Matériel léger, rando hivernale
Liste « légère » pour la rando hivernaleTexte et photos, Kai Taimsalu
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Je me considère comme un MUL plutôt modéré. Cette liste est présentée ici dans la perspective d’une utilisation par des conditions très variables en moyenne montagne pour des durées de quelques jours en privilégiant un niveau de confort correct, une bonne sécurité, un prix modeste et une bonne durabilité du matériel. En fonction de ce que je prends, été comme hiver, cela représente entre 3500g et 4500g hors consommables et sans compter les habits portés. Cela fait longtemps que je fréquente le forum www.randonner-leger.org, et constate que ma liste de matériel a en fait assez peu varié. J'ai bien fait quelques incursions dans les concepts XUL mais je suis toujours revenu à mon concept initial qui est la simplicité et l'efficacité alliées à la sécurité. Cette simplicité réside avant tout dans le matériel, mais aussi dans son utilisation et surtout dans sa diversité d'utilisation ce qui fait que je n’ai pas 36.000 listes différentes ! En effet, je n'aime plus trop me poser des questions au sujet de la météo qui viserait à prendre ou ne pas prendre tel ou tel équipement ; de plus, la météo peut rapidement changer en montagne, il vaut mieux respecter le principe de prudence, surtout en hiver. Ma liste hivernale est également basée sur ce même concept ; ce qui suit décrit donc mon matériel hivernal ainsi que les conditions dans lesquelles je l’utilise car ce dernier point est primordial, on serait vite tenté de copier telle ou telle liste et l’utiliser dans des conditions pour lesquelles elle n’est pas adaptée. J’utilise cette liste pour faire de la randonnée raquette, ski, ski de fond en moyenne montagne. Je prévois généralement de dormir proche du niveau des arbres, dans le cas contraire, une pelle de secours me permettra d’aménager un abri de neige si les conditions devaient empirer (chute de température inhabituelle, tempête etc). Attention, il ne s’agit pas d’une liste pour les sorties longues, de plus de quelques jours ou les expéditions, mes destinations sont toujours à moins d’une journée de marche d’une région habitée. Je considère -20° comme étant la limite confort et -30° comme étant la limite inférieure, si cela devait descendre en dessous, le seul recours serait de creuser un abri dans la neige. L'abriMon concept, qui n'est pas nouveau, est articulé autour d'un micro-tarp mesurant 160x270cm de 250g y compris cordages et sardines titane, acheté chez www.mountainlaureldesigns.com pour moins de 100$ (80€ env.). En hiver, on utilisera plutôt des corps morts tels que branchage, bâtons de randonnée, raquettes, etc. pour la fixation des haubans. En MUL, on utilise du cordage le plus fin possible, mais en hiver les nœuds gelés seraient trop difficiles à défaire avec les doigts engourdis par le froid. Les avantages du micro-tarp sont sa (relative) facilité de montage (par rapport à un plus grand, malaisé à monter, d’autant plus sur certains terrains), il donne vraiment l'impression de dormir dehors, il protège de la pluie ou neige lorsqu'on prépare les repas, il est très résistant au vent (selon comment on l’a monté), et le matériel reste à l’abri. Les limites du micro-tarp se font sentir en cas de pluie ou neige avec beaucoup de vent. Les turbulences du vent peuvent faire gicler de la neige sur le sac de couchage. La solution est alors simple : le sursac. Le sursac en question ne sera pas souvent utilisé alors j'ai choisi un modèle très simple, léger et efficace. Il s'agit du Survival Bag de Rab qui pèse env. 350g, en nylon renforcé avec une enduction respirante, qui coûte 80€ env. Il est bien respirant, protège vraiment de la pluie, et est très résistant au contraire des modèles en Pertex à point de prix et qui finissent invariablement par prendre l’eau. Si d'aventure je devais dormir en altitude au creux d'un rocher, sur une vire, ou que les conditions météorologiques se dégradent au point que le tarp doive être démonté, ce sursac me protègera bien. Ce modèle est utilisé par les alpinistes pour les bivouacs imprévus en altitude. Une pelle SnowClaw, 170g et 22€ env., me permettra de dégager efficacement une tranchée dans la neige, de creuser un replat dans une pente, ou même de creuser un abri. Je ne creuse pas d’abri par plaisir ; c’est beaucoup plus difficile qu’il n’y parait, cela peut prendre facilement plus d’une heure et ensuite on est trempé. Les conditions de neige peuvent rendre cette opération très difficile ; parfois il n’y a pas suffisamment de neige, tant le vent l’a balayée, laissant une croûte dure et trop fine. Par ailleurs, si l’on est blessé ou très faible, creuser un abri devient une