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"L'Odyssée de Cherche-Midi " - Tour de France en Kayak par les rivières

(réalisé)
Tour de France en kayak par les rivières. En quatre mois, Cherche-Midi a traversé les quatre bassins fluviaux français. Ce périple a été effectué en autonomie et en solitaire exclusivement à la pagaie et à pied.
kayak de rivière
Quand : 01/07/2024
Durée : 120 jours
Distance globale : 3078km
Dénivelées : +1714m / -1665m
Alti min/max : -1m/384m
Carnet publié par Cherche_Midi le 30 oct. 2024
modifié le 05 déc. 2024
Mobilité douce
du pas de la porte au pas de la porte
Précisions : Le bateau est parti d'Evreux début juillet 2021 et revenu à Evreux début juillet 2024. Il a navigué un mois par an en saison estivale et hiverné en club CK. Le pagayeur est revenu chez lui entre temps par le train.
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Vue d'ensemble

Le topo : Saison 4 - Bassin de la Loire (mise à jour : 25 nov. 2024)

Distance section : 712km
Dénivelées section : +511m / -440m
Section Alti min/max : 15m/156m

Description :

Cette quatrième saison a été effectué en juin 2024. Après avoir franchi le plateau du Poitou. Cherche-Midi a descendu la Vonne, le Clain, la Vienne et la Loire jusqu'à Angers. Ensuite il a remonté la Maine et le Loir pendant deux semaines jusqu'à Bonneval. Après avoir franchi le plateau de la Beauce, il a retrouvé le bassin versant de la Seine et descendu l'Eure jusqu'à la hauteur d'Evreux où une liaison terrestre lui a permis de retrouver l'Iton et de revenir à son point de départ.

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Le compte-rendu : Saison 4 - Bassin de la Loire (mise à jour : 25 nov. 2024)

Club CK de Saint-Maixent
Club CK de Saint-Maixent
29 mai 2024

Michel me dépose au club avant de partir travailler et nous sortons ensemble Cherche-Midi du local où il était entreposé depuis 11 mois.
Avant de me laisser, incidemment il me demande : « Tu n’as rien oublié ? Tu as tout ? Tu as ta jupe ? »
« … ma jupe !!? »
... Hé bien non ! À l'instar du “syndrome d'oubli du casque” bien connu des spéléos, j'ai laissé la jupe en Normandie... Un énorme merci à toi Michel pour le prêt de la jupe, j'aurais été bien handicapé sans cet élément essentiel.

Matinée de marche jusqu’à la Mothe-Saint-Héray sous une pluie intermittente. Beaucoup de champs cultivés sont noyés.

Je rends visite à André, rencontré au camping de Saint-Maixent en juillet dernier. Il habite maintenant dans une petite maison avec Marie-Ange qui est d’origine réunionnaise. Il m'accueille chez lui jusqu'à demain, je profite de son garage pour effectuer au sec les petits travaux dont mon compagnon a besoin avant le départ :
 - Nettoyage du pont
 - Réparation à la résine d'une griffure profonde sous la coque
 - Soudure à la résine d'anneaux d'amarrage pour le matériel sur les côtés internes (Pagaie de secours et tapis de glisse)
 - Pose d'autocollants sur le pont et d’un nouveau liseré sur la soudure pont-coque

Ainsi, mon compagnon est tout beau et prêt à affronter un mois de navigation.

30 mai

Je quitte André et Marie-Ange à 8h45 et pars sur les chemins agricoles en slalomant entre les limaces et les escargots.
Ces chemins sont par leur usage parsemés de flaques, mottes de terre éjectés par les roues des tracteurs et de cailloux déchaussés. J’espère que les nuages menaçants voudront bien garder leurs gouttes pour d’autres qui en ont besoin.
Grands champs de maïs, de colza, de blé, rampes d’arrosage: Les exploitations agricoles sont de grande dimension. Après 10 km de tractage, j’arrive à Rouillé. Il est 13h30, l’heure du pique-nique. Ma hanche gauche est douloureuse (pas étonnant à Rouillé), ... J'avais oublié combien le tractage de Cherche-Midi est un exercice physique sur longue distance ! Il y a un abri en forme de kiosque, des WC et un robinet: je décide de passer la nuit ici !
Lusignan
Lusignan
31 mai

Trois heures de marche sans pluie ce matin, mais les chemins sont bien mouillés et les sédiments éoliens du plateau collent bien aux roues.

Arrivée à Lusignan vers 12h après avoir gravi la rue fortement pentue qui mène au château. Au coin de la place de la mairie, l'épicerie bio est ouverte, je fais le ravitaillement tout de suite et n'aurai pas besoin de remonter du camping qui se trouve au pied de cette belle ville fortifiée et perchée.

Mise à l'eau sur la Vonne
Mise à l'eau sur la Vonne
La Vonne
La Vonne
1er juin

Je suis filmé et photographié par un campeur, ancien kayakiste.

Peu de moulins, de grands planiols et quelques rapides. Ça manque juste un peu de soleil et de chaleur, mais le parcours est agréable.

Lors du passage d’un petit seuil un peu tordu obligeant à se faufiler entre les branches d'un arbre tombé au-dessus du rapide, je suis obligé d’effectuer un bac arrière un peu musclé et réveille une vieille douleur dans mon épaule gauche. Cette douleur m’accompagnera toute la descente. Pourvu que cette épaule tienne bon, ce n’est que le premier jour.

Je débarque à Vivonne à côté d’une scène couverte abritant une sono. Un homme me pose des questions à mon passage : il s’agit du batteur du groupe “Comeback 80” qui vient de l’Oise. Ce soir ils donnent un concert …

… Le public est venu en nombre. Après avoir grignoté du saucisson et bu une bière, je passe devant la scène et la table des trois musiciens de “Comeback 80”. Le batteur du groupe me reconnaissant m’invite à leur table. Ils se restaurent avant leur prestation car ils se produisent en seconde partie. Le chanteur me confie : “Le plus dur avant de monter sur scène, c’est d’attendre !”. Ils se préparent : un petit coup de whisky et un petit joint,... Ça rigole,... Ça promet !

J’assiste au début de leur prestation, ils ont la pêche. Mais le froid tombe et je rentre me mettre au chaud sous la tente.
Le Clain
Le Clain
Base CK de Saint-Benoît
Base CK de Saint-Benoît
2 juin

J’ai dormi tout habillé tellement il a fait froid. Je reste le plus longtemps possible dans le duvet, puis sous la tente en rangeant méthodiquement le matériel, puis appelle Fabienne, peu pressé de sortir… Je me résous finalement à plier la chambre et procède au petit déjeuner.

Je retarde au maximum le moment de me changer pour enfiler la tenue de kayak : la température va peut être monter de 1°, ce sera toujours mieux…

La rivière me semble plus large que la veille… forcément, nous sommes maintenant sur le Clain. Les ragondins sont nombreux, ils déguerpissent à mon passage. Les quelques rapides sont agréables et les chaussées pas trop difficiles à descendre : elles obligent cependant à débarquer et faire glisser le bateau en bas du mur avec les précautions d’usage pour épargner la coque (utilisation du tapis de gazon synthétique).

Au niveau d'Iteuil, le gros barrage est impossible à franchir. Aucun chemin n’existe ni en rive droite ni en rive gauche. Je débarque dans l’enceinte d’une usine désaffectée. Une famille est là : papa maman et les trois enfants, passant leur dimanche à la pêche. Le père charpentier menuisier à l’autorisation de pénétrer dans les lieux car son entreprise utilise une partie des entrepôts et il a la clé de la grille. Dès le casse-croûte terminé et le bateau sur chariot Il m’accompagne jusqu'à la grille pour m’ouvrir. Le contournement par la route est assez long, un chemin en sous-bois permet ensuite de retrouver le Clain en aval sur un bel espace de pique-nique muni d’une cale de mise à l’eau cimentée.

On entre ensuite dans “la vallée des merveilles”, un petit coin proche de Poitiers permettant de s’évader dans la nature : promenade, canotage, escalade etc…) Quelques rapides, des promeneurs, des falaises équipées pour l’escalade et un bac à chaîne. Après un dernier virage à droite on arrive à la base de Saint-Benoit sous laquelle passe le parcours de slalom. J’avais prévenu de mon arrivée et le cadre de service m’autorise à prendre une douche bien chaude avant d’installer la tente dans l’herbage derrière la base. Je discute avec un kayakiste slalomeur venu s’entraîner, il me donne des indications utiles à la traversée de Poitiers.
Arrivée sur Poitiers
Arrivée sur Poitiers
Poitiers - Barrage du Tison
Poitiers - Barrage du Tison
3 juin

Il fait un temps magnifique, enfin! Quel bonheur de prendre le petit déjeuner au soleil du matin.
À 11h15 j’arrive au barrage du Tison dans Poitiers : je débarque et vérifie que la vanne en rive droite est bien ouverte : une grosse partie du flux passe là et forme une puissante veine d’eau de classe 3. Je remets l’anorak, ferme bien la jupe, fixe solidement l’appareil, mets la caméra en route et “Banzaï !”...

À 13 h, une chaussée m’oblige à débarquer et tirer mon compagnon sur un superbe champ de pâquerettes, un nirvana pour le pique-nique. Nous sommes environ à mi-parcours. Après avoir étendu mes vêtements mouillés, je peux pour la première fois réchauffer mes vieilles douleurs aux doux rayons du soleil.

Le parcours de l'après-midi est varié: de longs planiols, quelques petits rapides, et quelques chaussées dont certaines permettent de sauter directement. J’ai le plaisir de surprendre deux martins-pêcheurs qui comme à leur habitude s’enfuient d’un vol rapide dans un éclair bleu électrique.

Le barrage de la Tricherie en pleine restauration, des ouvriers en tenue orange achèvent leur journée de travail. Je débarque sur la petite île où trône l’ancien moulin : elle est peuplée par des chèvres. Le vieux pont de bois menant en rive droite débouche sur une propriété privée…la propriétaire arrive en voiture, je la prie d’excuser cette intrusion fortuite, ce qu’elle admet, soulagée que mon débarquement ne soit pas dû à un incident grave.

