit PTFE, un polymère d’atomes de C2F4) a la propriété de pouvoir être expansé (étiré), pour devenir le ePTFE (« e » pour « expanded »). On obtient ainsi un matériau qui regroupe plusieurs propriétés très intéressantes :
- une étanchéité élevée, due principalement à la faible taille des pores, mais aussi à la tension de surface très élevée du Téflon. La tension de surface, c’est ce qui fait qu’une surface ne se « mouille » pas, que l’eau fait des gouttes bien rondes. Les applications sont sans fin : une entreprise comme Téfal a bâti sa réussite sur cette propriété.
- Une perméabilité à l’air intéressante : le matériau étant poreux, une faible quantité d’air (faible, mais pas zéro !) peut traverser, permettant ainsi une évaporation de la vapeur d’eau. Nous y reviendrons. Ce n’est pas pour rien que le plus gros usage de ce matériau est dans le domaine de la filtration (sacs d’aspirateurs), où il est essentiel de contrôler la perméabilité à l’air.
Tout cela convenait parfaitement à l’usage médical et apportait un véritable confort d’utilisation, dans un cadre qui avait deux autres particularités :
- des vêtements à usage unique : ça n’avait pas besoin de « durer longtemps ».
- Ses vêtements portés à même la peau : dans un bloc opératoire, on est « nu en dessous ».
Et la suite…
Il était logique de chercher de quelle manière étendre le marché de ce matériau « miracle », dans les autres domaines où l’on pouvait rechercher à la fois de l’étanchéité, et quelque chose comme de la « respirabilité ». Le marché du sport convenait bien. Il fallait pour cela résoudre plusieurs difficultés, afin en particulier que le produit puisse durer. Fini le « jetable » et l’usage unique !
La première difficulté est la tenue mécanique : le PTFE est un matériau particulièrement inerte, ne collant à rien. C’est pour cela que les poêles Téfal sont anti-adhésives. Le premier brevet Téfal tenait au fait, justement, de faire « tenir » du Téflon.
Gore a donc beaucoup travaillé sur le sujet, et est réellement passé maître dans l’art de laminer des membranes ePTFE sur du textile. Le procédé consiste à coller la membrane, mais sans la « boucher », sur toutes sortes de matériaux.
L’autre difficulté à résoudre est apparue après le lancement : les super vestes Gore-Tex mises sur le marché perdaient peu à peu leur étanchéité. En effet, le PTFE est progressivement contaminé par différents produits (graisses, lessives, etc.), et sa tension de surface diminue. Rappel massif des premiers produits, et recherche d’une solution alternative, qui aboutira à un concept longtemps lisible ainsi :
- Une gamme de produits « Gore-tex », bâtie sur l’argument principal de « l’étanchéité durable » : pour obtenir ce résultat, la membrane Téflon est en réalité largement tartinée de polyuréthane. Finis les petits trous, finie la perméabilité à l’air, le Gore-tex (hormis dans la gamme XCR, parfois) fonctionne comme une « vulgaire » membrane PU (voir chapitre ultérieur). La membrane ainsi protégée est nettement moins « respirante », mais elle reste étanche.
- Une gamme de produits « Wind Stopper » : c’est le produit initial, avec seulement la membrane ePTFE, mais vendue avec l’argument « coupe-vent », et interdiction radicale par Gore d’utiliser ce matériau dans des vêtements « étanches ». Il a longtemps été interdit, par exemple, de mettre du ruban d’étanchéité sur les coutures d’un vêtement Wind Stopper. Objectivement, le Wind Stopper est moins étanche à l’air que le Gore-tex… mais personne ne peut le sentir (nous y reviendrons également).
Jusqu’à ces dernières années, tout allait bien, Gore ayant posé un brevet sur l’utilisation du ePTFE dans les vêtements, le marché était verrouillé. Mais ce brevet est tombé dans le domaine public au début des années 2000, provoquant l’arrivée de nouveaux acteurs…
Nous en savons assez sur l’origine de ces produits sans avoir à aller plus loin. Nous relierons bientôt cette histoire avec une certaine manière d’appréhender les mesures de respirabilité et autres…
Islande : effort + grande humidité
Partie 2 : Resituer la performance
Après le bref historique présenté dans la partie 1, nous allons nous pencher sur une question fondamentale : de quoi parle-t-on lorsqu’on évoque la « performance » ?
