Chemins de terre et d'eau de Harrison Barker
Je cherchais un parcours pour essayer mon nouveau matériel en vue du GR10 que je désirais faire dans son intégralité.
Le Chemin de Terre et d'Eau de Harrison Barker était pile calibré pour le peu de jours dont je disposais.
Le Chemin de Terre et d'Eau de Harrison Barker était pile calibré pour le peu de jours dont je disposais.
When : 5/6/19
Length : 3 days
Length : 3 days
Total distance :
74.5km
Height difference :
+1417m /
-1534m
Alti min/max : 74m/298m
Guidebook created by Béryl
on 02 Sep 2019
updated on 04 Nov 2021
updated on 04 Nov 2021
Eco travel
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Global view
Guidebook : J1 - Sarlat - Castelnaud (updated : 13 Sep 2019)
Section distance :
27.3km
Height difference for this section :
+348m /
-430m
Section Alti min/max : 156m/298m
Description :
Distance parcourue réelle relevée par mon GPS : 31,19Km
Cliquez sur la trace pour faire apparaître le dénivelé
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Crossed environment :
Environment : [colline, campagne, plaine]
Report : J1 - Sarlat - Castelnaud (updated : 13 Sep 2019)
Lundi 6 mai 2019
J'avais prévu de faire le trajet en train de chez moi à Sarlat, mais c'est Franck, mon frère, qui profite d'un déplacement professionnel dans le coin pour me déposer à la gare de la capitale du Périgord Noir. Merci frérot !
Le coquin me prépare une surprise pour mon retour, mais je ne le sais pas encore (bin oui, c'est une surprise !).
«La ville au premier abord semble composée d’une longue rue et paraît triste et peu intéressante. Il y a cependant un vieux Sarlat qui existe hors de la principale artère et que le visiteur nonchalant, qui n’aime pas à demander des renseignements, peut facilement ne pas trouver. Il y a peu de scènes plus originales et plus pittoresques en France que celles que présentent la vieille église en ruine, à moitié ouverte aux intempéries des saisons, et des vieilles maisons qui l’entourent et lui servent de cadre.»
«Une des vieilles maisons et des plus remarquables est celle qui fut la résidence d’un écrivain philosophe, Etienne de La Boétie, l’ami de Montaigne. C’est un type intéressant de la renaissance française ; l’extérieur est richement orné de sculptures.»
«(...) Le peuple de Sarlat se vante de ce que leur ville n’a jamais été aux mains des anglais. Sur cette question, cependant, ils sont dans l’erreur. Ils eurent à traverser une rude et mauvaise époque, les gens de Sarlat qui, durant de longues années, durent lutter pour leur vie et leurs biens contre des bandes sans foi ni loi de « soi-disant » anglais qui avaient converti en repaires un grand nombre de rochers, et qui, sortant de leurs cavernes fortifiées, rendues presque imprenables, faisaient leur proie de ce peuple infortuné s’efforçant de vivre par la frugalité.»
Je démarre de la gare à 10h42 précises !
Très vite, je rejoins la voie verte, longue langue de bitume que je suis pendant une douzaine de kilomètres. Ouch ! Heureusement, la nature a soigné le décors : murailles végétales, marmites de géant et traversée de rivière viennent rompre la monotonie de cette interminable piste cyclable.
J'avais prévu de faire le trajet en train de chez moi à Sarlat, mais c'est Franck, mon frère, qui profite d'un déplacement professionnel dans le coin pour me déposer à la gare de la capitale du Périgord Noir. Merci frérot !
Le coquin me prépare une surprise pour mon retour, mais je ne le sais pas encore (bin oui, c'est une surprise !).
«La ville au premier abord semble composée d’une longue rue et paraît triste et peu intéressante. Il y a cependant un vieux Sarlat qui existe hors de la principale artère et que le visiteur nonchalant, qui n’aime pas à demander des renseignements, peut facilement ne pas trouver. Il y a peu de scènes plus originales et plus pittoresques en France que celles que présentent la vieille église en ruine, à moitié ouverte aux intempéries des saisons, et des vieilles maisons qui l’entourent et lui servent de cadre.»