Il est 18 h passée, je prends la piste cyclable menant au lac… il y a bien 2 km à faire…

À 19h je suis toujours en train de discuter avec le gérant fort sympathique. Le lac Saint-Cyr est une grosse base de Loisirs en grande difficulté, la présence de cyanobactéries interdit la baignade et par conséquent toutes les activités aquatiques associées : Kayak, pédalo, voile, planche à voile etc … Tous les personnels (une cinquantaine au total) qui géraient ces activités se sont donc retrouvés sans emploi, ainsi que d’autres tels que personnel de restauration ou activités annexes en raison de la baisse drastique du nombre de vacanciers. Les cyanobactéries sont également présentes dans les sédiments benthiques du Clain, ainsi que les entérocoques et Escherichia coli mais aucun arrêté n’interdit la navigation. À Poitiers les services de la Ville ont aménagé un bassin flottant pour la baignade en eau naturelle permettant de ne pas remuer les sédiments: les parois du bassin en métal inoxydable sont percées afin de permettre le renouvellement de l’eau par le courant.

Saison 4 - Bassin de la Loire
Saison 4 - Bassin de la Loire
4 juin

Aujourd'hui, l’étape jusqu'à Châtellerault ne fait que 10 ou 15 km : j'y ferai mon ravitaillement en visitant la ville cet après-midi car les provisions sont quasi-épuisées... 

Cherche-Midi saute 5 déversoirs dans la matinée ! Il faut bien entendu chaque fois bien observer si le bord du déversoir n’est pas trop agressif, si des pierres sont cachées au bas de la chute, si le fond est suffisant pour ne pas planter la pointe avant, s’il n’y a pas de phénomène trop important de rappel. Les déversoirs en fer à cheval permettent de voir la configuration d’en face, sinon, il faut débarquer pour trouver un point de vue, car d’en haut, impossible de voir le bas sans se rapprocher au risque de se faire happer par le courant. Prudence !

Dans l’intervalle entre deux déversoirs, il y a souvent des petits rapides : le Clain est finalement bien adapté à la descente en canoë ou kayak, je suis agréablement surpris.

À 13h30 Cherche-Midi arrive au confluent avec la Vienne. Dans 2 km nous arrivons au camping du Chillou d'Ozon. Débarquement à hauteur du camping à 13h 45 sur une belle cale de mise à l’eau en béton. Une pancarte indique le centre ville à 2 km…
La réception est fermée, je visite les lieux et fais connaissance avec mon futur voisin. Il s'appelle Sylvain et fait des livraisons “Deliveroo” sur Châtellerault. Il habite au camping avec sa chienne Réglisse. Laissant Cherche-Midi et le matériel tels quels, je pars au ravitaillement.

Rentrant des  courses, je décide de me reposer : le temps est trop lourd pour donner envie de marcher 2 km pour visiter la ville. En fin de journée j’offre une bière que j’avais achetée à dessein pour Sylvain, et nous discutons en regardant la rivière et l’oie cendrée qui a élu domicile sur la rive de l'Ozon.
Châtellerault
Châtellerault
La Vienne
La Vienne
5 juin

On arrive très vite sur le gros barrage infranchissable de Châtellerault. Un quai de débarquement est prévu bien à hauteur, par contre il faut emprunter un escalier pour arriver sur la piste cyclable. Par chance, un cycliste arrive, un militaire bien costaud, et l’affaire est réglée. Il faut par contre traverser tout Châtellerault pour trouver une cale permettant de se remettre à l'eau.

À 13 H, à la hauteur du camping des Ormes, une cale herbeuse s’offre à moi mi soleil mi ombre pour la pause méridienne. Une intuition me pousse à appeler le camping de Marcilly et … Mauvaise nouvelle, le camping ravagé par les crues est fermé pour travaux jusqu’à la fin du mois. Je décide de descendre jusqu'à l'île Bouchard se trouvant 14 km en aval. Un appel me confirme que celui-ci est bien ouvert. Cela va prolonger l’étape de 33 à 47 km.

À 17h30 je débarque dans les sédiments mous et malodorants laissés par la grosse crue récente. Il me faut ensuite nettoyer la coque de Cherche-Midi si je ne veux pas avoir l'impression de souper sur un tas de fumier. Après avoir choisi mon emplacement entre deux beaux érables pour tendre le fil à linge, j'aperçois deux kayaks à côté d’une caravane. Ce sont des retraités allemands de Cologne qui naviguent en faisant les navettes à vélo. Ils me proposent un café. « Gern, aber Zuerst Dusche! »

La Vienne
La Vienne
Chinon
Chinon
Barque traditionnelle de Loire
Barque traditionnelle de Loire
Montsoreau
Montsoreau
6 juin

La rive près de la guinguette qui jouxte le camping est moins vaseuse, un muret pierre partiellement éboulé permet d’embarquer sans se souiller. Après un dernier petit rapide sous le pont de l’île Bouchard la Vienne est ensuite complètement plate et le parcours devient très monotone.

En rive gauche à la hauteur de Rivière, j’aperçois une grosse masse jaune partiellement immergée calée contre un arbre. Je distingue assez vite qu’il s’agit d’une voiture emportée par la crue. Un petit coup d’œil à l’intérieur par la vitre ouverte convainc que le véhicule est définitivement hors d’usage.

Pause méridienne sur la cale en plein centre ville. L’endroit est miné par les crottes de chien, mais il y a un peu d’ombre et Cherche-Midi reste sous ma surveillance.

Enfin, après la dernière partie qui m’a paru interminable, je parviens à la confluence de la Loire. Le petit village de Candé-Saint-Martin vu du confluent est adorable. Sur la cale, un homme en blanc remet en état une ancienne barque de pêche en Loire. Il imprègne la coque avec du goudron de Norvège. Ce goudron obtenu par la pyrolyse du bois de pin est utilisé depuis les premiers siècles de notre ère pour le calfatage, il paraît que c’est le meilleur traitement hydrofuge. Cette embarcation traditionnelle recyclée pour la promenade se nomme “Ousectuva”.

À 16 heures, je débarque sur le petit port de Montsoreau. Je traverse le bourg, des habitations troglodytiques ont été aménagées dans toute la falaise, Ce petit bourg n’usurpe pas sa certification “Plus beaux villages de France”. Une fois installé au camping, je pars visiter la champignonnière du Saut du Loup. Le soir au resto du camping je déguste la spécialité locale, les galipettes d’Anjou, des petits toasts sur champignons.
Embarquement sur la Loire
Embarquement sur la Loire
Banc de sable
Banc de sable
Un Chaland de Loire
Un Chaland de Loire
Une toue cabanée
Une toue cabanée
Saumur
Saumur
7 juin

Une belle journée ensoleillée qui commence.

Nous arrivons à Saumur peu avant midi. Le chef d’un bateau restaurant me donne des renseignements sur les modèles de bateaux traditionnels de la Loire. Les modèles anciens sont “la toue cabanée” qui sert à tout, “la toue à sable” qui allait chercher le sable de construction et “le chaland de Loire” qui était destiné au fret et naviguait depuis Nantes jusqu'à Orléans. Ce dernier est muni de voiles et d’un  énorme gouvernail.

La Loire est large et plate, mais pas monotone, car on navigue entre les îles qui sont nombreuses. Certaines sont agrémentées de belles plages de sable fin, et font le bonheur des oiseaux. J’ai découvert la sterne naine qui pêche les petits poissons.

Pause méridienne à 13h30 sur l’île Pistolet en amont de Gennes. Pique nique naturiste. J’envisage jouer le Robinson aussi cette nuit. Ce serait dommage de rater un camp sauvage avec toutes ces îles tellement accueillantes.

À 17 heures je débarque sur l’île du Grand Buisson repérée sur la carte en aval de Loire-Authion. Les paillettes de mica font scintiller le sable.

Après avoir fait un tour du propriétaire, je choisis un endroit ombragé sur les hauteurs de la plage pour planter la tente. Soirée naturiste, yoga, détente.

Pendant la préparation du repas, j’entends le vrombissement reconnaissable d’un drone. Ce n'est pas agréable de se sentir observé du ciel de cette façon anonyme.
Île du pistolet
Île du pistolet
Île du Grand Buisson
Île du Grand Buisson
Pont de Cé
Pont de Cé
La Maine
La Maine
8 juin

Le seul indice de mon passage sur l’île se résume aux traces des roues du chariot sur la plage. Comme toujours, je ne laisse aucun papier ni gras ni sentinelle malodorante. Mes matières fécales sont toujours enterrées (la pagaie de secours fait une très bonne pelle).

Nous naviguons toute la matinée entre les îles et les bancs de sable occupés par une quantité d’oiseaux : oies bernaches, sternes naines, cormorans, cygnes, chevaliers aboyeurs, bergeronnettes, petits gravelots, sternes naines, aigrettes garzettes…

Je suis un peu déçu par le Pont de Cé, les cartes et guides annonçaient des rapides intéressants: je n’ai rien vu.

Je débarque à la base nautique de Bouche-Maine pour la pause méridienne : petite sieste à mi-ombre. La location de kayaks fonctionne déjà bien, nous sommes samedi, et il fait beau.

La Maine est une rivière atypique, très courte et bordée de promontoires schisteux. On devine que les eaux des rivières descendant des Alpes Mancelles et de Suisse Normande ont butté contre un rempart rocheux avant d’y creuser leur passage.
Je débarque sur le lac de Maine en milieu d'après-midi entre la compétition de kayak en ligne et l’entraînement des chiens sauveteurs. Un chemin de promenade agréable mène au camping.

Le Loir
Le Loir
Premier barrage
Premier barrage
9 juin

Au niveau du port d’Écouflant je laisse la Vieille Maine à ma gauche. La végétation des rives est typique des zones marécageuses. Le lieu semble touristique car des bateaux de plaisance sont amarrés au ponton et des gens se promènent. Il me semble probable que les barques amarrées servent à emmener les touristes faire une petite promenade dans ce lieu de confluences, mais je ne vois aucune embarcation naviguer. Le courant est peut-être trop fort ?

Quand j’arrive au confluent Sarthe/Loir en forme de “T”, Je constate que le courant du Loir est moins rapide que celui de la Sarthe : tant mieux. Connaissant le cours de la Sarthe de longue date, je sais qu'il aurait été difficile de remonter cette rivière.

La première partie du Loir traverse encore une zone humide. Il est temps de faire la pause méridienne, mais où trouver un endroit pour débarquer ? Les berges sont pentues et couvertes d’un limon frais qui se craquelle. Enfin, à la faveur d’un groupe d’arbres, je parviens à prendre pied sur quelque chose de stable et pas trop glissant. C'est surréaliste : le terrain marécageux est recouvert d'une espèce de mousse nappante gris-vert laissée par la crue. Impossible de s'asseoir.