Matériau ou vêtement ?
Évoquons tout de suite un point tout à fait essentiel, qui fait l’objet d’un raccourci systématique, ce qui arrange beaucoup de monde :
L’utilisateur final se fiche des caractéristiques du matériau. Il veut un vêtement qui soit, dans une certaine mesure et sous réserve d’une définition correcte, étanche et respirant.
Le point est essentiel : réduire la question du vêtement à celle du matériau, c’est enlever toute compétence à la fois au concepteur du vêtement et à l’utilisateur. Cette même logique est massivement utilisée dans la plupart des milieux par les vendeurs de composants : informatique (un processeur Untel = un bon ordinateur), bâtiment (une laine Hisse-au-Vert = un bâtiment bien isolé, mais aussi de la paille = un bâtiment écologique), etc.
Aujourd’hui, le niveau de compétence sur ces questions chez les fabricants de vêtements frise le néant : pour l’immense majorité, les marques ne s’occupent que de design et de marketing. Presque tout le savoir « scientifique » se trouve chez les fabricants de matériaux, qui n’ont pas spécialement intérêt à ce que leurs clients apprennent à réfléchir par eux-mêmes. Ils leur fournissent donc leurs matériaux + toute la communication qui va avec. Tout le monde est content…
Or, selon qu’on parle d’un vêtement ou d’un matériau, les questions sont tout à fait différentes. Voyons cela plus en détail…
Un vêtement étanche et respirant
Je ne reprends pas ici les principes de base de l’habillement, ce qui nous emmènerait trop loin. Souvenons-nous juste que :
- le sportif dégage une certaine quantité de chaleur proportionnelle à l’intensité de l’effort.
- si pour une raison ou une autre, cette chaleur n’arrive pas à « sortir » des vêtements (isolation trop importante, ventilation insuffisante…), le corps transpire, pour tenter d’évacuer de la chaleur par évaporation (oublions la légère perspiration permanente).
- La sensation d’humidité sur la peau est désagréable. Or nous ne « sentons » l’humidité qu’indirectement* : une sensation de frottement (de l’ordre de « ça colle » ou « ça glisse ») et une sensation de température (« c’est froid »). Si rien ne colle/glisse et qu’il n’y a pas d’évaporation, vous ne pouvez pas sentir le « mouillé » !
[* : même si ce n’est pas intuitif, le corps humain n’a pas de capteur d’humidité. Vous avez sûrement noté qu’à part Michel Blanc dans Marche à l’ombre, nous sommes étanches.]
Nous ne traiterons pas ici du champ d’études qui concerne la manière de s’habiller pour ne pas atteindre (ou peu) le stade « transpiration », et qui tourne beaucoup autour de la notion d’isolation thermique.
Nous ne traiterons pas non plus ici d’un deuxième champ de réflexion, qui traite de la gestion de la sensation d’humidité sur la peau. C’est un domaine encore largement inexploré, où là aussi des fabricants (pas les mêmes) vendent des solutions toutes faites. Retenons : si pas de problème de sensation d’humidité, pas de problème de « respirabilité ». Personne ne s’est jamais plaint que les chaussures de ski n’étaient pas respirantes, elles sont pourtant pleines d’eau.
Concentrons-nous sur le problème du jour : comment évacuer de l’humidité ? Il n’y a pour cela que deux modes de transport :
- Le transport (ou advection) : renouveler l’air, c’est un moyen d’évacuer de l’humidité. Tout le monde sait ouvrir un zip quand il fait trop chaud. Le transport peut s’effectuer de deux manières : par les ouvertures (le col, les zips, les ventilations, etc.), ou à travers le matériau, si celui-ci est perméable à l’air (une laine polaire, par exemple).
- La diffusion : sans déplacement d’air, l’humidité peut migrer à travers le matériau. Il s’agit en fait d’un phénomène complexe, où la molécule d’eau est adsorbée d’un côté, puis « désorbée » de l’autre côté, s’il y a un écart suffisant de pression partielle.
Si le premier aspect peut se gérer au niveau du vêtement comme du matériau, ce n’est pas le cas du deuxième. Mais répétons ce qui a été dit plus haut : du point de vue de l’utilisateur, cela ne fait aucune différence, seul compte le résultat final.
