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Arizona Trail - 800 km à pieds au pays des cow-boys

(réalisé)
  • Randonnée a pieds, de la frontière mexicaine au sud, jusqu'au Grand Canyon au nord.
  • Variété de paysages grandioses. Terrain désertique a montagneux, principalement a travers plaines et hauts plateaux. Températures de -17 a +40 degrés.
  • Principalement sur l'Arizona Trail, avec détours/raccourcis/variantes, et coupé court avant le Grand Canyon pour raisons météo (voyage réalise au mois de décembre).
  • 800km en 3 semaines comptant 6 jours de repos; moyenne 50km / jour, jour plus long de 70km.
randonnée/trek
Durée : 21 jours
Distance globale : 767km
Carnet publié par Damdam le 09 janv. 2018
modifié le 14 janv. 2018
835 lecteur(s) -
Vue d'ensemble

Le topo : Compte-rendu (mise à jour : 14 janv. 2018)

Distance section : 767km
Dénivelées section : +9364m / -8893m
Section Alti min/max : 1606m/2498m

Milieu traversé :

Environnement : [montagne, désert] Biotope : [neige, aride, désertique]

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Le compte-rendu : Compte-rendu (mise à jour : 14 janv. 2018)

Mi-décembre, au bord d'une route du milieu de l'Arizona, je m'abrite derrière un sapin le temps de laisser passer un chasse-neige. Les flocons tombent depuis des heures, et ils auront vite fait de recouvrir à nouveau l'asphalte de blanc. Deux semaines plus tôt, c'est pourtant au milieu des cactus que le voyage avait commencé. Il y en a pour tous les goûts dans ces paysages de western...