Je déroule mon tapis de gazon synthétique, pose mes affaires dessus, trouve des branches mortes à planter pour faire un étendoir à linge, mets un haut sec et peux enfin me restaurer. Les nuages qui passent provoquent de temps en temps un souffle froid et le rayon de soleil suivant est le bienvenu. Pas de sieste possible je remets mon lycra presque sec et remonte à bord de Cherche-Midi.

Un peu plus loin, je vois deux pêcheurs locaux transportant chacun une nasse bourrées d’écrevisses de Louisiane. L’espèce pullule en ces eaux. Les interrogeant sur la nature de cette mousse nappante et filandreuse, ils me répondent n’avoir jamais vu le phénomène avant en me précisant que les prés sont restés anormalement longtemps immergés.

18h45 Je débarque sur la plage de Villevêque. Les toilettes sont closes. Une autochtone me propose plutôt d’aller en amont du moulin vers l’aire des Camping-cars. Un espace arboré a été aménagé en aire de pique-nique. Les personnes venues passer le dimanche quittent les lieux les uns après les autres et finalement l'espace entier m'appartient. Après avoir d’abord équipé Cherche-Midi en cuisine, je prépare un repas du soir bien mérité. Le point d'eau est HS, heureusement que j'ai 4 litres d'eau.
Moulin de Montreuil
Moulin de Montreuil
Saison 4 - Bassin de la Loire
10 juin

Les toilettes publiques automatiques sont de nouveau fonctionnelles: cela a son importance le matin. En plus, le lavabo me permet de remplir poches à eau et gourde. 

Beaucoup de nuages et un peu de vent. Étape prévue ce soir à Lézigné, un tout petit village pour un second campement sauvage consécutif. La douche et la recharge des batteries se feront après demain au camping de La Flèche, 50 km en amont. Il y a 6 barrages à remonter aujourd'hui, correspondant à 6 moulins.

Je remonte trois seuils le matin:
1- Moulin de la Motte, débarquement et embarquement faciles: cales pavées.
2- Moulin de Matheflon.
3- Moulin de Montreuil, pause pique nique sur les tables proches du petit bac à corde.

Le repas achevé, je prends le chemin du moulin qui mène à la propriété. Laissant Cherche-Midi à la grille ouverte, je pénètre à la recherche des occupants pour demander autorisation de traverser la propriété et mettre le bateau à l’eau en amont. L'homme me dit que cela ne pose aucun problème, et qu’il a fauché un passage pour mettre lui aussi son kayak à l’eau.
Je fais la connaissance de Bernard, nous discutons un moment devant un café. Nous réalisons que nous avons eu une carrière professionnelle assez proche: lui aussi a commencé comme instituteur. Il a effectué son service civil en coopération au Maroc, puis a continué à enseigner dans différents pays d’Afrique du Nord : Algérie, Tunisie, Libye, Yémen, avant de repartir toujours dans l’enseignement à Singapour.
Après cela il est devenu professeur des universités dans un IUT. Il est fondateur et rédacteur en chef du journal Papyrus 49, tiré à 50000 exemplaires dont il m’offre le dernier numéro. Le moulin fait chambres d’hôtes, sa compagne Laure est infirmière en psychiatrie, elle est propriétaire du moulin qui fait chambre d'hôtes ainsi que du château de Montreuil dont elle a la charge par héritage.
Bernard prend mon départ en photo.

Encore trois seuils à remonter l'après-midi:
4- Moulin de Vaux, 15h55, pas de cale, mais embarquement et débarquement faciles.
5- Moulin de Peignes, 16h45, la pluie commence et continuera pendant une heure.
6- Moulin de la Guiberdière, 17h40, juste une chaussée basse, il suffit de tirer dans l’eau à la faveur d’une brèche.

Quand nous arrivons à Lézigné, il est presque 18 heures. Après avoir cherché en vain une remise à l’eau en amont du barrage sans entrer dans une propriété, je sonne chez un riverain. On me suggère de passer le pont et de m’installer dans la prairie en face qui m’offrira un embarquement facile demain. Un chemin en sous-bois part bien sur la gauche après le pont, sauf qu’il n’est absolument pas fauché : je dois installer mon campement dans les herbes folles parcourues par les limaces, escargots et cloportes, tous heureux de la dernière pluie. Il me faudra faire très attention à ne pas perdre de matériel demain, surtout les sardines.
Moulin de Gouy
Moulin de Gouy
Moulin de Chalou
Moulin de Chalou
11 juin

Le soleil brille mais le bivouac est à l'ombre. J'ai mal dormi, réveillé régulièrement par les gouttes de condensation qui tombent sur mon sac de couchage. Après avoir monté une corde à linge au soleil en bord de rivière, je fais des allers et retours sur 100 m pour y suspendre tout le matériel humide.
À 10h25, Cherche-Midi est enfin à l’eau, après que j’ai empaqueté tout à peu près sec. Huit seuils à remonter aujourd’hui.

Les 6 moulins de la matinée permettent un passage direct par tractage sur herbe ou sur déversoir moussu: Chaufour, Durtal ,Gouy, Chalou, Moulins neufs, Barbée. Ayant déjà fait plus de la moitié du trajet à 13 h 30, je débarque pour la pause à Bazouges. De gros nuages gris foncé sont arrivés et la température a fraichi, la sieste est compromise, je repars donc pour les 10 km restants. Encore deux seuils à remonter jusqu'à La Flèche : Moulin des Navrans, Moulin des Pins…

À 17h10 j’accoste sur la cale proche du camping. Il faut  faire un grand tour pour trouver l’entrée, aucun portillon ne donne sur le chemin de rive.
On me propose un emplacement randonneur à proximité d’un abri de convivialité bien équipé. Je me dépêche de m’installer car la pluie arrive. Les premières gouttes tombent alors que j’ai à peine fini de monter la tente.

En attendant la fin des hostilités je mets à sécher mes vêtements et ma literie encore un peu humides sous l’abri. Ensuite, je pars au ravitaillement à travers les dernières gouttes.

Soirée dans l’abri de convivialité en compagnie d’Éric. C’est un cycliste de 64 ans parti du Mans pour faire le tour de Bretagne et Basse Normandie.
12 juin
12 juin
12 juin
12 juin
Château du Lude
Château du Lude
12 juin

Réveillé par le soleil, je sors sous un grand ciel bleu: ça donne du courage !

La grille du moulin pour accéder au poind d'embarquement reconnu hier est cadenassée. Je remonte la rue parallèle au Loir à la recherche d’un chemin menant à la rive, mais tous les chemins desservent des propriétés. Une passante m’indique un petit espace vert à 50 m à droite donnant sur une dérivation, normalement les vannes sont ouvertes et je pourrai rejoindre le Loir.

10h 30, Il fait beau, pas de vent, je décide de ne pas mettre l’anorak. 7 seuils à remonter aujourd’hui: La Bruère, Les Belles Ouvrières, Mervé. Le temps se couvre assez vite et je dois remettre l’anorak.

À 14 H je débarque à Luché-Pringé. Nous sommes à mi-parcours, et il est grandement l’heure de la pause. Le soleil est revenu et je peux même faire une petite sieste après le repas.
 
4 seuils à remonter cet après midi: Barrage de Luché, Moulin de Vilaine, Barrage de la Courbe, Moulin de Thienval.

À 18 heures j’arrive sur la cale qui mène au camping du Lude. Après l’enregistrement, je laisse Cherche-Midi en l'état et pars immédiatement faire un petit tour de ville avant que les commerces ferment. Le centre ville n’est pas trop loin, il suffit de passer le pont et de passer devant le très beau château du Lude avec sa façade style Renaissance.
Barrage de Malidor
Barrage de Malidor
Plage de gravier
Plage de gravier
La Gravière
La Gravière
13 juin

Matin difficile, ce n’est pas la forme…Il a encore fait très froid cette nuit, j’ai dormi avec 4 couches de vêtements en haut et deux couches en bas.
Le matin je réalise que le soleil va mettre très longtemps à dépasser la cime des arbres, il fait froid et la tente a beaucoup condensé.

Je ne sais pas si j’aurai le courage de remonter les 25 km… on verra …

En amont du barrage de Cherré, une superbe et immense propriété enchâssée dans la falaise surplombe le Loir en rive droite. Elle figure sur la carte IGN d’une manière succincte, s’appellerait La Gravière.

Deux barrages passés: un en tractant sur herbe, l’autre en tractant sur déversoir.

À 14h15 un ponton me permet de débarquer et pique-niquer au soleil sur une souche. Je mets des vêtements secs et fais sécher ma tenue de navigation sur un grillage. Après une petite sieste sur le ponton en bois, je me sens mieux et suis prêt à repartir.

Le courant devient plus fort et je suis même obligé de jouer avec les contre-courants pour remonter des petits rapides.

Le barrage de Varennes fait bien 2 m de dénivelé et la seule façon de contourner est de passer dans l'entreprise de cartons d'emballage. Je pars reconnaître le passage, ne rencontre personne et reviens mettre Cherche-Midi sur chariot. En traversant la cour, je rencontre une employée fort étonnée de mon passage, mais qui me permet de passer sans faire d’histoire.

Le dernier barrage de Vaas se passe en tractant dans l’eau. On voit ensuite quelques petites plages de graviers ou de sable grossier, la rivière prend un aspect moins régulé et plus naturel.

À 18h15 je passe sous l’autoroute A28, mon point de repère pour l’arrivé à l'étape “sauvage” que je me suis fixée (Port l'aumône) proche du village de Montabon.

Le port n’a que le nom et le quai est minimaliste: une plateforme en bois d’à peine 2 m dont l'extrémité est immergée.

Au dessus, un espace a été récemment tondu et la tonte laissée, faisant un tapis de foin parfait pour le Bivouac. Il se met à pleuvioter en fin de repas et il me faut rapidement rentrer tout en vrac sous la tente.
Moulin de Nogent
Moulin de Nogent
Moulin Pousset
Moulin Pousset
Nuit en cabane
Nuit en cabane
14 juin

Il a plu par intermittence pendant toute la nuit. Au lever il fait très gris. Les prévisions locales annoncent des éclaircies dans la journée, puis des précipitations en soirée.

Alors que je déjeune face à la rivière, 4 kayakistes passent sur la rivière en kayaks de mer. Je leur lance un “Salut camarades de la pagaie”. Ils descendent sur plusieurs jours jusqu'à Briolet, confluent Sarthe/Loir. Ce sont les premiers kayakistes du périple que je croise faisant un raid en autonomie. Je me demande s'ils sautent les déersoirs avec leurs kayaks de mer à gouvernail ?

