A vélo en famille dans le Dahar tunisien

Nous arrivons à Matmata de nuit et nous nous installons dans un petit hôtel troglodyte. Les chambres, creusées dans la roche, sont simples et rustiques, mais elles offrent une expérience unique. L’ensemble du lieu est fascinant : plusieurs petites cours creusées dans la pierre sont reliées entre elles par des couloirs souterrains. L’architecture est surprenante et témoigne du mode de vie traditionnel de la région.

L’endroit a un charme particulier. Après cette longue route, nous apprécions le repos dans ce cadre insolite avant de poursuivre notre voyage.

C’est le jour du départ. Nous commençons la journée par une visite de la charmante petite ville de Matmata, avec ses habitations troglodytes et son ambiance paisible. Après cette découverte, nous entamons l’ascension vers le plateau. La route est grimpe mais offre dès les premiers kilomètres des panoramas spectaculaires.

Le dépaysement est immédiat : nous croisons de petites mosquées blanches disséminées dans le paysage, des habitants se déplaçant à dos d’âne, et des tenues traditionnelles aux couleurs éclatantes qui contrastent avec les teintes ocres du désert. Chaque virage dévoile un nouveau décor saisissant, et l’atmosphère authentique de la région nous plonge déjà au cœur du voyage. Tout laisse présager une aventure exceptionnelle !

Partis avec l’idée de trouver de quoi déjeuner en chemin, nous demandons notre route aux habitants et finissons par tomber sur une petite épicerie tenue par une famille locale dans leur cuisine. L’accueil est chaleureux, et on nous offre un thé berbère qui nous redonne un coup de boost avant de reprendre la route.

Mais notre progression va être brutalement interrompue par un problème mécanique : un mauvais réglage du vélo entraîne le dérailleur dans les rayons, le tordant immédiatement et rendant la réparation impossible sur place. L’attente est longue avant de trouver une solution, mais après quelques heures, nous parvenons à récupérer un vélo de substitution.

Le retard accumulé est conséquent. Nous devons pédaler tout l’après-midi sur des pistes cassantes et éprouvantes, où chaque montée et chaque portion accidentée testent notre endurance. Lorsque la nuit tombe, nous sommes encore à une vingtaine de kilomètres de notre destination, progressant dans l’obscurité avec la fatigue qui commence à peser. L’étape, qui devait être relativement tranquille, se transforme en véritable défi… !

Heureusement, alors que le moral commence à être en berne, le sens de l'accueil et du partage tunisien nous permet de rejoindre le petit village de Toujane, embarqués sur le plateau d'une petite camionnette. Cette journée prend une autre tournure, et tout le monde se réjouit de ce mode de transport imprévu ! L'arrivée à Toujane de nuit est magique, et la chambre troglodyte dans laquelle nous logeons ce soir chez une famille berbère est charmante.

Nous partons de bon matin pour une grosse et éprouvante journée, près de 50 km de pistes et 800m de dénivelés, ce qui reste beaucoup pour les petits mollets de la famille, même habitués à ce type de voyage ! La descente dans la plaine de Beni Kedache est magnifique, et la vue sur les contreforts du Dahar ne cesse de nous émerveiller ! Ces falaises de 300 à 500m de hauteur sont impressionnantes, et la géologie des lieux nous offre un panorama saisissant.

Alors que nous espérions la plaine...plate, il s'avère qu'elle est beaucoup plus bosselée que prévu ! Les passages par les petits villages sont bien sympathiques et nous permettent de prendre la température de la vie locale, ce justement pourquoi nous aimons ce type de voyage !

Nous avançons vers notre premier objectif : Ksar Hallouf, ces impressionnants greniers fortifiés où les Berbères mettaient autrefois leurs récoltes à l’abri des pillages. L’ensemble, constitué de petites ghorfas – des pièces voûtées de quelques mètres carrés –, est remarquablement bien conservé et dégage un charme indéniable. Par chance, un guide est présent pour nous faire découvrir chaque recoin du site. Il connaît visiblement le ksar comme sa poche et nous partage anecdotes et détails qui rendent la visite encore plus captivante.

Après cette plongée dans l’histoire, place à un déjeuner idyllique dans une oasis en contrebas. Imaginez un décor parfait : palmiers, eau fraîche, et un repas bien mérité après l’effort. On en oublierait presque qu’il reste encore une belle montée au programme…!

L’après-midi, nous attaquons le col qui doit nous mener jusqu’au petit village de Zammour, où nous passerons la nuit. L’ascension est plutôt rude, et à mesure que la pente se durcit, nous commençons à regretter notre copieux déjeuner ! Mais entre quelques pauses stratégiques pour "admirer le paysage" (comprendre : reprendre notre souffle discrètement), nous finissons par progresser vers notre destination.

À Zammour, nous sommes chaleureusement accueillis par Ayoub Zammouri, dont la famille vit ici depuis des générations – et dont le nom laisse peu de doute sur ses racines locales. Avec une vraie volonté de faire découvrir sa région, il a aménagé deux chambres dans sa maison pour accueillir les voyageurs de passage, dans une démarche de tourisme équitable.