Hormis quelques études compliquées et coûteuses réalisées sur mannequin chauffant / transpirant, dont l’exploitation est délicate, et dont les résultats n’intéressent finalement pas grand monde, il n’existe pas de possibilité de mesurer le comportement réel d’un vêtement en ce qui concerne la respirabilité, d’autant que, comme vous l’imaginez, le vêtement n’est pas étanche à l’air au même niveau sur un maigre que sur un rond…
C’est pourquoi, entre autres, les mesures sur les matériaux ont un tel succès : on sait les faire* ! Il n’y a guère que l’étanchéité que l’on peut correctement et facilement évaluer sur vêtement complet (on se met sous la douche), mais pour le reste, c’est un quasi-néant. Notons tout de même que vous pouvez tout à fait avoir un matériau parfaitement étanche, et un vêtement non étanche : diffusion par les coutures, fuites par les zips, infiltrations dans le col, etc.
[* Cela rappelle un peu l’histoire du monsieur qui cherche ses clés sous un lampadaire. Pas forcément parce qu’il les a perdues ici, mais qu’au moins, il y a de la lumière…]
Un matériau étanche et respirant
Concernant les matériaux, en revanche, nous avons des normes… malheureusement, pourrait-on dire ! Car, mettez-vous dans la peau de M. Gore dans les années 80. Vous avez un produit miracle, il n’y a pas de norme… Ce qui serait bien, ce serait de faire une norme sur laquelle votre produit soit systématiquement favorisé…
C’est ce qui arriva, et c’est ainsi qu’est née la « sweating hot plate ». On pose l’échantillon sur une plaque poreuse saturée d’humidité. Ceci crée une différence de pression partielle, et l’on considère que la « respirabilité » est correctement exprimée par la vitesse d’évaporation. Pour la mesurer, on mesure la puissance nécessaire au maintien de la température. Cela donne le RET, que l’on trouve dans tous les catalogues, où l’on affirme parfois que cela reproduit parfaitement la réalité !
Sauf que…
Cette mesure est tout de même réalisée dans des conditions fort particulières : température élevée (de l’ordre de 35°C), humidité saturante (présence d’eau liquide)… C’est assez éloigné de la réalité : un vêtement réalisé avec ce type de matériau est au contraire plutôt utilisé en couche extérieure, par temps frais ou froid. Par ailleurs, pour de nombreux matériaux, la perméabilité à la vapeur d’eau évolue avec l’humidité relative. C’est le cas du polyuréthane, grand concurrent des membranes PTFE (voir ci-dessous). Enfin, si elle permet de mesurer une certaine forme de capacité de diffusion, cette technique de mesure occulte complètement l’aspect « perméabilité à l’air ».
En ce qui concerne l’étanchéité, là, tout le monde est d’accord : on soumet un échantillon à une pression d’eau, et on regarde sous quelle pression (mesurée en mètres de colonne) les premières gouttes apparaissent. On s’arrête en général à 10 mètres de colonne. Une fois cette mesure réalisée, la question reste entière : quelle valeur est pertinente pour quelle utilisation ?
Islande : effort + pluie + vent + froid
Un petit exercice…
Le graphique ci-dessous représente l’évolution, pour toute une série de matériaux du commerce, de la quantité d’eau qui traverse la paroi constituée par le matériau en fonction de l’humidité relative.
C’est très instructif !
Source : www.verber.com/mark/outdoors/gear/breathability.pdf
On remarque très facilement plusieurs choses :
- il y a deux catégories de matériaux : ceux pour lesquels la courbe est plate (diffusion constante) et ceux pour lesquels la courbe « monte » (plus il fait humide, plus ça diffuse).
- Ils sont tous nettement en dessous de la plus haute qui est la membrane ePTFE « pure ».
Conclusion : ils sont tous « autre chose » que de la membrane ePTFE seule.
- Ceux qui « montent » sont de type polyuréthane, matériau hydrophile. Oh surprise !! on y retrouve tous les Gore-tex !!! Ça ne vous surprendra pas si vous avez lu la première partie : Gore-tex, c’est un peu de ePTFE, et beaucoup de PU**.