tâche surhumaine. Ainsi, je pense qu’il ne faut pas déterminer la protection au froid de son matériel en comptant sur un abri que l’on ne pourra pas forcément construire… J’emporte également une petite scie de paysagiste d’au moins 15cm et moins de 150g. Les scies de couteau suisse sont insuffisantes, le seul bois disponible se trouvant sur les arbres (celui au sol est souvent caché par la neige). Le bois ainsi coupé sert à créer une armature pour l’abri et à faire un grand feu de joie pour les sorties en groupe. Choisissez de préférence des arbres ou des branches mortes. On peut carrément faire quelque chose d’assez « cosy » en utilisant les couvertures de survie et quelques branchages en plus du tarp. J’ai passé une soirée mémorable avec un ami par -20° sous un gros avant toit fait avec des branches, sur lequel nous avons placé les couvertures de survie maintenues par d’autres branchages placés par-dessus. Il y avait beaucoup de vent, il neigeait, il faisait froid, mais nous étions parfaitement abrités et avons profité d’une bulle de chaleur sous notre abri. Il n’y a rien de tel que de dormir hors tente. Une tente fait gagner quelques degrés en température mais le gain équivalent en plumettes pèse nettement moins que le poids d’une tente. Le sac de couchagePour l’hiver, j'ai investi dans un très bon sac -15° de 1260g, il s’agit de l’« Antelope » de chez Western Mountaineering à 435$ (342€ env.). Et oui, c’est cher mais c’est payant. Pour les conditions moins tempérées ou les frileux, dans la même marque, je conseille le Puma ou le Bison. Leurs indications de température sont très conservatrices, j’ai dormi en plein air par -20° dans mon Antelope avec un sursac et une couche d’habits, et j’ai eu chaud. Il ne faut pas lésiner sur la température du sac de couchage et il faut être très prudent sur les températures annoncées par les fabricants. Les seuls indices fiables à mon avis étant la quantité et la qualité des plumes ; en d’autres termes, à cuin (gonflant exprimé en Cubical Inches) égal, un sac garni de 600g de plumettes ne peut a priori pas être plus chaud qu’un garni de 800g. D’ailleurs, sur le site de randonner-leger, quelqu’un propose un indice d’isolation thermique donné par le poids du garnissage multiplié par le cuin. Cela permet de comparer plus facilement les performances de différents modèles. Plus cet indice est élevé, plus le sac (ou la doudoune d’ailleurs) tiendra chaud. Il faut vraiment comparer toutes les caractéristiques des sacs et ne pas se faire embobiner par les fabricants. Si c’était à refaire, je prendrais même un sac encore plus chaud ; au diable les 100g de plumettes de plus. Choissez un sac assez ample dans lequel vous pourrez dormir avec des habits et potentiellement du matériel à abriter du gel (chaussures, matériel électronique, etc.). Par temps froid, l’humidité est l’ennemi n°1, surtout avec le duvet. Un duvet trop humide va « coller » et réduire de ce fait l’épaisseur de l’isolation. Il faut donc veiller à ne pas avoir trop chaud ; une collerette bien réglable, une fermeture éclair sur le côté et une variation de l’épaisseur des habits permettra de réguler quelque peu la température. Au bout de plusieurs jours, l’humidité emmagasinée dans le sac de couchage peut sérieusement compromettre son efficacité. Pour les sorties de plusieurs jours, on peut choisir le synthétique qui est beaucoup plus lourd, ou utiliser une barrière vapeur mise à l’intérieur mais celle-ci va empêcher l’évaporation de l’humidité corporelle dégagée pendant la nuit et vous risquez de baigner dans votre jus… Je n’aime pas compresser mon sac à mort, surtout en hiver, car plus la plume est compressée, plus l’humidité va faire coller les plumes entre elles. S’il fait très froid, il est probable que les plumes gèlent pendant la journée et collent, rendant le sac inutilisable au moment du bivouac. Le sac synthétique semble a priori une bonne solution mais très éloignée de la MUL ; il permet certes de dormir très chaudement et même de sécher ses affaires sans risque, mais j’ai lu des récits où les aventuriers ont du couper leurs sacs de couchage pour casser la glace accumulée dans l’isolation afin d’en permettre l’évacuation. Il n’y a malheureusement pas de solution miracle. Le matelas et le tapis de solEn hiver, je ne chipote pas, je prends un Thermarest ZLite de 420g et un Gossamer NightLight à 215g. Je n'ai jamais senti le froid avec ces deux matelas l'un sur l'autre. Une autre option serait le NightLight et un matelas plus court pour le torse, gonflable pour diminuer les éléments fixés à l'extérieur du sac pour un poids à peine supérieur. Il ne faut pas lésiner sur la protection au sol ; il n’y a rien de pire que se réveiller avec les hanches transies par le