Dès notre arrivée, nous nous sentons en famille. Autour d’un bon repas, nous échangeons avec lui sur la politique et l’histoire tunisienne, des sujets qu’il maîtrise avec passion. Son sourire communicatif et sa joie de vivre nous impressionnent autant que sa cuisine nous régale. Chaque plat est une découverte, et nos papilles lui en sont reconnaissantes !

Un moment vraiment sympathique qui nous donne presque envie de prolonger l’étape.

Départ matinal pour Ghoomrassen, en passant par le Ksar de Zammour. Ce Ksar est bien haut perché mais nous régale de sa vue magique sur les plaines alentour. Nous en profitons pour escalader le Kef Mzenzen, pic rocheux de la région qui culmine à 696m. La vue à 360° y est époustouflante et vient récompenser nos efforts. Tout comme la petite piste qui serpente sur la crête pour nous ramener jusque dans la plaine.

Quelques kilomètres plus loin, après avoir franchi deux petits (mais costauds) cols, nous arrivons au Ksar Hadada. Ce ksar bien conservé a fait parler de lui à la fin des années 1990, lorsqu’il a servi de décor pour l’un des épisodes de Star Wars. À l’époque, les producteurs ont choisi ce site unique pour sa ressemblance avec les habitations des Tatooiniens. Aujourd’hui, le ksar a été rénové et permet de se faire une idée assez précise de ce à quoi ressemblait une telle fortification il y a des siècles. C’est un véritable voyage dans le temps, tout en gardant l'empreinte de la modernité.

Mais au-delà de l’aspect historique et cinématographique, c’est un autre délice qui nous attend. Nous faisons une pause bien méritée pour goûter les cornes de gazelle locales, confectionnées par le meilleur producteur de toute la région. La forte affluence de locaux, dès l’ouverture du lieu, ne trompe pas : c’est ici que se trouve l’un des incontournables du Dahar, un véritable secret bien gardé qui ne figure pas dans les guides touristiques ! Et franchement, ces petites confiseries fondantes sont un régal. C’est peut-être même la meilleure récompense de notre passage ici !

Nous atteignons enfin notre étape du soir : la petite ville de Ghoomrassen. Cette ville paisible nous accueille une fois de plus dans une habitation troglodyte, simple mais pleine de charme. Le logement est un petit deux-pièces creusé dans la roche, rustique, avec ses sanitaires et sa douche installés à l’extérieur.
Après nous être installés, nous décidons d’explorer les falaises voisines. L’ascension n’est pas difficile, mais la vue depuis le sommet est absolument splendide : des paysages à couper le souffle, avec un panorama sur la ville et les plaines environnantes. Et pour couronner le tout, le soleil commence à se coucher, offrant un spectacle de couleurs chaudes qui vient parfaire ce moment. Nous restons là quelques instants, à profiter de cette vue incroyable et de la sérénité du lieu, avant de redescendre et savourer le reste de la soirée.

Partis pour Guermessa, nous laissons les vélos derrière le cimetière avant de commencer l’ascension vers cet ancien village perché à flanc de falaise. Fondé au XIIe siècle, Guermessa a été fortifié pour se protéger des incursions arabes, comme de nombreux autres villages berbères de la région. La particularité de ce site réside dans ses greniers fortifiés, aménagés au-dessus d'une colonie troglodyte, une architecture ingénieuse qui témoignait à la fois de la vie quotidienne et de la nécessité de se défendre.

Le panorama qui s’étend devant nous est tout simplement incroyable. À 360°, la vue plonge sur la vallée et les montagnes environnantes, offrant un cadre à la fois serein et impressionnant. Nous nous laissons guider à travers les petites ruelles de la cité, où l’on devine encore l’agitation d’autrefois.

Nous poursuivons notre chemin vers Chenini, petit village jumeau de Guermessa mais dans lequel subsistent de nombreuses habitations. Comme à Guermessa, la petite mosquée d'un blanc éclatant au milieu de ce village de pierre nous séduit au premier coup d'oeil. Tout comme depuis le début de cette échappée, il n'y a pas un touriste à l'horizon, et nous sommes seuls à déambuler sur ce site magique. Nous passons ensuite une bonne nuit de repos dans une petite chambre d'hôtes troglodyte qui ne manque pas de charme avec ses lits creusés dans le roc et sa vue impressionnante.

Au bilan :

- près de 150 km de routes et de pistes parfois bien rocailleuses 
- de belles rencontres et de belles discussions tout au long de notre route
- de charmants panoramas et villages perchés
- une seule casse vélo
- d'innombrables montées parois bien ardues !
- beaucoup de couscous et de thés à la menthe

Une virée bien rafraichissante et dépaysante, un bon bol d'air et de soleil au coeur d'un hiver froid et terne !
A recommander à 100% !