«Une des vieilles maisons et des plus remarquables est celle qui fut la résidence d’un écrivain philosophe, Etienne de La Boétie, l’ami de Montaigne. C’est un type intéressant de la renaissance française ; l’extérieur est richement orné de sculptures.»
«(...) Le peuple de Sarlat se vante de ce que leur ville n’a jamais été aux mains des anglais. Sur cette question, cependant, ils sont dans l’erreur. Ils eurent à traverser une rude et mauvaise époque, les gens de Sarlat qui, durant de longues années, durent lutter pour leur vie et leurs biens contre des bandes sans foi ni loi de « soi-disant » anglais qui avaient converti en repaires un grand nombre de rochers, et qui, sortant de leurs cavernes fortifiées, rendues presque imprenables, faisaient leur proie de ce peuple infortuné s’efforçant de vivre par la frugalité.»
Je démarre de la gare à 10h42 précises !
Très vite, je rejoins la voie verte, longue langue de bitume que je suis pendant une douzaine de kilomètres. Ouch ! Heureusement, la nature a soigné le décors : murailles végétales, marmites de géant et traversée de rivière viennent rompre la monotonie de cette interminable piste cyclable.
Après le village de Grolejac, je traverse la Dordogne sur l'ancien viaduc là où Barker a dû prendre le bac, lui.
«J’étais sur la route où Fénelon vit le jour, et, pour y arriver, je traversai la Dordogne. Un vieux bateau à fond plat construit pour transporter d’une rive à l’autre les hommes, les ânes et autres animaux était amarré au bord de la rivière, et deux fillettes chargées de garder un troupeau d’oies et en même temps de faire le service du bac, s’empressèrent de me conduire sur l’autre rive.
Pendant que la plus âgée s’occupait à faire avancer la barque, la plus jeune m’examinait avec soin en tapinois, et apparemment avec beaucoup d’intérêt. Tout d’un coup elle me demanda si je vendais du papier à lettres (...) Lorsque l’eau était suffisamment profonde, on ramait au moyen d’une simple pelle ; lorsqu’elle était basse, on allait plus vite en se servant d’une perche. Telles sont les deux méthodes invariablement employées par les pécheurs et les passeurs de la Dordogne, et il est étonnant de voir avec quel succès ils peuvent traverser les rapides sans avoir recours au halage.»
«À Grolejac, les agriculteurs demandèrent des parapets masquant la rivière pour éviter que les bêtes ne prennent peur en traversant !
Grolejac, tel est le nom curieux d’un village que je finis par trouver bâti en partie sur une colline et d’une autre dans la vallée Dordogne. (...)
Avant d’atteindre le village, je croisai un énorme troupeau d’oies, et tandis que le premier rang avançait pour l’attaque, avec le cou tendu et le bec près de terre, les autres l’excitaient de leurs cris. Pendant une minute environ la chose parut sérieuse, mais le courage des oies et des jars faiblit complètement. L’armée me livra passage, lorsque des cris de défiance se firent entendre.
Pauvres bêtes... Leur entrain ne durera pas longtemps ! (...) Dans quelques semaines, les foies de beaucoup d’entre elles serviront à préparer ces excellents pâtés truffés dont le Périgord s’enorgueillit, sans oublier le profit tiré de leur expédition aux quatre coins de l’univers.»
Peu après la sortie de Grolejac, je sors de la voie verte et m'engage sur une voie jacquaire. Désormais, je suivrai les coquilles bien connues jusqu'à Cadouin !
Les balises sont bien visibles, mais, ne regardant pas assez mon GPS et surtout avec l'esprit qui bat la campagne, je me perds à deux reprises. Oh, pas bien méchant, mais au final ça fait pas mal de distance à rajouter.
Heureusement de longs passages en sous-bois sont plus reposants pour mes pauvres pieds qui souffrent toujours du contact avec le goudron.
«J’étais sur la route où Fénelon vit le jour, et, pour y arriver, je traversai la Dordogne. Un vieux bateau à fond plat construit pour transporter d’une rive à l’autre les hommes, les ânes et autres animaux était amarré au bord de la rivière, et deux fillettes chargées de garder un troupeau d’oies et en même temps de faire le service du bac, s’empressèrent de me conduire sur l’autre rive.