froid. Le différentiel de température entre le corps et le sol entraîne une condensation de l’humidité. Le sac à dosPour une petite sortie de week-end, mon sac GoLite Jam de 37+7 litres (460g une fois débarrassé des superflus) peut suffire, mais ses bretelles deviennent vite inconfortables une fois chargé à bloc. Pour les sorties plus longues ou plus techniques (nécessitant crampons, baudriers et autres), je prends un vieux sac GoSport de 42 l + poches extérieures, de 1220g et 59€. Il est solide, de construction simple, sans fioritures et propose des bretelles qui paraissent luxueuses par rapport à mon Jam. L’avantage lorsqu’on adopte les concepts MUL est qu’on porte moins lourd, on n’a donc pas besoin de sacs sophistiqués et chers. La popote + réchaudJ'ai fait beaucoup d'essais de réchauds à gaz et à alcool à brûler, même parfois du feu, qui offre le record de légèreté et d'autonomie, mais ne peut être employé partout en raison des interdictions, risques ou altitude. Pour l’hiver, les réchauds à alcool ne sont pas adaptés ; en dessous de 0°, ils ne fonctionnent plus correctement et ne sont pas indiqués pour fondre la neige pour fabriquer l’eau. J’ajouterais que les risques liés à l’alcool sont trop importants ; il faut s’imaginer par temps froid, possiblement avec des conditions météo difficiles, en train de manipuler ces petits réchauds à alcool avec les doigts gourds, de gros gants ou encore des moufles, avec le risque de les renverser et de bouter le feu à son équipement. Le gaz ISO Fuel (mélange butane propane) est une bonne solution MUL lorsque les températures ne descendent pas sous les -15°. Il est très adapté pour les sorties courtes où la température ne risque pas de descendre trop bas ; autrement, la seule solution viable est le réchaud à essence qui est typiquement utilisé dans les expéditions et fonctionne à des températures bien plus basses. En ce qui concerne la popote, je prends mon éternelle MSR Titan Kettle d’une contenance de 0,85 l. Le titane c’est cher mais c’est léger et durable. Elle est un poil juste pour faire fondre la neige et fabriquer 2-3 l d’eau, mais je ne suis pas pressé. Pour des sorties à deux, ce n’est plus suffisant. À plusieurs, on peut se répartir le matériel, ainsi le poids d’un réchaud essence, la réserve de combustible ainsi qu’une large popote ne pèsera pas plus lourd qu’un équipement individuel. Question gourde, je prends une platypus à large ouverture de 3 l qui pèse 120g. La placer dans le sac contre le dos empêchera l’eau de geler ; pensez aussi à vidanger le tuyau entre chaque prise d’eau. Il vaut mieux fabriquer l’eau le matin pour éviter d’avoir à la garder à l’abri du gel pendant la nuit, dans le sac de couchage avec les risques de fuites, sans compter que cette eau pompe de la chaleur du corps. Une cuillère en plastique non cassant à cause du froid, une petite lame pour le saucisson et cela complète la « batterie » de cuisine ! L'habillementJ'aime bien les vêtements polaires car ils sont bon marché (sauf certaines marques) et très solides. La mienne, en Polar200, est munie d’une demi-fermeture et pèse 370g en XL ; elle est presque trop petite pour moi mais elle reste plus compacte. Elle a coûté quelque chose comme 50€ dans une marque générique. En dessous, je mets une sous-couche thermique classique sans rechercher les marques techniques qui vantent des qualités émérites que je ne constate pas sur le terrain. Dans la mesure ou cette sous-couche n’est pas en coton et est étudiée pour évacuer l’humidité vers l’extérieur, cela suffit ; elle doit néanmoins avoir un col haut qui remonte jusque sous le menton, ainsi qu’une petite fermeture-éclair pour ouvrir le col, car en plein effort par beau temps, je ne porte que cette sous-couche et il m’arrive d’avoir trop chaud. Lorsque le vent se met à souffler trop fort et passe à travers la polaire, je passe une veste respirante par-dessus. J’ai opté pour la veste à enduction DryEdge de Millet, d’un excellent rapport qualité prix : à peine plus de 300g pour 99€. L’idéal, aux dires de leurs possesseurs est le eVent (tissu imper respirant) mais c’est bien plus cher. Ce qui est important, c’est que la capuche soit suffisamment technique, donc réglable afin de l’ajuster autour du visage empêchant ainsi les entrées de vent et de neige par vents violents. Question pantalon, j’ai un Salewa en cordura stretch sous lequel j’enfile un collant. À la pause, je pose le matelas mousse replié sur une butte neige et je m’installe confortablement ; il m’arrive de me tailler un fauteuil à l’aide de la pelle. Si j’ai froid aux jambes, je sors mon sac de couchage et mets mes jambes dedans. Pour le torse, je passe une doudoune Patagonia MicroPuff de 520g en taille XL dotée d’une capuche