- La méthode standard (celle du RET) fonctionne à 100 % d’humidité, donc complètement à droite du graphique, là où les matériaux hydrophiles fonctionnent le mieux. Je vous disais que la « sweating plate » avait tendance à favoriser certains matériaux… Or, dans la vraie vie, on est plutôt en centre de graphique…
- Les unités employées donnent une idée de ce qu’on peut attendre en termes de transport d’eau : au mieux, on est à 5/6 litres par jour, en conditions hyper favorables. Or, en activité réelle, la transpiration fournit environ de 1 l/h, soit 4 à 5 fois plus.
Ce dernier point est particulièrement important : si effectivement le transport par diffusion était majoritaire, il serait largement insuffisant, et on finirait une randonnée de 2 heures avec au moins un litre d’eau dans les vêtements. Or ce n’est pas le cas. La réalité nous montre donc que la diffusion n’est pas le phénomène prépondérant : cela « fonctionne » donc majoritairement par transport.
Dès que l’on a compris cela, on a saisi deux choses :
- le débat sur la « respirabilité » des matériaux mesurée par RET n’a pas de rapport avec l’usage réel des vêtements.
- Un véritable champ s’ouvre pour la conception de vêtements dès qu’on commence à raisonner non en termes de diffusion, mais de transport.
Nous allons voir dans la dernière partie les applications pratiques des sujets que nous avons abordés ici. D’ici là… regardez bien les étiquettes !
[** Pour ceux qui ont vu les photos au microscope électronique d’une membrane pleine de trous, que la pub montre souvent : il s’agit de l’ePTFE « pur ». une fois enduite de PU… adieu les trous !!]
Partie 3 – Soyons ingénieux !
Nous avons vu la distinction qu’il convenait de faire entre les propriétés d’un vêtement et celles du matériau qui le constitue.
Le monde est ainsi fait, de nos jours, on a rarement l’occasion de revenir à la question de départ, celle qu’on devrait toujours se poser : de quoi ai-je besoin ? Pour ce qui nous intéresse, elle peut se poser ainsi : quel vêtement pour quelle activité ? La question subsidiaire est également : est-ce que ça vaut le coup de payer 300-500-700 € pour une veste dite « respirante ».
Quelques généralités
Le vêtement est parfois considéré comme notre deuxième peau, conçu normalement pour étendre la zone d’usage de notre première peau lorsqu’elle atteint ses limites.
Il peut être utile à notre réflexion de faire le parallèle avec ce qu’on considère parfois comme notre troisième peau : le bâtiment. Ils interagissent en effet fortement, car plus le vêtement est adapté, moins on « en demande » au bâtiment, et inversement. Il n’y a qu’à comparer une tente, une yourte ou un igloo, dans lesquels on ne vit qu’avec un habillement adapté, et un immeuble moderne, très technologique, où le confort peut être maintenu en toutes saisons indépendamment de l’habillement. [C’est une large question que de savoir si c’est une fonction sociétalement acceptable pour un bâtiment de nous permettre de vivre en chemisette en plein hiver…]
Comment prévient-on la surchauffe dans un bâtiment ? Il y a classiquement trois paramètres, dont deux seulement sont transposables au vêtement :
Paramètre d'ajustement |
Bâtiment |
Vêtement |
1. Limiter l'accumulation de chaleur |
- Limiter les apports solaires
- Réduire les apports internes
|
- Réduire la puissance = moins d'efforts
- Diminuer l'isolation = enlever des couches isolantes
|
2. Atténuer les effets de l'accumulation de chaleur |
- Augmenter l'inertie |
- Pas d'équivalent |
3. Evacuer la chaleur |
- Ventilation naturelle ou forcée
- Climatisation
|
- Ventilation |
La première étape est essentielle :
On commence par limiter l’accumulation, donc on adapte l’isolation à l’effort. Et l’isolation c’est directement l’épaisseur.
Ce n’est pas directement notre sujet, mais si chacun s’habillait, en effort, pour se sentir « juste frais », la question de la respirabilité se poserait beaucoup moins. En étant un peu dur (mais pas tant que ça…), on pourrait dire que la question de la respirabilité ne se pose qu’à celles et ceux qui ne savent pas s’habiller correctement.
Par ailleurs, nous l’avons dit dans la partie précédente : l’expérience montre que les quantités évacuées à travers les matériaux sont largement insuffisantes, c’est exactement comme dans un bâtiment. Personne n’attend que chaleur et humidité traversent éventuellement les murs : on ouvre les fenêtres. La conception même des vêtements imper-respirants le prouve : ils sont quasiment tous dotés de « ventilations », ces grands zips placés sous les bras, en poitrine ou ailleurs.