Pendant que la plus âgée s’occupait à faire avancer la barque, la plus jeune m’examinait avec soin en tapinois, et apparemment avec beaucoup d’intérêt. Tout d’un coup elle me demanda si je vendais du papier à lettres (...) Lorsque l’eau était suffisamment profonde, on ramait au moyen d’une simple pelle ; lorsqu’elle était basse, on allait plus vite en se servant d’une perche. Telles sont les deux méthodes invariablement employées par les pécheurs et les passeurs de la Dordogne, et il est étonnant de voir avec quel succès ils peuvent traverser les rapides sans avoir recours au halage.»
«À Grolejac, les agriculteurs demandèrent des parapets masquant la rivière pour éviter que les bêtes ne prennent peur en traversant !
Grolejac, tel est le nom curieux d’un village que je finis par trouver bâti en partie sur une colline et d’une autre dans la vallée Dordogne. (...)
Avant d’atteindre le village, je croisai un énorme troupeau d’oies, et tandis que le premier rang avançait pour l’attaque, avec le cou tendu et le bec près de terre, les autres l’excitaient de leurs cris. Pendant une minute environ la chose parut sérieuse, mais le courage des oies et des jars faiblit complètement. L’armée me livra passage, lorsque des cris de défiance se firent entendre.
Pauvres bêtes... Leur entrain ne durera pas longtemps ! (...) Dans quelques semaines, les foies de beaucoup d’entre elles serviront à préparer ces excellents pâtés truffés dont le Périgord s’enorgueillit, sans oublier le profit tiré de leur expédition aux quatre coins de l’univers.»
Peu après la sortie de Grolejac, je sors de la voie verte et m'engage sur une voie jacquaire. Désormais, je suivrai les coquilles bien connues jusqu'à Cadouin !
Les balises sont bien visibles, mais, ne regardant pas assez mon GPS et surtout avec l'esprit qui bat la campagne, je me perds à deux reprises. Oh, pas bien méchant, mais au final ça fait pas mal de distance à rajouter.
Heureusement de longs passages en sous-bois sont plus reposants pour mes pauvres pieds qui souffrent toujours du contact avec le goudron.
Pour Harrison les oies, pour moi les vaches.
Il faut toujours se méfier de l'indolence des vaches. Alors que je passe le long d'un pré où un troupeau broute tranquillement, certaines mères pensent sûrement que je vois leurs petits en futures paupiettes. Elles se mettent à meugler comme des vaches. Oui, mais des vaches folles !
Dans le tas se trouve monsieur. D'apparence tranquille jusqu'à ce que ces dames la ramènent, le voilà qui me regarde d'un œil torve. La queue qui s'agite furieusement de droite à gauche, la tête qui oscille de même, mmmh... pas bon ça.
Cela dit, je ne suis pas dans leur pré carré, une clôture nous sépare.
Tiens, je vais les prendre en photo ces idiotes paranoïaques. Je pense que c'est ça qui ne leur a pas plu. À peine l'appareil sorti, trois d'entre elles s'approchent dangereusement de moi. Toujours en meuglant.
Puis deux autres leur emboitent le pas et bientôt la moitié de troupeau !
Impressionné, je range mon bazar et trace le chemin en accéléré. Elles se mettent alors à courir vers moi et vu la taille des bestiaux, j'ai soudain un gros doute sur le pouvoir de défense de la maigre clôture.
Je m'enfuis ! Mais elles sont vraiment malades ces vaches !
Heureusement, elles s'arrêtent bel et bien au pied des barbelés alors que je suis déjà loin. Le taureau, lui, n'a pas bougé. À peine s'est-il retourné pour vérifier que j'étais bien parti.
Je les entendrai longtemps après les avoir perdues de vue.
Il faut toujours se méfier de l'indolence des vaches. Alors que je passe le long d'un pré où un troupeau broute tranquillement, certaines mères pensent sûrement que je vois leurs petits en futures paupiettes. Elles se mettent à meugler comme des vaches. Oui, mais des vaches folles !
Dans le tas se trouve monsieur. D'apparence tranquille jusqu'à ce que ces dames la ramènent, le voilà qui me regarde d'un œil torve. La queue qui s'agite furieusement de droite à gauche, la tête qui oscille de même, mmmh... pas bon ça.
Cela dit, je ne suis pas dans leur pré carré, une clôture nous sépare.