Seulement trois barrages à remonter aujourd’hui.

Le barrage de Nogent se passe en tractant sur la chaussée en béton : Le petit tapis de gazon synthétique prend toute son importance. Au moulin Pousset, le passage le moins mauvais oblige à tracter sur un déversoir formé de gros blocs rocheux moussus : attention aux chevilles !

Une suite de rapides m’obligent à accélérer dans chaque contre-courant pour effectuer des bacs, je commence à m’échauffer et retire le K-way.

À 13h30 j’aperçois un banc sur la berge. La carte indique Port Gautier. Un petit ponton me permet de débarquer mais je me rends compte que je suis dans un jardin privé. Je sonne à la porte de la maison, l'occupant m’autorise bien volontiers à pique niquer sur le banc. Je profite du petit rayon de soleil pour ôter mon lycra mouillé et tenter de le faire sécher, mais le temps se couvre et le vent se lève : je renfile mon vêtements mouillé et repars.

Encore deux suites de rapides séparées d’un planiol calme, puis le courant s’intensifie avant d’arriver au dernier barrage, celui de l’usine Rustine. Là, impossible de passer, je suis obligé de redescendre un peu en aval pour sortir en rive gauche sur un chemin qui mène à la route. Alors que je consulte la carte devant un portail ouvert, le riverain vient me voir. Il m’accompagne gentiment au fond de son jardin pour embarquer. Il est retraité de chez Rustine et me raconte un peu l’histoire de cette entreprise familiale. Le plus difficile me dit-il est de faire adhérer correctement le caoutchouc sur le support en aluminium.

À 17h50 je débarque dans les orties au niveau du portillon du camping pour entrer par la porte de service comme d'habitude. Laissant Cherche-Midi sur l'emplacement, je pars immédiatement au ravitaillement (15 mn à pied du centre ville). La Chartre est en ébullition, un gros rassemblement de véhicules de collection a été organisé. Une ou deux voitures de sport font ronfler leur moteur d'une manière insupportable: nous n'avons pas les mêmes valeurs! 

Une grosse dépression arrive et je rentre au camping au pas de course sous la pluie. En attendant que la pluie cesse pour monter la tente, je m’installe pour le souper à l'abri sous une cabane sur pilotis.

Les averses se succèdent toute la soirée et la météo locale en annonce encore pour la nuit. Après avoir visité le premier étage de la cabane inoccupée je décide de ne pas monter la tente. La chambre de la cabane est bien sèche, équipée de deux lits de camp: quitte à payer un supplément demain matin je m’installe… pas de tente mouillée à plier demain.
15 juin
15 juin
Trôo
Trôo
Saison 4 - Bassin de la Loire
15 juin

Le lendemain matin de bonne heure, après avoir sorti mes affaires et refermé soigneusement la cabane j’ai jugé inutile de signaler avoir occupé les lieux à l’accueil.

Des nuages commencent à arriver et un vent froid se lève. À 10h 35 le capitaine est à bord, larguez les amarres !

J'échauffe mes bras dans une série de rapides, et nous arrivons au barrage de Châtillon. Une partie du déversoir est à sec et tout moussu, Je tire Cherche-Midi sans crainte pour la coque. Alors que la coque est inclinée je remarque que des gouttes sortent par l’étrave: cette petite entrée d’eau est certainement due à l’usure de la quille par les frottements multiples répétés. Ce n’est pas dramatique, je vais scotcher l’endroit. Une fois revenu à la maison, il faudra réparer à la résine.

En amont de ce premier barrage, il faut remonter des rapides pour arriver sur le seuil de Ruillé.  Celui-ci a très peu de dénivelé et il suffit de tracter dans l’eau à la faveur d’une brèche.

Au barrage de Poncé, je débarque au pied d'un barrage de 1,30 m. Impossible de débarquer ni sur une rive ni sur l’autre. Au pied du barrage les pieds dans l'eau cela fait une verticale de 1,50m. Je sors d'abord tous les bagages et les dépose en haut du mur. Ensuite je dois improviser un marche-pied. Trouvant un bois flotté muni d’une fourche parmi les embâcles je le cale sur les palplanches et l'utilise comme échelle… Crac ! Alors que je tente le rétablissement, il casse net et je me rattrape avec les bras sur le bord en béton pour amortir la chute, et ressens une douleur vive dans mon épaule gauche fragilisée. Utilisant ensuite un de mes bidons hauts comme marchepied, je parviens enfin à me rétablir sur le sommet du barrage avec la corde de traction en bandoulière. Après avoir mis le tapis en double sur l'arrête, je tire Cherche-Midi comme je peux avec mon épaule douloureuse et le porte jusqu’à l’eau, 6m plus loin. Pour finir, je dois réintroduire tous les bagages.
Mon épaule est bien douloureuse, je pagaye tout doucement, attendant et espérant que le mouvement améliore les choses.

À Moulin Ronsard, le barrage est muni d’une glissière en béton légèrement moussue à sec : je place le tapis et fais glisser Cherche-Midi sur 3 ou 4 mètres pour recommencer la manœuvre.

Je décide de m’arrêter pour la pause à l’aire de pique nique de l’Isle verte repérée sur la carte, j’ai déjà remonté 14 km et fait la moitié de l’étape. Après m’être habillé de sec, je mange en marchant énergiquement en rond pour ne pas me refroidir. Le soleil s’est caché, le vent est glacial…après une tentative de réchauffer mon maillot lors d’une trop courte éclaircie, je me résigne à le remettre pour embarquer rapidement et me réchauffer par l’effort.

Les rapides deviennent de plus en plus rapprochés. Ceux-ci sont parfois entièrement nappés de renoncules flottantes toutes fleuries de blanc. C’est très joli, mais rend difficile de planter la pagaie dans l'eau, et je dois fréquemment tracter le bateau en marchant dans les herbes, l’eau à mi-cuisses.
Prendre les contre-courants situés proches des rives est souvent difficile car ils sont sous les branches tombantes.

Un petit barrage bas m’oblige à débarquer pour tirer Cherche-Midi, puis après un long planiol, un rapide mène au bas du dernier barrage avant Trôo. En extrémité de la chaussée, une rampe faiblement pentue sur laquelle coule un filet d’eau sur la mousse me permet de tracter confortablement mon camarade. Ça y est, nous sommes arrivés.

L’aire de pique-nique est en rive gauche à St Jacques-des Guérets, le bourg de Trôo est en rive droite.
Après avoir enfilé un haut sec, je vois un groupe de personnes autour d’un véhicule de service municipal. Je fais part de ma demande à m’installer pour passer la nuit. On me présente le Maire et la première adjointe, l’autorisation officielle m’est accordée. L’adjointe dont les fenêtres donnent sur l’espace pique-nique m’invite à frapper chez elle en cas de besoin.

Il y a beaucoup de vent et il fait un froid de canard. Je m’habille chaudement, et laissant Mon camarade tel quel (Les bagages rangés n’attirant pas le regard), je pars à la découverte de ce village si particulier. Trôo est un ensemble d'habitations troglodytiques construites sur plusieurs niveaux dans une falaise exposée au sud. Devant la façade unique de chaque habitation, un petit jardin est aménagé avec goût. C’est vraiment un village de Hobbits à la Tolkien. Ce serait un rêve pour bien des gens d’habiter de telles habitations. Je prends de nombreuses photos. 
 
Evidemment, la visite se finit sous la pluie au pas de course. Je reviens mettre le tarp que j’arrime à la clôture pour plus de sureté à cause du vent, puis la tente. Le vent souffle vraiment fort, si tout ne s’envole pas, les toiles et vêtements restés humides depuis 2 jours vont bien sécher.


À 19 h 30 je traverse le pont pour prendre le repas du soir à l’auberge du “Petite Trôo du Cheval Blanc”. Olivier le patron propose un menu “terroir” pour 20 € composé de produits locaux.
16 juin
16 juin
16 juin
16 juin
16 juin

Il a plu cette nuit, Il pleut encore, et les prévisions annoncent de la pluie pour toute la semaine !

J'ai donc réfléchi à une organisation différente pour l'étape :
1: avoir sous la main le tarp, même éventuellement pour la pause du midi. Il doit être la première chose à mettre en place avant de pouvoir déballer, se changer, monter la tente.
2: mettre sous emballage imperméable la chambre de la tente afin que le double-toit ne la mouille pas s'il est humide.
3: Avoir la veste sous la main pour l'étape du midi, quitte à réduire le volume du casse-croûte dans le sac.
Ainsi, je devrais pouvoir rester relativement au sec et au chaud dans les jours à venir.
Ceci n'exclut pas l'opportunité de dormir en cabane ou dans un club CK.

Après un copieux petit déjeuner au Petit Trôo, je termine le démontage et le rangement.

Nous sommes sur l’eau à 10 heures, il y a 5 seuils à remonter aujourd’hui.
     
Au premier barrage en amont de Trôo je tire Cherche-Midi sur l’herbe pendant quelques mètres et au Moulin de Papillon sur 40 m de sentier en terre battue.

Entre le second barrage et le pont de Lavardin, je remonte une longue série de rapides se terminant juste avant le pont par des courants très forts. Il me faut donner toutes mes forces pour réussir à remonter dessous.

Le village de Roches l'Evêque est à mi-parcours, je m’y arrête pour la pause méridienne et débarque à l’entrée d’un superbe lavoir à chaînes encore en état de fonctionnement ! Après m’être changé, je pique nique sur un banc dans la rue principale. À 14h30 la pluie me chasse. Je n'ai pas le courage de remettre mon haut mouillé et garde mon vêtement sec.

Le barrage de La Pointe est simple à remonter en halant le bateau. Au moulin de Bessé, c’est une chaussée classique en béton. Au moulin de La Fontaine, une brèche empierrée m’oblige à poser le tapis sur les pierres. En fin de parcours, encore des rapides envahis de renoncules. Je dois encore descendre pour haler le bateau.

À 17h25 j’arrive à hauteur du camping. La rive verticale fait environ 70 cm de hauteur. Après avoir débarqué d’une manière acrobatique je rencontre un résident qui vient m’aider. En équilibre sur une pierre, je lui passe les bagages un par un avant de remonter sur la rive et hisser le bateau presque vide.
 
La pluie qui a duré tout l’après midi s'est enfin arrêtée, il y aurait même un semblant de rayon de soleil.
Laissant Cherche-Midi, je file prendre une douche avant de revenir avec des vêtements secs et monter la tente. Je fais ensuite une lessive (en espérant qu’elle sèche cette
nuit sous le tarp.)