généreuse. C’est cher mais c’est très compressible et efficace. Cette doudoune est fragile mais elle ne sera pas portée sous les sangles du sac à dos car cela n’est pas nécessaire en plein effort. La capuche est très importante car elle emprisonne l’air chaud et crée un véritable cocon de chaleur ; sans capuche, l’efficacité du vêtement serait bien moindre. Avant, j’avais une veste Touring Hoodie en PowerShield de chez Millet. Un excellent produit a priori, sauf qu’elle a perdu son traitement déperlant aux bretelles en quelques sorties. Je me suis retrouvé trempé un jour de grosse neige et je ne voudrais pour rien au monde revivre ça. L’humidité est une condition adverse en hiver ; se poser au camp avec des vêtements trop humides peut transformer une belle sortie en galère car on n’a pas de fourneau pour tout faire sécher. Le mieux c’est de ralentir l’effort bien avant de s’arrêter afin de se sécher au maximum. J’ai également essayé les vestes légères en MP+ qui donnent de bons résultats mais leur fragilité me décourage de les utiliser sous les sangles d’un sac chargé pour l’hiver. Question bonnet, j’ai un modèle très fin et élastique de marque Hagloffs. Il est légèrement coupe-vent et je le porte pendant l’effort afin de me protéger principalement du soleil. Si le temps se refroidit, j’ai un bonnet en polaire que je peux mettre dessous. La capuche de la veste respirante complète le tout lorsque le vent devient trop fort. J’adopte le même principe de trois couches pour les gants. Une première couche fine pendant l’effort, une couche supplémentaire en polaire et des surmoufles GramMittens (50g) de chez Hagloffs, dont la paume est en XCR et le reste en PacLite. Je complète l’habillement par un tour de cou en WindStopper qui me servira de masque facial le cas échéant. Ne pas oublier de bonnes lunettes de soleil, des lunettes de ski qui recouvrent bien le visage avec une bonne aération et un traitement anti-buée. La crème solaire et le stick de protection pour les lèvres doivent avoir un indice très élevé car la réflexion du soleil sur la neige en décuple les effets, en plus de l’altitude. À son piedJ’ai pris les chaussures une taille au-dessus ce qui me permet de porter de grosses chaussettes bien chaudes. L’humidité des pieds est un vrai problème, il faut donc privilégier des chaussures très respirantes. Idem pour les guêtres. Ces dernières devront monter jusque sous les genoux, les guêtres courtes finissent toujours par laisser infiltrer la neige surtout quand elle est très profonde. Pendant la nuit, j’enterre les chaussures recouvertes d’un sac plastique le plus près possible du sol pour les protéger du froid de l’air. Des chaussures à -20° le matin c’est pas terrible, surtout quand l’humidité qu’elles contiennent a gelé et les a rendues dures comme du béton. Une autre solution, surtout si on est très haut où la température sous neige peut être très basse, consiste à les mettre dans le sac de couchage pendant la nuit, mais le corps va travailler dur pour maintenir la masse des chaussures au chaud. Il faut bien penser à changer de chaussettes la nuit pour bien sécher les pieds en profitant d’en enfiler de plus épaisses car les pieds humides sont facteurs de froid et de cloques. La paire portée pendant la journée sera mise contre le corps la nuit afin qu’elles sèchent pour le lendemain. Enfiler une paire de souliers froids le matin n’est pas vraiment problématique si les pieds, eux, sont chauds et qu’on les enfile au dernier moment avant de lever le camp, c'est-à-dire après avoir mangé et fait sa provision d’eau pour la journée. Ne pas lacer trop serré, cela gêne la circulation sanguine et donc le réchauffement des chaussures froides. Certaines personnes prennent des chaussettes « vapor barrier socks » qui suppriment toute accumulation d’humidité dans les chaussures mais je n’aime pas avoir les pieds qui baignent dans leurs jus. DiversHormis une pharmacie typiquement MUL, je prends du petit matériel tel que de la cordelette Spectra pour les réparations de fortune et la construction d’abris, un sifflet, des épingles à nourrice, un peu de power tape, une lampe frontale, des allumettes étanches, une petite bougie de réchaud, un petit GPS Geko équipé de piles résistantes au froid, une montre boussole altimètre Suunto Observer, une petite boussole/thermomètre de secours et un téléphone mobile. J’inclus dans le petit matériel une deuxième pipette pour la gourde depuis que j’en ai coupé une avec mes dents en mordant le petit bloc de glace qui s’était formé à son embouchure, j’avais par la suite perdu toute mon eau car je ne m’en étais pas aperçu L. Le kit petit matériel pèse 250g sans le téléphone, la lampe frontale ainsi que le GPS et les éventuelles piles de rechange. |