Tiens, je vais les prendre en photo ces idiotes paranoïaques. Je pense que c'est ça qui ne leur a pas plu. À peine l'appareil sorti, trois d'entre elles s'approchent dangereusement de moi. Toujours en meuglant.
Puis deux autres leur emboitent le pas et bientôt la moitié de troupeau !
Impressionné, je range mon bazar et trace le chemin en accéléré. Elles se mettent alors à courir vers moi et vu la taille des bestiaux, j'ai soudain un gros doute sur le pouvoir de défense de la maigre clôture.
Je m'enfuis ! Mais elles sont vraiment malades ces vaches !
Heureusement, elles s'arrêtent bel et bien au pied des barbelés alors que je suis déjà loin. Le taureau, lui, n'a pas bougé. À peine s'est-il retourné pour vérifier que j'étais bien parti.
Je les entendrai longtemps après les avoir perdues de vue.
J'arrive à Domme après 20km non-stop et m'arrête sur une aire de camping-car pour casser la croûte.
Le village est charmant, mais beaucoup trop de monde à mon goût se croise dans les ruelles. Ce devait être plus calme en 1892 quand Harrison y entre.
«Quelques ‘miles’ de forêts, ensuite des terres en pente, et enfin de nouveau la Dordogne. J’étais las de chercher la ville médiévale de Domme. Je la reconnus à ses vieux remparts sur le sommet d’une haute colline nue, dont les escarpements arides semblaient flotter inaccessibles comme un nuage dans l’air bleu au-dessus de la vallée.»
«Comme je gravissais la colline en plein soleil de midi, je pensais que si les soldats, cinq ou six siècles auparavant, accablés sous la charge de leur pesante armure, avaient lancé des jurons dans leur grossier langage, ils étaient bien excusables.»
«J’étais bien près de me repentir de ma résolution de gagner Domme, lorsqu’à un tournant de la route, je me trouvai à quelques mètres d’une porte fortifiée du XIVème siècle, avec une tour de chaque côté, reliée par une courtine aux remparts.»
«À l’endroit où la ville n’était pas défendue par les rocs nus et abrupts formant un effroyable précipice qu’aucun assiégeant n’aurait essayé d’escalader, une grande partie de la muraille a été bien conservée. Debout sur un bastion de ce rempart, ayant sous lui la profonde et lointaine vallée et le ciel au-dessus de sa tête, le voyageur peut permettre à sa fantaisie de se convaincre qu’il est réellement sur le faîte d’un château aérien.»
Le village est charmant, mais beaucoup trop de monde à mon goût se croise dans les ruelles. Ce devait être plus calme en 1892 quand Harrison y entre.
«Quelques ‘miles’ de forêts, ensuite des terres en pente, et enfin de nouveau la Dordogne. J’étais las de chercher la ville médiévale de Domme. Je la reconnus à ses vieux remparts sur le sommet d’une haute colline nue, dont les escarpements arides semblaient flotter inaccessibles comme un nuage dans l’air bleu au-dessus de la vallée.»
«Comme je gravissais la colline en plein soleil de midi, je pensais que si les soldats, cinq ou six siècles auparavant, accablés sous la charge de leur pesante armure, avaient lancé des jurons dans leur grossier langage, ils étaient bien excusables.»
«J’étais bien près de me repentir de ma résolution de gagner Domme, lorsqu’à un tournant de la route, je me trouvai à quelques mètres d’une porte fortifiée du XIVème siècle, avec une tour de chaque côté, reliée par une courtine aux remparts.»
«À l’endroit où la ville n’était pas défendue par les rocs nus et abrupts formant un effroyable précipice qu’aucun assiégeant n’aurait essayé d’escalader, une grande partie de la muraille a été bien conservée. Debout sur un bastion de ce rempart, ayant sous lui la profonde et lointaine vallée et le ciel au-dessus de sa tête, le voyageur peut permettre à sa fantaisie de se convaincre qu’il est réellement sur le faîte d’un château aérien.»
J'entre dans Cenac-et-Saint-Julien dans le milieu de l'après-midi. Un camping est dans le coin, mais vraiment excentré du chemin. J'ai encore du jus, je continue et vise plutôt Castelnaud. Après Saint-Julien, le village suivant, je commence sérieusement à chercher un endroit de bivouac. Las, la plupart des prés sont clôturés sur plusieurs hauteurs ou habités par des troupeaux.