Une pièce est réservée pour les cyclistes et randonneurs: Table et canapé, bières, café - thé à discrétion.... J’y installe mes quartiers pour la soirée.
Gué du Loir
Gué du Loir
Moulin de Chantereine
Moulin de Chantereine
Château de Rochambeau
Château de Rochambeau
Vendôme
Vendôme
17 juin

Sébastien, le gérant du camping, vient me rendre visite. Il ne veut pas que je règle la nuitée. "Vous êtes mon invité" m'a t-il dit.

Ce matin est humide et pluvieux, la lessive d'hier est toujours mouillée et les toiles sont ruisselantes à l’intérieur comme à l’extérieur. Après avoir essoré mes vêtements je les fourre dans le sac de compartimentage et le mets dans le bidon de vêtements secs, ça séchera plus tard. J’essuie simplement la tente et le tarp à la serviette et range le tout humides dans les sacs. À dire vrai, il ne me reste plus beaucoup de textiles secs.

Un petit rayon de soleil vient d'apparaître, c’est l'opportunité d'enfiler mon haut en lycra mouillé. Finalement, ce vêtement synthétique épais que je réservais pour la pause du midi est plus chaud mouillé que l’autre plus fin.

Amarre larguée à 10h22. La température est finalement agréable une fois échauffé.

Au bas du barrage de Gué du Loir, je débarque sur un amoncellement de coquillages, bivalves et hélicoïdaux : je ne pensais pas que le Loir abritait autant de faune benthique. Cherche-Midi est remis à l’eau après avoir glissé sur l’herbe pendant 4 m.

Au moulin de Chantereine, un escalier en ciment permet de débarquer facilement, monter, puis hisser le bateau depuis le haut.

Le Château de Rochambeau est une gentilhommière typiquement XVIIIème construite par le Maréchal de Rochambeau, héros de la guerre d'Indépendance américaine. Tous les communs sont en troglodytes.

À Varennes, le bras de gauche est entièrement colonisé par les renoncules.

Vers 13h30 j’aperçois une table de pique-nique juste après le pont de Naveil. Il est l’heure de me restaurer. Le soleil perce presque et je reste vêtu de mon anorak pendant la demi-heure de pause.

Avant d’arriver à Vendôme, il reste un dernier barrage. La dalle de béton fait 6m de large. Trouvant une buche bien cylindrique dans les embâcles, je la place sous la coque et fais rouler le bateau dessus sans effort. Après l’avoir repositionné encore deux fois, Cherche-Midi est prêt à être remis à l’eau. L’idée est à renouveler dans la mesure du possible.

À 15h15 je débarque dans les remous du déversoir de Vendôme en plein centre ville. Un passant m’aide à sortir Cherche-Midi sur le quai en béton… le camping est à 200m au bout du chemin.

Je monte immédiatement le tarp et me change dessous pendant les premières gouttes de l'averse. À la fin de l’averse je pars au ravitaillement en mettant mes vêtements humides dans le sèche linge au passage : Ils seront secs à mon retour.

Stéphanie du CK Vendôme qui m’avait proposé une invitation au club le soir m’envoie un texto : elle est désolée d’annuler mais personne n'est disponible (ce qui n’est pas étonnant un lendemain de weekend). Je me console avec un menu de luxe: petit salé aux lentilles, cerises, yaourt Mamie Nova ananas-passion, plus une petite tisane et un cookie.
Lavoir de Pezou
Lavoir de Pezou
Moulin de Baigneux
Moulin de Baigneux
18 juin

La pluie m'a accompagné cette nuit jusqu'à 8h45. Après le petit déjeuner, par chance, un rayon de soleil réussit (presque) à sécher les toiles. Il n’y a que 50 m à faire jusqu’à la rive pour mettre Cherche-Midi à l’eau. À 10 h45 je commence à pagayer.

Le reflet de la surface bien calme de la rivière m’inspire… j’avais déjà remarqué que la perspective de la rivière vue du kayak séparait le champ visuel en 6 parties, trois en haut et trois en bas séparées par la ligne de surface. Le ciel ne touche jamais la surface car quand la rivière tourne, des arbres empêchent le ciel de toucher la ligne d’horizon. La forme du ciel est plutôt une parabole, encadrée par la ripisylve. Sous la ligne de surface, le reflet a exactement la même forme, inversée. Pagayant tranquillement sur le long planiol je compose dans ma tête un haïku:

Cherche-Midi trace son sillage
escorté par les agrions
sur le reflet d'une parabole
aux couleurs du ciel

Entre midi et 14 heures, après avoir remonté une série de rapides qui m’ont stoppé dans mes méditations la rivière se divise en plusieurs bras. Choisissant le passage le plus large, espérant trouver un déversoir, je me retrouve devant une sortie de cascade écumante. Des marches en ciment très raides m’invitent à débarquer pour aller reconnaître les lieux. Mon pied gauche dérape sur les sédiments recouvrant le béton et je m’affale dans le kayak, les jambes dans l'eau, le pied gauche coincé entre les escaliers et le bateau. Une fois sur la rive je constate devant la malléole interne une entaille assez profonde au défaut de la cuirasse, entre le bas du pantalon néoprène et la sandale. 
 
La mise à l’eau est elle aussi acrobatique : je dois pousser par derrière Cherche-Midi à travers les hautes herbes et les joncs pour le faire descendre jusqu'à la surface 70 cm plus bas.

Le second barrage était un piège dans lequel je suis tombé la tête la première. Peu avant d’arriver sur une chaussée en béton, je vois passer un cygne peu farouche. Je débarque, sors le tapis, hisse mon lourd compagnon, embarque d’une façon quelque peu acrobatique, remets ma jupe, démarre … et le cygne arrive nonchalamment par la brèche ouverte un peu plus loin avec un air j'en jurerais moqueur.

Au troisième seuil, en l’absence de passage, j’emprunte un bras qui contourne le moulin et m’amène en sous bois au pied d’un raidillon empierré. Après avoir hissé le bateau, je retrouve le bras principal menant au moulin.

Je m’arrête pour la pause au très beau lavoir de Pezou. La température au soleil est agréable, je pique-nique sur la pelouse.

Au barrage de Baigneux je débarque en pied de chute dans l’écume sur la seule pierre affleurante pour grimper sur le rebord du déversoir et haler le bateau. Les rapides qui font suite sont encore difficiles à remonter et je déclare forfait au milieu de l’un d’entre eux pour haler à pied.
 
Au barrage de Courcelles un escalier en bois très pentus mène sur un chemin qui rejoint la chaussée en béton: je réitère avec succès la technique du rondin.
Le camping de Fréteval initialement retenu est très mal situé loin de la rivière derrière la voie ferrée, je décide de continuer jusqu’au camping de la Morée situé 3 km En amont. J’ai l’agréable surprise de constater que le barrage de Fréteval a été détruit et je remonte sans autre portage jusqu’à la Morée où l’accès au camping est facile.

Finalement, malgré les prévisions pessimistes, il n’aura pas plu de la journée.

Une guinguette est attenante au camping. Après montage du campement je me régale d’une copieuse bavette d’aloyau accompagnée de belles frites maison. Le meilleur de la carte selon le cuisinier à qui je présente mes félicitations.

Bilan de la journée :
Les rapides et barrages devenant de plus en plus nombreux vers l’amont, il va falloir réduire la longueur des étapes pour ne pas trop allonger les journées de navigation.






Moulin de Villeprovert
Moulin de Villeprovert
Le Moulin Bleu
Le Moulin Bleu
Cabane typique des bords de Loir
Cabane typique des bords de Loir
19 juin

Il pleut, je prends mon petit déjeuner dans la salle de convivialité. La pluie est tombée cette nuit jusqu'au matin. Le ciel est gris sombre. La météo annonce des risques d’orages dans la journée... e.

Embarqué et prêt à partir à 10h30.

Barrage de Villeprovert, hissage sur arrête en béton… Barrage de Vernouillet, hissage sur embâcles. Je rencontre ensuite un rapide large et étalé qui m’oblige à haler à pied.


Au Moulin Bleu, j’avais envisagé de m’arrêter et rendre visite aux occupants des lieux qui ont fait une association “Colibri”. Ils restaurent les infrastructures et utilisent les lieux pour une agriculture bio-solidaire et l’organisation d’évènements culturels… Mais personne n’est présent. Le passage du moulin est difficile : Il m’a fallu hisser Cherche-Midi sur les pierres, les racines, le béton et le faire glisser dans l’herbe sur 25 m.

Les deux rapides qui suivent sont “remontables” à condition de mettre la gomme: ça ponctionne l’énergie du pagayeur !

Peu avant Cloyes, les rives sont occupées par des cabanes, chalets ou mobil-homes dont certains sont aménagés avec goût. Toutes ces petites résidences sont dotées d'une terrasse surplombant la rivière construites sur des poteaux de récupération.

Un long planiol mène après quelques rapides au barrage de Galloire qui n’est pas noté sur la carte IGN. Après avoir halé à pied dans le dernier rapide et tenté de remonter par trois biefs différents, je débarque en rive droite, traverse le pré et rejoins la route pour mettre Cherche-Midi sur chariot. Je retrouve un accès après avoir contourné la piste de moto-cross sur 400m.

À 16h15 je suis en bas du parc de loisirs de Cloyes. Le débarquement est problématique, rien n’est prévu pour permettre aux canoës d’embarquer ou débarquer, deux déversoirs barrent la rivière, les rives sont enrochées sur une hauteur de 1 m. Après avoir fait deux fois le tour à la recherche d’un débarcadère, je m’extirpe du bateau au pied de la rive empierrée. Pour éviter d’avoir à décharger entièrement les bagages et hisser seul le bateau vide, il me faut quérir de l’aide. Par chance, un homme assez jeune assis sur un banc accepte de me venir en aide.

Le soleil fait une apparition quand que je mange les quenelles de brochet achetées à l'accueil du camping. Alors que jour décline, un couple de canards vient me rendre visite, pas farouches du tout. Puis au crépuscule, les lapins de garenne arrivent. Par contre, eux sont très craintifs.
Halage au moulin de Vouvray
Halage au moulin de Vouvray
Saison 4 - Bassin de la Loire
20 juin

Un coup de vent a fait s'envoler le tarp cette nuit. Heureusement je suis intervenu rapidement pour replanter. Ce matin, la grisaille est encore là.