Tout avait commencé avec quelques noms repérés sur une carte du sud-ouest des Etats-Unis. Des lieux-dits aux noms des tribus Apaches, Navajos, du célèbre Geronimo, ... Voilà de quoi rappeler des histoires de western, d'évoquer des grandes étendues, avec cactus et chevaux sauvages en toile de fond. J'ai voulu aller voir sur place ce qu'il en était. Sac au dos, je me fais déposer au sud de l'état. Je commence mon périple a cote de la frontière mexicaine, à quelques heures de route de Tucson, la grande ville de la region. Les paysages ont beau être désertiques, il y a de l'activité. Les shérifs locaux s'efforcent d'intercepter les Mexicains qui tenteraient de franchir la frontière sans l'accord de l'oncle Sam. Les moyens sont originaux. Un ballon dirigeable ancré au sol maintient en permanence des caméras de surveillance. En haut d'une colline, une camera infrarouge mobile est braquée sur le mur haussé entre les deux pays.
Mur-frontiere (ligne sombre au centre). A gauche, les USA, a droite, le Mexique.
Mur-frontiere (ligne sombre au centre). A gauche, les USA, a droite, le Mexique.
Caméras de surveillance braquées sur la frontière.
Caméras de surveillance braquées sur la frontière.
Après ma première après-midi de randonnée, je décide de poser ma tente a quelques pas d'une route en gravier. Je n'y ai croisé personne depuis des heures, je suis sûr d'y être au calme. Un peu trop confiant: au milieu de la nuit, je me fais réveiller. Les projecteurs d'une patrouille de surveillance de la frontière balayent mon campement ! Heureusement, ma tente Black Diamond ne doit pas ressembler à ce qu'ils cherchent, et le convoi poursuit rapidement. Le lendemain matin, reprenant mon chemin, je croise trois marcheurs. Juste quelques bidons d'eau à la main, il n'ont pas l'air américains ni de randonner pour la forme. Le dispositif déployé doit avoir des failles...
En me dirigeant vers le nord, mon parcours suit principalement l'Arizona Trail. Ce parcours de 1300 km, achevé en 2012, traverse l'état du sud au nord en combinant des sentiers préexistants. Sa moitié sud est un désert chaud semiaride. Pour ce qui est des grandes étendues sauvages, on est servi. Pour agrémenter les plaines, quelques montagnes rythment l'effort et égaient la ligne d'horizon. Les ravitaillements demandent une bonne dose d'organisation. Les villages et les habitations sont rares, certaines sections de sentier ne croisent aucune trace de civilisation sur 80 voire 100 km. Sur les sections les plus arides, les points d'eau naturels sont presqu'inexistants, mais on peut alors compter sur des dépôts réguliers. De grosses cages en métal sont régulièrement approvisionnées en bidons d'eau par des bénévoles. L'eau n'est pas servie avec des glaçons, mais quel bonheur de trouver ces oasis au milieu de nulle part lorsque - même en décembre - la température dépasse les 30 degrés à l'ombre !
Les dépôts d'eau, maintenus par des bénévoles, rendent possible la traversée des sections les plus arides.
Les dépôts d'eau, maintenus par des bénévoles, rendent possible la traversée des sections les plus arides.
Les régions traversées par l'Arizona Trail sont chargées d'histoire. Les pionniers débarquant de l'est dans les années 1800 étaient intéresses par les gisements d'or et d'argent. Aujourd'hui, en plus de quelques gigantesques mines toujours en activité, le sentier passe au milieu de vestiges de machines. Abandonnées sur place et au milieu de nulle part, elles laissent de quoi s'imaginer cette époque des heures durant. Tout l'or n'a d'ailleurs pas disparu. Au détour du sentier, je croise un homme les mains dans la boue. Occupe au tamis et a la batée, il me dit d'attendre quelques minutes. Coup de chance ! Une fois sa pelletée nettoyée à grands coups de vas-et-viens dans une bassine d'eau, une minuscule pépite reluit au fond de sa batée. Je dois porter chance, il hésite à me laisser repartir !
Les paysages sont arides mais grandioses. Mis à part un sommet, le Mont Lemmon, frôlé aux alentours de 2800m, j'ai surtout traverse de vastes plaines. Remontant vers le nord, j'arrive au maintenant milieu de l'état, au pied du Mogollon Rim. Cette "marche" entre deux plateaux s'étend, telle une crête montagneuse, sur toute la ligne d'horizon. Il n'y a pourtant pas de descente de l'autre cote: le plateau qui s'étend à son sommet s'étend vers le nord a environ 2400m d'altitude. Une fois la marche gravie, changement de décors. On passe de Josey Wales à Pale Rider. Les sapins ont remplacé les cactus, et la neige n'est pas qu'une plaque occasionnelle mais un solide manteau blanc. Je m'enfonce jusqu'aux genoux. Cette neige tombée récemment n'est pas prête de fondre, et ma progression dans la poudreuse est désespérément lente. Ma moyenne jusque-là de 50 à 60 km par jour m'avait servi à calculer un ravitaillement en provisions le soir même. Or je suis maintenant deux fois plus lent. Les sources d'eau sont en plus gelées, et je ne transporte pas de réchaud. Il va falloir manger de la neige... 
L'Arizona Trail n'a pas encore acquit la notoriété des sentiers Américains de grande randonnée, tels que le Pacific Crest Trail ou l'Appalachian Trail. Peu de personnes ont encore emprunte l'Arizona Trail de bout-en-bout, une difficulté étant de décider d'une saison idéale pour toutes ses sections. Le sud est trop chaud en été, et le nord, je m'en rend compte, peut-être un peu froid en hiver. Je dois me résoudre : sans skis ou raquettes, la progression est presqu'impossible. Après quelques dizaines de kilomètres et d'hésitations, je crois des traces de véhicule. Soulagement. Hormis le demi-tour, l'isolement ne laisse que peu d'options quand les choses vont mal. La neige tassée sous mes pas, je suis les traces de pneus jusqu'à rejoindre une route. Toujours pas d'amé qui vive en vue, mais la route pointe vers le nord : la voie asphaltée servira de sentier de consolation.
Compte-rendu
Je guette les prévisions météo : une tempête est annoncée dans les jours qui viennent. La nuit suivante fraiche, -7 degrés, mais dégagée. Un coup d'œil hors de la tente au milieu de la nuit révèle un ciel incroyablement clair. Qui donc a amener ici tant d’étoiles ?! L'air sur ces hauts plateaux est parmi les plus clairs du pays, loin de toute agglomération. Je passe le matin-même a cote d'un observatoire astronomique, nomme le "Discovery Channel Telescope", en référence à la chaine de télévision qui a sponsorise sa construction (tout se monnaie aux USA !). Les nuages annonces arrivent, le vent se lève. Rapidement tout se recouvre de blanc. Je suis toujours cette route asphaltée, et les quelques automobilistes que je vois passer s'arrêtent et me proposer un "lift". Malgré les flocons qui volent à l'horizontale, je me sens plus en sécurité a pieds que sur quatre roues !
Le point culminant de l'Arizona Trail est sans aucun doute le Grand Canyon, qui se trouve prêt de son terminus nord. Culminant, au sens symbolique uniquement, car topographiquement parlant, il correspond à un immense trou béant. Presque 2000m de profondeur et 30 km de large, il entaille ces hauts-plateaux que je parcours. L'ayant déjà visité il y quelques années, je garde en mémoire le grand canyon comme l'une des formations naturelles les plus impressionnantes du pays. Première nécessite pour l’instant: rejoindre la ville de Flagstaff. Je m'offre une chambre d'hôtel et laisse passer la tempête. Hasards de la météo et du calendrier, il ne me reste ensuite que 120 km jusqu'au bord du Canyon. Sans trop le planifier, il m'occuperont deux grosses journées, exactement de quoi arriver au bord sud du Canyon le 24 décembre, quelques minutes avant le coucher du soleil. L'endroit est incroyablement touristique, mais quel spectacle ! Je me sens perdu dans une ambiance de Disneyland, mais je profite comme tout le monde des lumières orangées qui plongent dans l'immensité du canyon devant nous. J'entends que l'on annonce -17 degrés pour cette nuit. L'Arizona Trail se poursuit via un sentier qui le franchit jusqu'à la rive opposée. Il serait bien tentant d'y parvenir, et atteindre ainsi la frontière avec l'état voisin de l'Utah.

On m'apprend qu'une couche de neige fraiche devrait arriver le lendemain matin. J'ai vite fait d'estimer mes chances, au vu des conditions récentes: l'Utah attendra jusqu'à un prochain voyage !
Commentaires
Floma - 14 janv. 2018
21 messages
Merci Damdam pour ce récit qui donne envie d'en lire plus!!
Et de le faire aussi... Beau voyage en tous cas!
Belle continuation dans les futurs trips!