Il est déjà 17h40 quand je rencontre une mamie qui commence à me questionner sur mon gros sac à dos. Je lui décris mon chemin et m'aperçois très vite qu'elle a surtout besoin de parler d'elle. Elle se force à marcher tous les jours tant qu'elle y voit. Atteinte d'une dégénérescence maculaire, elle est condamnée à finir aveugle. Alors elle profite du peu de vue qu'il lui reste pour se faire des souvenirs.
Des souvenirs, elle en a déjà beaucoup et pas des plus gais. Bien matraquée par la vie, la pauvre femme me la raconte en long en large et en travers. Tiens, voilà une corde, mon ami, si tu tiens à ce que je te fasse le résumé...
J'ai honte de le dire, mais elle me retient près de quarante minutes, ainsi. Mais quoi ?! Que voulez-vous que je réponde à une femme qui me dit qu'elle a été mariée de force à une brute qui la battait, battait ses enfants et l'a même menacée un jour avec le fusil sur la tempe ? Que voulez-vous que je dise à une femme qui idolâtrait son père, sautait sur ses genoux un soir et le lendemain allait avec sa mère voir son corps violemment heurté par une voiture, la tête à deux mètres du corps ?
Vous en voulez d'autres ?...
Quarante minutes interminables quand on ne trouve pas les mots, l'empathie en berne.
Elle me propose même de venir dormir chez elle, si je veux, quand je lui dis que je cherche un emplacement où planter ma tente. Enfin, chez elle... C'est même pas chez elle ; son crétin de mari est mort criblé de dettes et il a fallu vendre la maison pour les étancher. C'est son gendre, finalement, flairant la bonne affaire qui l'a rachetée et l'héberge gracieusement. Jusqu'à quand ?
Non merci, madame, je vais trouver, ne vous en faites pas.
Je ne trouverai finalement pas.
Arrivé à Castelnaud, où je sais qu'il y a un camping, je cherche fébrilement une indication dans le village. C'est en revenant en arrière que je la trouve : je suis passé non loin tout à l'heure à près d'un kilomètre d'ici.
Retour en arrière...
À la réception, j'indique à la dame derrière le guichet qu'il serait judicieux que le camping soit renseigné quand on arrive de l'autre côté. Me prenant pour un pèlerin de Compostelle, majoritaire ici parmi les randonneurs, elle m'indique le panneau que je ne pouvais pas rater !
Mais elle écoute ce que je dis ou pas ?!! Je vous ai dit que j'étais arrivé de l'autre côté ! Je ne vais pas à Compostelle, je suis sur le chemin de Barker.
Le quoi ?
Ce ne sera pas la dernière personne qui ne connait pas. Je lui explique, lui montre le petit fascicule du Conseil Général. Je le ferai à plusieurs reprises les jours suivants aussi.
Personne ne connait le Barker.
Il est déjà 17h40 quand je rencontre une mamie qui commence à me questionner sur mon gros sac à dos. Je lui décris mon chemin et m'aperçois très vite qu'elle a surtout besoin de parler d'elle. Elle se force à marcher tous les jours tant qu'elle y voit. Atteinte d'une dégénérescence maculaire, elle est condamnée à finir aveugle. Alors elle profite du peu de vue qu'il lui reste pour se faire des souvenirs.
Des souvenirs, elle en a déjà beaucoup et pas des plus gais. Bien matraquée par la vie, la pauvre femme me la raconte en long en large et en travers. Tiens, voilà une corde, mon ami, si tu tiens à ce que je te fasse le résumé...
J'ai honte de le dire, mais elle me retient près de quarante minutes, ainsi. Mais quoi ?! Que voulez-vous que je réponde à une femme qui me dit qu'elle a été mariée de force à une brute qui la battait, battait ses enfants et l'a même menacée un jour avec le fusil sur la tempe ? Que voulez-vous que je dise à une femme qui idolâtrait son père, sautait sur ses genoux un soir et le lendemain allait avec sa mère voir son corps violemment heurté par une voiture, la tête à deux mètres du corps ?