Au moulin de Montigny qui n’est pas noté sur la carte IGN, le déversoir ne peut pas être remonté en halant dans l'eau. Un long sentier en sous-bois armé de silex est aménagé pour les canoës. J’enlève les silex les plus coupants, mets des branches mortes, place le tapis sur les endroits les plus abrasifs... Malgré toutes ces précautions, Cherche-Midi a laissé un peu de gelcoat sur les silex.

Au moulin de Battereau, un simple halage dans l’eau permet de remonter un tout petit seuil.

Au Je débarque sous le très joli moulin de Courgrain et effectue une reconnaissance: il faut sortir Cherche-Midi sur la route pour contourner l’obstacle. Deux jeunes et charmantes randonneuses que la providence a amenées m'aident à porter Cherche-Midi. Je profite du lieu et d’un banc pour la Pause.

Au moulin de Vouvray, empruntant peut-être à tort un bras me paraissant moins profond pour haler dans les rapides, je remonte jusqu’à une vanne. Je halle le bateau sur une bonne distance. La sortie de l’eau est très difficile à cause du flux qui emmène la pointe du bateau. Malgré mes efforts pour redresser la situation, Cherche-Midi se coince entre deux arbres et je suis contraint de le laisser retomber à l’eau pour recommencer la manœuvre plus en aval au prix de nouveaux efforts.

À Villemore, le déversoir faiblement pentu permet un halage facile dans l’eau.

Au Verger, impossible de remonter le seuil même en mobilisant l’adrénaline. Un jardinier m’aide à porter en amont par la propriété.

À Saint Avit, un bief peu profond me permet de haler dans l’eau.

À Saint-Jean, je remonte un petit déversoir qui n’est pas mentionné sur la carte.


Enfin, à 18 heures, je débarque au niveau du camping de Châteaudun. Le petit portillon est heureusement ouvert. Le camping est devenu une aire de camping-cars gérée à distance. Je suppose que les véhicules doivent payer pour que la barrière s'ouvre. De toute façon, arrivant comme d'habitude par la porte de service donnant sur la rivière... pour moi c'est gratuit ! Il y a des sanitaires mais il faut un code pour entrer… j’attendrai que quelqu'un entre ou sorte. Choisir un endroit pour la tente n’est pas facile, les roues des camping-cars ont creusé des ornières remplies d’eau sur les emplacements dont le sol n’est pas adapté pour recevoir la masse de ces véhicules.

À peine ai-je monté le tarp qu’une averse m’interrompt. Je profite du rayon de soleil furtif qui suit pour terminer l'installation du campement, avant qu'il descende derrière les arbres.

Bulletin de Météo-France :
Demain à Châteaudun, le temps se dégradera en devenant de plus en plus instable. Les températures seront comprises entre 15 et 21 °C au cours de la journée.
La fiabilité de la situation est assez bonne

En recomptant le soir, j'ai remonté 8 seuils aujourd’hui: Ça fait beaucoup !

21 juin

Jour de repos

La pluie tombe sans interruption depuis 1 heure du matin, et s'intensifie: maintenant ce sont des hallebardes. Je suis prisonnier de ma petite tente et espère qu'elle va rester hors d'eau jusqu'à la fin de ce déluge.
Je prends mon petit déjeuner sous le tarp en regardant la pluie ruisseler. L’énorme flaque qui s’est formée à l’entrée de l’emplacement atteint les sardines de la tente. Pourvu que l’eau ne monte pas plus haut. Tant que la tente ne flotte pas, je ne bouge pas.

N’ayant rien à faire, je me recouche…
Pas pour longtemps ! Signe fatidique: quand j’appuie sur le tapis de sol, cela fait des vagues.
M’armant de courage, je me déshabille entièrement et enfile ma tenue de kayak mouillée pour intervenir.

Mettre le duvet en bidon …tout sortir sous le tarp, matelas, etc… démonter la chambre, essuyer le dessous et la mettre au sec sous le tarp … démonter double-toit et tapis de sol … remonter tapis de sol et double-toit hors d’eau un peu plus loin … éponger, essuyer le tapis de sol … rattacher la chambre … tout remettre dans la chambre.

À 10h30, ayant mis un change dans un sac étanche, je ferme la tente habillé en kayakiste, et pars faire le ravitaillement à Châteaudun. Je trouverai un petit resto ce midi.


À 13 h, je suis attablé au bistro de la place du 18 octobre devant ma tartiflette au fromage de chèvre. Pendant le repas, le soleil revient. Je passe ensuite à l’Office du tourisme, prends une carte proposant un cheminement pour la visite des endroits les plus intéressants de la ville.
Les vannes du moulin de Marboué crachent tout ce qu'elles peuvent.
Les vannes du moulin de Marboué crachent tout ce qu'elles peuvent.
Où est la rivière ?
Où est la rivière ?
Halage sur le chemin de randonnée.
Halage sur le chemin de randonnée.
22 juin

Des averses intermittentes tombent depuis 3 heures du matin.

Au réveil il pleut encore. Je mets ma literie en bidon, plie la chambre et la met en sac poubelle. Pour le double toit et le tarp, on verra lors d'une accalmie.

La pluie continue durant le petit déjeuner. Malgré tout, le linge suspendu est resté sec. L'accalmie ne vient pas, je range le tarp et le double toit mouillés.

Je quitte mon marécage à 10h45 et tracte Cherche-Midi dans les flaques jusqu’à la rive. Le Loir est beaucoup monté, prêt à sortir de son lit. Il n’est pas certain que le courant me permettre de remonter jusqu’à Bonneval.


  • Au Moulin à Tan en amont du camping, je tire Cherche-Midi dans les orties.
  • Au deuxième barrage, je tire sur un chemin en sous-bois.
  • Au troisième barrage, je hale Cherche-Midi à travers le bois inondé.
  • Au quatrième barrage, la rive boisée est entièrement sous l’eau, je hale dans les lierres avant de traverser un tallus.


Le courant devient de plus en plus fort et la remontée des rapides demande beaucoup d’énergie. Je pagaye sur les rives noyées pour économiser mes forces. Vers 14 heures, je choisis de traverser un champ inondé car le courant devient trop rapide et les contre-courants en rive font défaut. La suite devient étrange, je ne sais plus très bien où est le lit de la rivière. Je me retrouve à naviguer en forêt, les limaces se sont réfugiées sur le tronc des arbres. Il faut se rendre à l’évidence, il est impossible de continuer la remontée pour aujourd’hui.

Je regarde la carte: le sentier de grande randonnée est un canal qui mène vers Aulnaie et je décide de l’emprunter. D’abord je pagaye sur le chemin, puis je hale, puis je finis par mettre le chariot.

Alors que je regarde la carte sur le pont d'Aulnaie, une dame arrive à vélo. Elle est d'astreinte à la manœuvre des vannages du secteur. La crue pouvant largement déborder dans la vallée cette nuit, il ne faut absolument pas installer mon bivouac dans les parties basses de la vallée. Elle me propose de gagner le village du Rouvre qui se trouve en haut du méandre. Le plus haut de la crue est attendu à 3 h du matin, la décrue commencera doucement vers 9h demain. C'est à partir de 14 h demain que le Loir rentrera progressivement dans son lit.

Je m’installe donc sur la l’espace herbeux situé au centre du village. J’étale un peu partout tous les textiles trempés que le soleil de l'après-midi sèche rapidement.

Il ne me restera à remonter demain que 6 km pour arriver à Bonneval. Je prendrai la décision d’embarquer ou faire l'étape par la route en fonction du niveau d’eau en début d’après-Midi.


Le soir je compose ce poème inspiré du Bateau Ivre d’Arthur Rimbaud :

Le bateau égaré

Les eaux m'ont laissé monter où je voulais,
laissant passer brindilles, feuilles et fétus,
parfois une bille de bois, ou un morceau d’écorce,
ou une bouteille sans message.

Mais vrai, j’ai ramé fort pour propulser l’esquif
de contre en contre dans les courants furieux.

Bientôt perdu dans les débordements,
j'ai navigué dans des forêts, des champs, des prés
et des chemins qui se prenaient pour des canaux …
Moi, canotier obstiné qui jamais ne renonce,
et sur qui les Ondines veillent.


La crue à Saint-Maur
La crue à Saint-Maur
La crue à Bonneval
La crue à Bonneval
23 juin

Vers 10 heures je descends vers le Loir. Le niveau sous le pont de Meuves semble encore bien haut.

Je vois de loin les dolmens de Baignon. Ils sont perdus au milieu d’un champ cultivé, on n’a pas jugé utile de mettre en valeur ce patrimoine datant du néolithique par un aménagement touristique, un simple panneau est placé au bord de la route et c’est tout ! 5 dolmens, espacés les uns des autres, anciennement recouverts par des tumuli, cela représentait pourtant une importante nécropole. On imagine aisément que les crues du Loir au cours des millénaires ont emmené toute la couverture de ces édifices.
Il est probable également que ce lieu ait été un centre important pour nos ancêtres gaulois, les Carnutes. Ce beau méandre très fermé du Loir forme une forteresse naturelle occupée de tous temps. Il est encore occupé par les restes d'une forteresse médiévale et un château du 18ème siècle.

J'attends la décrue sur la foire à tout: Frites et Merguez au menu. Non ! Cherche-Midi n’est pas à vendre. Vers 13 heures je fais un saut à la passerelle devant l'église du village pour regarder si le niveau de la rivière permet la remontée. Un couple à vélo arrive par le chemin encore à moitié noyé. Le courant qui fuit sous la passerelle me semble très difficile à remonter en kayak, et j’aperçois en amont l’écume d’un autre rapide. Inutile de gaspiller mes forces et mon temps, je décide de faire les 6 km restants par la route.

La rue menant au port de Bonneval est encore sous l’eau et coupée à la circulation. J’arrive devant le CK Bonnevalais à 15 heures. La porte est close. Aucune réponse à mon appel téléphonique sur le portable du responsable. Une prise destinée à l’éclairage extérieur me permet cependant de recharger les batteries.

Rien à faire d’autre en cette fin d’après midi que de discuter avec les passants. En fin de journée une vingtaine de personnes arrivent sur l’aire de pique-nique avec des mobylettes des années 70, il s’agit des membres du club local qui reviennent de leur balade dominicale… J’apprends que le président du CK Bonnevalais est malade : ceci explique pourquoi le local est fermé en ce dimanche.

Après que le lieu soit déserté par les derniers promeneurs, j’installe mon bivouac sur l'espace municipal à côté du kiosque.