Une fois que l’on a compris l’importance de cette ventilation et de son contrôle, on peut réfléchir sereinement à la question fondamentale : de quoi a-t-on vraiment besoin ?
Quelques cas concrets nous aideront à explorer les différentes situations envisageables…
Quelques cas concrets
Cas n°1 : il ne pleut pas ou peu
N’ayons pas peur de l’évidence : quand il ne pleut pas, il n’y a pas d’eau extérieure dont il faudrait se protéger. L’étanchéité est donc inutile. C’est une grande chance, car très concrètement, si l’on se protège de l’eau, on se protège très souvent de l’air aussi, et la ventilation devient délicate.
S’il ne pleut pas, on s’orientera toujours vers des solutions non étanches, avec une isolation ajustée à l’activité (« juste frais »).
Un exemple typique : la combinaison de laines polaires. Personnellement, je parviens à gérer toutes les situations avec une « micro », une légère et une grosse, en combinaisons diverses. Il s’agit de vêtements très perméables à l’air, qui permettent ainsi une vraie évacuation de l’éventuelle humidité excédentaire.
Pour le cas d’un vent intense, et/ou d’une activité intense, type vélo, où l’on ne pourra pas facilement assurer la juste ventilation par des ouvertures de zip (c’est trop peu, ou trop) : rechercher les matériaux « coupe-vent mais perméables à l’air ». Il y en a peu. Wind Stopper en est un, mais encore souvent trop « coupe-vent ». eVent en est un autre. Le fabricant Polartec a, il y a quelques années, ouvert une véritable brèche, en créant un matériau « coupe-vent mais pas trop », baptisé NeoShell. Il représente une véritable alternative à la pensée binaire proposée par Gore depuis si longtemps.
Très concrètement, en magasin, vous pouvez tester si un matériau est perméable à l’air en plaquant la bouche (essuyez le chocolat avant !) et en soufflant.
- Si vous forcez, que l’air ne passe pas : ce n’est pas perméable. À éviter !
- De l’air passe, plus ou moins facilement : bravo, vous venez d’en trouver un !
Cas n°2 : Zut, il pleut…
Ou alors on part pour 3 jours, et on ne veut pas prendre le risque… Là, évidemment, on pense « vite, mon Gore-tex ». Sauf que…
Considérons le cas habituel : vous portez déjà une ou deux couches isolantes, et vous ajoutez par-dessus votre beau vêtement étanche, « mais respirant », qui est donc la couche la plus extérieure, la plus froide, car « hors isolation ».
Quand il pleut, l’humidité relative à l’extérieur du vêtement est de 100 %. Elle est également de 100 % à la même température en face interne. Il n’y a aucun écart de pression partielle de vapeur d’eau entre les deux faces (voir plus haut le paragraphe sur les matériaux). Pas de « moteur », donc rien ne passe, ni dans un sens, ni dans l’autre.
Dans l’immense majorité des cas, un matériau « respirant » porté sous la pluie ne « respire » rien du tout.
Résumé des cas n°1 et n°2
Ces deux cas assez simples, que nous avons tous vécus, nous montrent donc que :
- S’il ne pleut pas, je n’ai pas besoin d’un vêtement étanche.
- S’il pleut, il n’existe pas de matériau respirant en situation réelle.
Avouons qu’à ce stade, il reste peu de place pour un vêtement réalisé avec un matériau « imper-repirant »…
En fait, j’ai été un peu de vite à la besogne. La preuve : je ne vous ai donné aucun conseil pratique pour le cas n°2. C’était pour la bonne cause, certes, pour simplifier… Mais je ne voudrais pas vous laisser sous la pluie comme ça… Retournons-y donc !
Islande : effort + pluie + vent + froid
Cas n°2 : Zut, il pleut… (bis)
D’habitude, lorsqu’il pleut, on aimerait par-dessus tout trouver quelqu’un qui vous propose « la garantie de rester au sec ». La situation est en réalité très différente selon que vous êtes en activité ou au repos.
Cas n°2 a : … et en plus je fais du sport !