Vous en voulez d'autres ?...
Quarante minutes interminables quand on ne trouve pas les mots, l'empathie en berne.
Elle me propose même de venir dormir chez elle, si je veux, quand je lui dis que je cherche un emplacement où planter ma tente. Enfin, chez elle... C'est même pas chez elle ; son crétin de mari est mort criblé de dettes et il a fallu vendre la maison pour les étancher. C'est son gendre, finalement, flairant la bonne affaire qui l'a rachetée et l'héberge gracieusement. Jusqu'à quand ?
Non merci, madame, je vais trouver, ne vous en faites pas.
Je ne trouverai finalement pas.
Arrivé à Castelnaud, où je sais qu'il y a un camping, je cherche fébrilement une indication dans le village. C'est en revenant en arrière que je la trouve : je suis passé non loin tout à l'heure à près d'un kilomètre d'ici.
Retour en arrière...
À la réception, j'indique à la dame derrière le guichet qu'il serait judicieux que le camping soit renseigné quand on arrive de l'autre côté. Me prenant pour un pèlerin de Compostelle, majoritaire ici parmi les randonneurs, elle m'indique le panneau que je ne pouvais pas rater !
Mais elle écoute ce que je dis ou pas ?!! Je vous ai dit que j'étais arrivé de l'autre côté ! Je ne vais pas à Compostelle, je suis sur le chemin de Barker.
Le quoi ?
Ce ne sera pas la dernière personne qui ne connait pas. Je lui explique, lui montre le petit fascicule du Conseil Général. Je le ferai à plusieurs reprises les jours suivants aussi.
Personne ne connait le Barker.
Toujours à l'accueil du camping de Castelnaud : vous voulez un emplacement pour une tente ?
Oui, je veux bien, mais sinon vous avez quoi comme autres prestations ?
J'ai le gîte, si vous voulez. 2,5€ de plus que la tente.
2,5€... Je prends !
Tant pis pour la tente. Oui, je sais, je fais ce chemin aussi pour tester mon matériel. Disons qu'aujourd'hui, j'aurai testé le portage du matériel !
Je me retrouve dans un gîte de 11 places, tout seul ! Grand luxe avec une superbe cuisine, une grande salle à manger et des sanitaires en veux-tu en voilà !
Je m'installe en choisissant mon lit (il est là, le luxe !), prends ma douche et reviens vers le bar pour une petite mousse. Peine perdue, le bar est fermé.
Bon, tant pis, je reviens vers mon gîte et me prépare un frugal repas à base de boulgour et autrestrucs insipides graines que je déguste (!) sur la terrasse.
Un drôle de bruit, que je reconnais aussitôt comme celui d'un brûleur, m'interpelle alors. Je lève les yeux et vois deux montgolfières s'élever majestueusement.
Vu le ciel dégagé, ça risque cailler cette nuit. Je constate en plus que le chauffage est éteint.
J'ai confiance en mon sac de couchage. Doublé de mon sac à viande, ça me fait un cocon où je reste bien au chaud.
Oui, je veux bien, mais sinon vous avez quoi comme autres prestations ?
J'ai le gîte, si vous voulez. 2,5€ de plus que la tente.
2,5€... Je prends !
Tant pis pour la tente. Oui, je sais, je fais ce chemin aussi pour tester mon matériel. Disons qu'aujourd'hui, j'aurai testé le portage du matériel !
Je me retrouve dans un gîte de 11 places, tout seul ! Grand luxe avec une superbe cuisine, une grande salle à manger et des sanitaires en veux-tu en voilà !
Je m'installe en choisissant mon lit (il est là, le luxe !), prends ma douche et reviens vers le bar pour une petite mousse. Peine perdue, le bar est fermé.
Bon, tant pis, je reviens vers mon gîte et me prépare un frugal repas à base de boulgour et autres
Un drôle de bruit, que je reconnais aussitôt comme celui d'un brûleur, m'interpelle alors. Je lève les yeux et vois deux montgolfières s'élever majestueusement.
Vu le ciel dégagé, ça risque cailler cette nuit. Je constate en plus que le chauffage est éteint.
J'ai confiance en mon sac de couchage. Doublé de mon sac à viande, ça me fait un cocon où je reste bien au chaud.