Allonz-à-l'aventure
Randonnée à pied, canoë et bivouac en famille
Bonjour à tous,
Voilà un événement que je voulais vous raconter. Une rencontre et ses conséquences qui m'ont fait réfléchir, et m'ont laissée pensive sur le statut très particulier de l'homme dans la nature.
A l'été 2004, après avoir pagayé "moultement", sur les rivières polonaises de Mazurie, ma famille et moi, nous étions accordés quelques jours de repos dans le parc national de la Briebza. Nous voilà donc, un jour, partis de bon matin, pour une petite randonnée à la journée, dans le marais rouge (Czerwone Bagno), avec l'espoir d'apercevoir des élans.
Après plusieurs heures de marche, et sans avoir croisé âme qui vive, je marche en tête lorsque nous arrivons dans une clairrière. Chhhhhut, je fais signe aux autres de se taire et de se déplacer lentement : là, dans la clairrière à une vingtaine de mètres, à la limite des arbres : 2 chevreuils qui ne nous ont pas vus.
En quelques fractions de secondes et malgré nos précautions, ils s'aperçoivent néanmoins de notre présence. Un coup d'oeil dans notre direction et c'en sera bientôt fini du plaisir de les regarder. Ils vont détaler dans le bois. Mais non, contre toute attente, après un bref coup d'oeil dans notre direction, ils esquissent d'abord un bond pour détaler dans le sous-bois, puis reviennent dans la clairrière. S'en suivent une succession de bonds désordonnés à l'entrée de la clairière, sous nos yeux ravis de ce spectacle de quelques secondes qui semble durer une éternité. Puis, nos 2 chevreuils prennent finalement la décision de fuir dans les bois.
S'en suivent des grognements et hurlements atroces : ceux d'un prédateur attrappant sa proie dans ses crocs, et s'acharnant dessus pour la déchiqueter. Très peu de doutes possibles : l'un des 2 chevreuils se sera fait dévorer par un loup, à quelques pas de nous, dans la forêt sombre qui a dissimulé la scène à nos regards.
Nous avons froid dans le dos, à l'idée d'être passés si près d'un loup affamé. Mais sitôt cette frayeur et apréhension passés (car les loups ne s'attaquent pas à l'homme, c'est bien connu, n'empêche pas fiers dans une situation comme celle-là), ce sont d'autres sentiments qui m'animent.
Je ne saurai leur mettre un nom : un zeste de culpabilité, et quelque chose d'indéfinissable, comme une sorte de grand respect envers cette terre qui nous porte, nous abrite, et nous soumet à ses lois primaires parfois difficiles, en face desquelles nous ne pouvons que nous incliner, tout civilisés et évolués que nous soyons.
Souvent, je repense à ces 2 chevreuils. Ils étaient traqués par le loup. Voilà pourquoi, ils ne voulaient pas retourner dans le bois, ce qui nous a offert le plaisir de les contempler plus longtemps. Pourtant, ils auraient pu échapper à leur prédateur, en traversant la clairrière. Oui, mais l'homme, cet étrange animal vertical, dressé sur ses 2 jambes était là. L'homme, cet animal si inconnu, si terrifiant, qu'ils lui ont préféré la gueule du loup.
Catherine
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Voilà un événement que je voulais vous raconter. Une rencontre et ses conséquences qui m'ont fait réfléchir, et m'ont laissée pensive sur le statut très particulier de l'homme dans la nature.
A l'été 2004, après avoir pagayé "moultement", sur les rivières polonaises de Mazurie, ma famille et moi, nous étions accordés quelques jours de repos dans le parc national de la Briebza. Nous voilà donc, un jour, partis de bon matin, pour une petite randonnée à la journée, dans le marais rouge (Czerwone Bagno), avec l'espoir d'apercevoir des élans.
Après plusieurs heures de marche, et sans avoir croisé âme qui vive, je marche en tête lorsque nous arrivons dans une clairrière. Chhhhhut, je fais signe aux autres de se taire et de se déplacer lentement : là, dans la clairrière à une vingtaine de mètres, à la limite des arbres : 2 chevreuils qui ne nous ont pas vus.
En quelques fractions de secondes et malgré nos précautions, ils s'aperçoivent néanmoins de notre présence. Un coup d'oeil dans notre direction et c'en sera bientôt fini du plaisir de les regarder. Ils vont détaler dans le bois. Mais non, contre toute attente, après un bref coup d'oeil dans notre direction, ils esquissent d'abord un bond pour détaler dans le sous-bois, puis reviennent dans la clairrière. S'en suivent une succession de bonds désordonnés à l'entrée de la clairière, sous nos yeux ravis de ce spectacle de quelques secondes qui semble durer une éternité. Puis, nos 2 chevreuils prennent finalement la décision de fuir dans les bois.
S'en suivent des grognements et hurlements atroces : ceux d'un prédateur attrappant sa proie dans ses crocs, et s'acharnant dessus pour la déchiqueter. Très peu de doutes possibles : l'un des 2 chevreuils se sera fait dévorer par un loup, à quelques pas de nous, dans la forêt sombre qui a dissimulé la scène à nos regards.
Nous avons froid dans le dos, à l'idée d'être passés si près d'un loup affamé. Mais sitôt cette frayeur et apréhension passés (car les loups ne s'attaquent pas à l'homme, c'est bien connu, n'empêche pas fiers dans une situation comme celle-là), ce sont d'autres sentiments qui m'animent.
Je ne saurai leur mettre un nom : un zeste de culpabilité, et quelque chose d'indéfinissable, comme une sorte de grand respect envers cette terre qui nous porte, nous abrite, et nous soumet à ses lois primaires parfois difficiles, en face desquelles nous ne pouvons que nous incliner, tout civilisés et évolués que nous soyons.
Souvent, je repense à ces 2 chevreuils. Ils étaient traqués par le loup. Voilà pourquoi, ils ne voulaient pas retourner dans le bois, ce qui nous a offert le plaisir de les contempler plus longtemps. Pourtant, ils auraient pu échapper à leur prédateur, en traversant la clairrière. Oui, mais l'homme, cet étrange animal vertical, dressé sur ses 2 jambes était là. L'homme, cet animal si inconnu, si terrifiant, qu'ils lui ont préféré la gueule du loup.
Catherine
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