Concrètement, vous dégagez beaucoup de chaleur, il est plus que probable que vous transpiriez. Vous êtes donc mouillé, de toute façon. La bonne stratégie est alors souvent de l’admettre, et d’en limiter les inconvénients, qui sont de deux ordres :
- éviter les grands refroidissements dus au vent. Prenez donc un coupe-vent, modèle « de base », qui peut être très léger. Les nostalgiques apprécieront le k-way ! Par contre, agissez dès que vous vous arrêtez, avec une bonne isolation et un séchage à l’abri.
- Éviter les contacts désagréables, collants et froids. Pour cela, une sous-couche hydrophobe, type polyester, micro-polaire ou autre fait parfaitement l’affaire. Elle contient peu d’eau, et évite le contact froid de la couche étanche.
Cas n°2 b : … et en plus je ne fais pas de sport !
Vous ne faites rien d’actif, c’est-à-dire que vous êtes à la pêche, vous attendez un bus ou ramassez des moules… pas de chaleur à évacuer, tout ce que vous voulez, c’est rester sec et au chaud. Selon l’esthétique souhaitée, optez pour le ciré jaune (Gore-tex n’a jamais eu de succès chez les marins, qui s’y connaissent en étanchéité) ou le k-way à 10 €.
Nouveau résumé…
On pourrait croire avec ces exemples qu’on n’a, en fait, jamais besoin d’un « vêtement technique », c’est-à-dire d’un habillement fabriqué avec une matière imper-respirante. Eh bien… je le pense fermement, mais c’est difficile à valider sur le terrain : il est impossible aujourd’hui de trouver un vêtement outdoor « technique » (avec tout le flou que recouvre ce terme) qui ne revendique pas une certaine respirabilité. Mais clairement :
- on peut gérer presque toutes les situations avec un assemblage d’isolants type « polaire » et le plus basique des coupe-vent.
- Dans certains cas spécifiques, un coupe-vent partiellement perméable à l’air est idéal.
- Pour les cas de pluie, il suffit d’un vêtement étanche.
Mon conseil est donc : s’il y a dans la gamme un « équivalent Gore-Tex mais moins cher », c’est toujours mieux. Dans tous les cas, ce qui fera la différence, c’est votre capacité à savoir vous habiller correctement. Et si vous vous habillez mal, même avec la plus chère des combinaisons… vous serez mal !
Le fin mot de l’histoire
Sur le fond, on trouve, comme dans beaucoup d’autres d’industries et de domaine, le fonctionnement suivant :
- des fabricants de composants proposant un produit avec une belle histoire, et proposant de la généraliser au vêtement lui-même.
- Des assembleurs (les marques de vêtements de sport), dont les forces sont massivement regroupées sur le design et le marketing, et non sur une saine compréhension du fonctionnement des produits. De fait, ils n’ont pas d’autre choix que d’accepter la soupe servie par les fabricants de composants.
- Des clients / usagers à qui l’on ne propose guère que de choisir entre des produits, pas de « monter en compétence » sur leur réel besoin.
Il est relativement facile, une fois le problème correctement posé, d’arriver à de vrais concepts, efficaces et peu chers. Il est ainsi assez simple de concevoir un gant à la fois chaud et avec une bonne sensation de toucher, ou encore un vêtement chaud (comme une doudoune), mais en divisant par 3 les quantités d’isolant. Il suffit de poser proprement le problème. Mais qui achète, aujourd’hui, de l’innovation consistant à vendre moins de matière ou un produit plus simple ?
(Ces exemples ne sont pas fantaisistes : solutions comme prototypes existent réellement !)
L’habillement relève aujourd’hui principalement de la mode. Cela peut faire sourire, mais caleçons longs et bonnets de nuit ont disparu de nos maisons en même temps que les consignes de chauffage grimpaient. On a reporté sur de la technologie et la consommation d’énergie (pensons aux gants « chauffants » apparus il y a peu) ce qui, auparavant, reposait sur la sensation humaine, le bon sens et l’intelligence de conception et d’usage.
Cela n’est pas une fatalité, et tout un chacun peut ainsi (ré)apprendre à s’habiller de manière efficace à relativement peu de frais pour toutes les conditions climatiques et activités. Toujours ça d’économisé pour le reste !
Test de porosité
Islande : effort + pluie + vent + froid
Islande : effort + vent fort
Islande : effort + pluie + vent + froid
Islande : pour une fois il fait grand beau !
Ski de rando : froid + vent + effort + transpiration
Islande : effort + grande humidité
Guyane : effort + grande humidité + pluie + chaleur