GR20 sud - la Corse en solo

Comme une tortue dans l'eau.
Je me réveille avant l’aube dans une petite tente que je squatte par esprit de vengeance. Dissimulée derrière un rocher elle donne vue sur la vallée dans laquelle je m’apprête à m’enfoncer. Je m’accroupis sur le rocher et sors mon harmonica. Improvise une mélodie pour réveiller la contrée.

Ce sera le plus beau lever de soleil de la randonnée, une orange rouge qui émerge d’une mer de nuée. J’avance comme on flotterait au-dessus du monde. Je suis dans un état second. Les arbres se détachent, d’un vert profond, comme le vivant est beau ! 
J’ai aussi la gueule de bois.

Je fais cette observation logique : Si je pars à l'aube, le premier marcheur venant dans l'autre sens que je croiserai sera à la moitié de l'étape, lui aussi étant parti aux premières lueurs. C'est approximatif, mais cela s'est vérifié à chaque étape.

J’essaye de ralentir au maximum ma progression, d’apprécier chaque parcelle du chemin, chaque relief avec ses jeux de lumière. Tout semble un cadeau, mais la récompense la plus totale prend la forme de bassins sur plusieurs étages qui attendent le marcheur environ deux heures avant la fin du parcours. A croire que ce GR a été conçu pour cette baignade finale. Je cuve la myrte à l’ombre après le bain, tandis que mes compagnons se rassemblent un à un, émerveillés par le plan d’eau salutaire.

Le reste ne se partage pas. 
Ce sera à toi,
À toi d’endosser ton fardeau et de poser un premier pied sur ce grand chemin,
À toi d’ouvrir grand les yeux et de fermer la bouche, pour te laisser toucher par tant de beauté.

La fin du récit m’appartient.
Va, écris le tiens.