Aventuriers historiques : dans les traces des alpinistes soviétiques

Mikhaïl Khergiani est un nom tombé dans l’oubli… sauf à Mestia ! Dans la capitale de la Svanétie, région montagneuse de Géorgie qui jouxte la frontière russe, tout le monde se souvient de lui. Il y a une rue Khergiani, et sa maison natale est devenue un musée dédié à sa mémoire. Né en 1932, mort en 1969, alpiniste et fils d’alpinistes, l’enfant du pays défraya la chronique alpine soviétique. Son vrai prénom (svane) était Chumlian. Impossible à prononcer pour les Russes ! Ils le rebaptisèrent Mikhaïl ; ça lui restera. À Mestia, il y a un croisement de rues qui est tout un symbole. Au niveau du théâtre, la rue Khergiani rencontre la rue Ushba. L’Ushba, la montagne à deux têtes, n’est pas la plus haute de la région (4710 m), mais assurément c’est la plus populaire. Café Ushba, hôtel Ushba, le sommet symbole est partout. C’est pour essayer de la gravir que nous sommes venus ici, avec l’ami Cédric.
À Zugdidi, principale ville à l’entrée de la vallée, effondrés sur nos gros sacs dans l’attente d’un hypothétique bus pour Mestia, nous finissons par nous endormir sur le trottoir. Une sensation d’humidité baveuse me réveille… Un brave cabot des rues, compatissant, est en train de me lécher le visage. Bon, il faut faire quelque chose là… Le jour se lève, la petite ville s’anime, c’est l’heure d’entamer une négociation avec un chauffeur de taxi. En voiture, direction le bout de la route, tant pis pour le bus ! À Mestia, Nazo nous attend. Nazo… Khergiani, la sœur de Mikhaïl ! Retrouvailles et petite visite au musée. Et puis il faut y aller, Nazo nous dit qu’elle priera pour nous. Doit-on en déduire que nous pouvons aller l’esprit tranquille ? En tout cas, la météo a l’air plutôt accueillante, alors « vperiod » (« en avant ») ! L’approche prend ici tout son sens : deux jours et un glacier un peu tortueux, c’est peut-être ça qui décourage les prétendants. Ici, pas de refuge, pas de remontée mécanique ; il faut porter son équipement. Le secours héliporté, lui, est une option fort aléatoire. Le résultat est là : au col qui marque le début de l’ascension du sommet Nord, nous sommes seuls. Un genre de luxe qui se fait rare dans les Alpes, autour de sommets à la célébrité comparable…