Ruisseau beauceron sans nom
Ruisseau beauceron sans nom
Mare de Saint-Loup
Mare de Saint-Loup
24 juin

Après un copieux ravitaillement alimentaire à la supérette, je quitte Bonneval par les petites routes traversant le plateau beauceron en tirant Cherche-Midi bien sanglé sur son chariot. Ma route passe au-dessus de la rivière encore deux fois: Au revoir le Loir !

La route suit un moment un ruisseau à qui on a ôté le statut de cours d’eau pour le considérer comme un vulgaire fossé. Je finis la journée un peu cuit par le soleil car l’ombre est rare sur ce plateau désertifié.

J’ai choisi le lavoir de Saint-Loup comme “oasis” pour cette “traversée du désert”. Demain nous franchissons la ligne de partage Atlantique/Manche.
Thivars - Embarquement sur l'Eure
Thivars - Embarquement sur l'Eure
Château Moineaux
Château Moineaux
25 juin

Cette nuit, ensemble polyphonique batracien (contralto, mezzo- soprano, soprano): j'adore ! 
Prêt à partir à 8h 50.
Pas encore trop chaud, un petit vent agréable. Cherche-Midi est mieux chargé que la veille et plus léger à tirer. La route est peu passagère et très peu de voitures me croisent.

Petite pause sur le pont de l’autoroute A11. Ma "voie du milieu" entre RN 10 et autoroute A11 passe au dessus de cette dernière, point culminant de la ligne de partage à 166m d’altitude. À partir de ce point, c'est la descente sur le bassin versant de la Seine.

À 11 heures je me change sur la rive de l'Eure à l’entrée de Thivars. La factrice arrive alors que je suis en slip en train d’enfiler mon pantalon néo. « Si vous vouliez un moment d’intimité, c’est raté ! » me dit-elle avec humour. En enfilant ma chaussettes néoprène je découvre une énorme ampoule entre deux orteils de mon pied droit. Pendant que je suis en train de la percer avec la pointe de l’opinel pour laisser échapper la lymphe, le propriétaire du moulin sort chercher son courrier. Nous bavardons, il est chirurgien vasculaire en retraite. Me voyant dans l’embarras, il va chercher un pansement chez lui. Haute qualité ! Je n’en ai pas vu de semblables en pharmacie. Il m’en donne un autre pour la suite.


L’Eure est toute petite! Pourvu que Cherche-Midi ne racle pas trop… car les fonds de rivière sont chez nous en silex : ça griffe !
À chacun des quatre moulins premiers moulins, un passage permet de tirer facilement le bateau. Les trois arbres tombés en travers me donnent plus de difficultés. Soit il faut escalader les troncs, soit se frayer un passage dans les feuillages et les épines en élaguant à l’opinel.
Il faut bien observer les hauts fonds avant de s’engager dans les rapides, à petite vitesse pour ne pas racler trop fort: la coque émet sinon un bruit déchirant me faisant mal comme si c’était un de mes membres qui souffrait. Cherche-Midi et moi faisons corps.
 
Au Château Moineaux : les propriétaires ont aménagé un passage pour les canotiers entre des barrières.
 
Vers 14 h, nous arrivons sur Moulin Brûlé, la rivière est barrée par un vannage. Le propriétaire du moulin s’est approprié les deux rives. Un panneau indique “ Canoës passez par la prairie merci”. Mais quelle prairie ? Je fais demi-tour et cherche un indice: panneau, ponton, pente herbeuse… rien!
Revenant au vannage je débarque en me disant que cette gentille personne permets peut-être de traverser sur l’herbage en face de chez elle: je scrute un passage dans la clôture, mais tout est barricadé de grillage et de barbelé. Non, la prairie doit être l’herbage que l’on voit derrière cette clôture, mais comment y aller? J’embarque et repars observer l'amont: des barbelés, des ronces, des orties … Le seul endroit permettant de passer sous les barbelés a vraisemblablement été fait par des vaches venues s’abreuver. Je fauche les orties avec la pagaie, passe sous les barbelés et tire le bateau sur des troncs déposés là intentionnellement pour bloquer le passage. Ensuite, une centaine de mètres sont à parcourir dans les herbes hautes : impossible de mettre le chariot. Je tire 10m, je souffle, je retire 10 m, je souffle, etc … et je déverse ma rancœur sur ces accapareurs qui pensent empêcher les canotiers de passer en se barricadant. Ils ne gagneront que des dégradations faites à leur clôture par des canotiers énervés. Baliser le passage serait bien plus simple !

Après un dernier arbre tombé, la suite est sans problème. Une vingtaine de bernaches nagent un moment devant moi les unes derrière les autres comme à leur habitude. J’aime bien les oies Bernaches, elles ont un beau plumage, leur comportement social est très solidaire et elles savent éviter intelligemment les conflits (avec les cygnes par exemple).


La haute Eure est agréable, si on fait abstraction des escalades dans les arbres tombés et des riverains inhospitaliers...

À proximité du camping de Chartres j’appelle l’accueil comme convenu et on me communique le code du portillon donnant sur la berge.

À 18 h 30 le bonhomme est nettoyé et le linge tourne dans le sèche-linge.

Chartres
Chartres
Moulin de Saint-Piat
Moulin de Saint-Piat
Moulin Chardon
Moulin Chardon
Aqueduc de Maintenon
Aqueduc de Maintenon
Château de Maintenon
Château de Maintenon
26 juin

Une douzaine de moulins m’attendent aujourd’hui.

En arrivant au centre de Chartres je dois débarquer avant le premier déversoir infranchissable. Les policiers municipaux qui patrouillent me conseillent de descendre en aval de l’île de la Porte Guillaume jusqu’au square Anne Franck. Les ruelles ombragées de la rive droite m’aident à supporter le pantalon néoprène.
 
La descente en aval de Chartres est vraiment agréable, pas de difficulté majeure aux passages des moulins:
  • La Prestrière : barrage composé de deux marches de 50 cm: je descend le bateau à la longe.
  • Moulin Bellanger : Je tire facilement sur berge.
  • Saint Priest: le petit seuil se saute.
  • Moulin des Roches: déversoir à sec, les vannes sont mal réglées.
  • Moulin Chardon: passage sous vanne.


À 15 h, Pause à Jouy. Une petite cale à côté du pont permet de débarquer sur l’aire de pique-nique en plein centre de la ville. L'épicerie est à 50m, petit ravitaillement chez Momo. “Chez Momo y’a tout c’qui faut !” me dit une grande fille du groupe de collégiens passant à vélo et venus s’abreuver au robinet municipal.

  • Moulin de Chartainvilliers : déversoir permettant un joli saut facile.
  • Moulin de Breuil
  • Moulin de Saint-Piat: Déversoir drossant en courbe. La pointe avant de Cherche-Midi heurte fortement de plein fouet une pierre ou un bloc en béton caché sous l’eau. Heureusement pas de dégâts sur la pointe. Par contre, je remarquerai plus tard que les rondelles en plastique placées devant les goupilles de réglage du cale-pieds ont cassé net sous le choc. Les trous des tubes se sont même ovalisés.
  • Moulin de l’Orme Hâlé: Gros déversoir infranchissable, le meunier vient me voir et m’indique le passage totalement en friche. Fauchage des orties à la pagaie, 50 m de tractage dans les hautes herbes.


Les seuils de 4 anciens moulins ont été détruits (Jouy, Soulaires, Breuil, Dionval)
 
L'arrivée sur le Château de Maintenon est réellement superbe, on passe d'abord sous l'ancien aqueduc inachevé qui devait alimenter le château de Versailles. Par contre, comme à Chartres il faut débarquer, mettre le chariot et tracter en ville à cause des déversoirs infranchissables. Il est 19 heures, laissant Cherche-Midi sur le trottoir, je dîne au restaurant. Une fois n’est pas coutume: hot-dog et frites. J'installe ensuite le Bivouac sur le parc en bordure de l'Eure équipé de tables de pique-nique en aval du centre-ville.
Vanne moulin du Roy
Vanne moulin du Roy
Moulin Boisard
Moulin Boisard
Villemeux
Villemeux
Vanne des Osmeaux
Vanne des Osmeaux
Canoë pour tous
Canoë pour tous
Dolmen de l'anthropocène
Dolmen de l'anthropocène
27 juin

Fausse alerte ! Hier j'ai dû écoper, et cru que la coque prenait l'eau. En fait, en remplissant ma casserole d'eau pour le petit déjeuner, je constate qu’une de mes poches d'eau potable est entièrement vide. Certainement mal fermée, elle s'était vidée en totalité dans la cale : C'est moins grave.

Au moulin de Saint-Val je suis contraint de tirer le bateau sur une échelle à poisson en métal heureusement couverte de mousse.

Pendant une bonne heure, en fin de matinée, je galère dans un bras obstrué par des dizaines d’arbres tombés. Me suis-je trompé de bras? Ce véritable parcours du combattant se termine par un seuil obstrué par des branches basses. Je laisse descendre Cherche-Midi en le retenant par la corde, il m'entraîne, je glisse et me retrouve au bouillon: Bonhomme trempé, bateau à moitié rempli. Un peu plus loin, un chevreuil surpris me regarde ébahi, puis me suit un moment sur la rive avant de disparaître : il était piégé sur une presqu’île étroite entre deux bras.

  • En arrivant sur Nogent, au moulin du Roy le portage est court et facile. Un passage sous une vanne avec peu de dénivelé fait suite.
  • Au moulin Foulon, trop peu d’eau pour passer le déversoir en escalier, je descends Cherche-Midi à la longe.
  • Le moulin de Boisard est une grosse propriété dotée d’une grande piscine. Sur la rive droite qui lui fait face, le passage est parsemé de troncs, de grosses pierres et de branchages disposés intentionnellement. La rive est ensuite stabilisée par un enrochement grossier et abrupt. Après avoir placé le tapis sur les arrêtes les plus vives, je fais glisser délicatement Cherche-Midi avec la corde jusqu’à l’eau en faisant bien attention de ne pas me faire entraîner. En cas de glissade et de chute, je pourrais me faire très mal.
  • Vers Chaudon, un déversoir à sec m’oblige à débarquer et placer le tapis sur le béton pour tirer.



A Villemeux il est l’heure de la Pause. Les tables de pique-nique sont à l’abri du soleil et de la pluie sous une magnifique halle. Je suis accueilli par un groupe de randonneurs qui m’offrent salade de fruits, tartes et café. Un moment très convivial.

Aux Trois Moulines j’ai l’occasion de faire rouler Cherche-Midi sur une grosse bille de bois.
En amont de Montreuil, au Moulin des Osmeaux, l’Eure s’engouffre dans l’unique vanne ouverte : déconseillé aux débutants, un passage de catégorie 3 décoiffant !

C’est le dernier obstacle de la journée, la base de Canoë pour tous se trouve peu après en rive gauche. Le site de « Canoë Pour Tous »  est extraordinaire de par son agencement et la décoration faite d’objets récupérés. Pascal Valet est un personnage doté d’un humour poétique exceptionnel! Il vient m'accueillir, nous discutons un moment, il me fait faire une visite du site.
28 juin
28 juin
28 juin
28 juin
28 juin

Le soleil me réveille avant la sonnerie du smartphone, mais il passe difficilement à travers les feuillages et la rosée du matin importante. Sur la rive, là où le soleil apparaît en premier, il y a tout ce qu’il faut : table de petit déjeuner, grande table basse pour le pliage de la tente et des arbres pour tendre le fil à linge… Je déplace donc tout mon matériel, l’étale et prépare le petit déjeuner pendant que toiles et vêtements sèchent.
 
Le début de la descente est agrémenté de petits rapides jusqu‘au moulin de Marcilly. Le portage est bien indiqué.
Un peu plus loin, un second barrage m’oblige à tirer sur un rebord en béton.

À Croth, une grosse papeterie désaffectée barre toute l’Eure. C’est un barrage très important, de par sa largeur et la dénivellation entre le plan d’eau amont et la rivière aval. Malgré une reconnaissance appliquée, rien ne permet de débarquer ni en rive droite ni en rive gauche. Un déversoir peu visible en rive gauche laisse passer un mince filet d'eau dans un bras ne permettant même pas de haler un bateau vide. La carte IGN n’indique aucune route ou chemin permettent de contourner. La seule issue consiste à débarquer là où me l’a indiqué Pascal, dans la cour d'une entreprise. Je vais et vient dans la cour. La grille permettant de traverser la passerelle est fermée. Je longe la rive du bras principal vers l’aval sans découvrir le moindre accès à l’eau. Un homme arrive et m’invective, fort mécontent de mon intrusion : Ils en ont assez des groupes de canoës qui s’installent sans gène dans la cour en laissant leurs déchets. Une seconde personne arrive, sans doute le patron, et me répète le même discours. Il me faudra énormément de diplomatie pour que finalement on accepte de m'ouvrir la grille. On m’indique même le chemin pour la remise à l’eau. Après avoir traversé la cour de l’usine et traversé la route, je me trouve sur une petite place. Un escalier en rondin très raide mène à l’eau. Je fais glisser le bateau en le retenant avec la longe. Le passage du barrage a nécessité une bonne heure. Il faudra que j’informe le comité départemental FFCK du problème.

Je m’arrête sur l’aire de jeux d’Ezy-sur-Eure et pique-nique entouré de la jeunesse locale.

À 15h40 je débarque directement dans le camping d’Ivry la Bataille. Après être passé à l’accueil et déposé Cherche-Midi sur l’emplacement, je pars faire un tour en ville pour un dernier ravitaillement en produits frais: plus que deux jours avant la fin du périple.

Soirée au snack : pizza et rechargement des batteries.
Château de la Folletière
Château de la Folletière
Déversoir de Chambines
Déversoir de Chambines
Pacy-sur-Eure
Pacy-sur-Eure
Cocherel
Cocherel
Arrivée à Jouy-sur-Eure
Arrivée à Jouy-sur-Eure
29 juin

31 km et 4 barrages au programme pour cette dernière journée sur l'Eure. Le ciel est couvert, des pluies sont annoncées pour l’après midi. Je ressors l'anorak.

Pic d’adrénaline dès le matin au barrage d’Ivry la bataille au centre ville. Il s’agit d’un passage de vanne derrière une passerelle basse avec un courant de travers. J'ai heurté le tablier de la passerelle avec la pagaie et n'ai pas pu faire un appel correct derrière pour mettre en ligne le bateau. Ce qui est à redouter dans une telle situation est que le bateau soit poussé contre la glissière de la vanne par le courant et se retourne. Le courant mène ensuite tout droit sur la pile du pont. Heureusement, tout s’est bien passé, Cherche-Midi n’a rien heurté. Mais rétrospectivement, imaginant ce qui aurait pu se passer en cas de dessalage, cela m’a un peu refroidi. Je navigue sans casque et mon crâne serait bien vulnérable en cas de dessalage dans un rapide peu profond dont le fond est en silex. Je vais faire preuve de plus de prudence, il serait dommage d’avoir un accident le dernier jour de descente.

À Garennes-sur-Eure, le déversoir est marqué d’un gros sens interdit. Un peu plus loin vers le moulin une signalisation invite à débarquer et effectuer un portage. Je fauche les orties à la pagaie pour débarquer (On voit que la saison de location estivale n’est pas encore organisée). Une reconnaissance sur la passerelle montre que le déversoir d’une hauteur de 1m ne comporte pas de rebord agressif. Un rappel non négligeable est bien visible au milieu, mais beaucoup plus faible à droite. Il faut donc s’engager en serrant bien à droite. Pas de danger pour quelqu’un d’expérimenté mais on comprend que les loueurs de canoës ne peuvent pas prendre le risque d’y noyer des clients.

Au Moulin de Merey un panneau indique “Passage interdit propriété privée défense d’entrer”… Remontant un peu, je prends une petite passe en rive droite suivie d’un gentil déversoir et pense être tiré affaire. Que nenni ! Un bief tout petit, m’oblige à descendre à pied pour passer une chicane, puis je me retrouve dans un imbroglio de branchages où je n’ai pas pied: obligé de nager à côté de Cherche-Midi. Un rat musqué occupé sur la rive à grignoter des herbes ne détecte ma présence que lorsqu'il est à portée de pagaie. Heureusement, le passage est court et la rivière est ensuite dégagée avec un haut fond permettant d’embarquer. J’aurais dû enfreindre l’injonction du passage interdit !

Ensuite l’Eure offre de beaux enchaînement de rapides …

À Chambines, le vannage est infranchissable. Un panneau indique aux canotiers de passage de ne pas laisser de déchets. Je ne sais pas qui (canotiers ? Pêcheurs ? jeunes de passage ?), mais effectivement, l’endroit est parsemé de restants de pique nique. J’ai rassemblé en un tas bouteilles en plastique et emballages alimentaires divers.

Passant sous le viaduc de l’autoroute A13 je sais que Pacy-sur-Eure n’est pas loin... L'orage gronde ! Je me réfugie pour la pause pique-nique sous un lavoir. Une petite belette habite dans un trou du mur derrière le lierre. Elle se montre de temps en temps, se rapproche puis repart se cacher. Difficile à prendre en photo.
Une heure plus tard, ayant consulté la météo locale je décide de repartir car la pluie devrait s’arrêter bientôt.

La passe à canoës de Pacy-sur-Eure est parfaite!

Ensuite, l’Eure offre à Cherche-Midi des enchaînements de rapides agréables. De superbes propriétés bordent la rivière. Il pleut toujours quand je passe le pont de Cocherel.

Arrivée à 16 h sur l’aire de pique-nique de Jouy-sur-Eure. Cette aire a été conçue comme halte pour les canoës et une superbe cale bétonnée hémisphérique a été construite pour ranger les bateaux en éventail.
Dernière liaison terrestre Eure / Iton
Dernière liaison terrestre Eure / Iton
Embarquement sur l'Iton
Embarquement sur l'Iton
Débarquement final en amont d'Évreux
Débarquement final en amont d'Évreux
30 juin

Ce dimanche est annoncé ensoleillé sur Évreux.

Eric et Marc, des amis spéléologues de longue date, sont venus me rejoindre avec les viennoiseries et le café. Ils vont accompagner Cherche-Midi pour la liaison terrestre entre L’Eure et l’Iton. Pour expliquer le portage, le cours de l’Iton entre Evreux et la confluence de l’Eure fait 24 km pour un dénivelé de 40 m et une dizaine de moulins jalonnent le parcours. Cette partie de rivière ne peut pas être remontée pour les deux raisons principales suivantes: Les moulins sont des propriétés privées sur lesquelles débarquer n'est pas permis, on rejoint difficilement une route ou un chemin pour les contourner.

C’est parti pour 15 km de marche ! C’est bien d’avoir des porteurs. Nous-nous relayons pour tracter Cherche-Midi. Sur le plateau, nous suivons un moment une vallée sèche avec ce qui ressemble à une bétoire (dépression où l'eau s'infiltre) : nous projetons déjà une journée de prospection dans la zone à la recherche d’indices sur le ruisseau souterrain.
 
Nous nous arrêtons pour le pique-nique au village du Buisson-Isabelle avant d’attaquer la descente sur Gravigny.

15 h 26 mise à l’eau sur l'Iton à Gravigny. La dernière remontée à contre-courant fait 5,1 km. Cela peut paraître peu, mais le courant est assez fort et il faut une dernière fois donner du muscle. Quelques rapides ne permettent même pas de pagayer par manque de fond et il faut haler à pied.

Au moulin d’Harrouard, un dernier seuil m'oblige à tirer Cherche-Midi sur l'herbe … je  débarque quelques minutes après rue des Domaines. Il ne reste plus qu’à remonter à Saint Sébastien sur la bordure du plateau 60 m au dessus.

À 18 h 30 en ce dernier jour du mois de juin 2024, Cherche-Midi est de retour trois ans après en être parti de chez lui le 5 juillet 2021. Il a navigué 3000 km en 125 jours, ce qui fait une moyenne de 24 km par jour.
Impressions générales saison 4 :

Le mois de Juin 2024 a été pluvieux et frais. Les précipitations ont été bénéfiques pour la première partie, descente jusqu’à Angers. La météo s’est heureusement améliorée pendant une douzaine de jours pour la remontée du Loir, les précipitations n’ayant généré une crue que pour le dernier jour.
  • Cherche-Midi a bien aimé la descente de la Vonne, du Clain, de la Vienne et de l’Eure. Il aurait souhaité faire une plus longue descente sur la Loire.
  • Le pagayeur a découvert des vallées jalonnées de villes fortifiées et de châteaux. Il a été surpris par le nombre d’habitations troglodytiques aménagées dans les coteaux de la Vienne et du Loir. Les deux semaines de remontée du Loir ont bien entendu été une épreuve physique, mais cette vallée recèle malgré cela un charme unique en dehors des foules et de la modernité.


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