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Eté 2022 : Seatrekking à Ouessant (BZH)

(réalisé)
Nage en eau libre itinérante sur 3 jours autour de l'île d'Ouessant
(30 min de lecture)

La nage en eau libre et l’apnée de compétition sont des sports. Le seatrekking est leur incarnation et leur fusion spirituelle qui procure une expérience immersive dans l’écosystème marin et qui nous amène à reconsidérer l’échelle du temps et des éléments.

"L'océan est notre campement.
Nous sommes faits de l'étoffe dont sont tissés les vents et les courants"
(A. Damasio)
nage / randonnée/trek randonnée aquatique apnée
Durée : 3 jours
Distance globale : 31.6km
Dénivelées : +154m / -203m
Alti min/max : -78m/54m
Carnet publié par Barbenoire le 08 sept. 2022
modifié le 30 mars 2023
1373 lecteur(s) -
Vue d'ensemble

Le topo : Jour 2 (mise à jour : 14 oct. 2022)

Distance section : 12.4km
Dénivelées section : +85m / -126m
Section Alti min/max : -78m/35m

Description :

Deuxième jour du seatrek :    Penn ar Roc'h  --> Porz Goret --> Ilôt Youc'h Korz --> Pointe de Pern --> Phare du Créac'h --> Yuzin
Conditions météorologiques (résumé) : Ensoleillé + bonne brise (34 km/h) matin et après-midi + pas de houle + courants
Vent : Nord-Est, 18 nœuds, force force 5 sur l'échelle de beaufort
Houle : Nord-Ouest, période 9s et hauteur 0,5m
Température de l'air : 20°C
Température de l'eau : 14°C 

Marées : basses-eaux, coefficient 48 / 52

Milieu traversé :

Environnement : [grotte, falaise, île, côte, mer] Biotope : [marin, minéral]

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Le compte-rendu : Jour 2 (mise à jour : 14 oct. 2022)

Jour 2
07h00 : Réveil humide

Le gazouillis des oiseaux du bord de mer clôture notre nuit et laisse progressivement place au cri des goélands. Le jour se lève lentement mais nous restons à l’abri dans nos duvets, tels des larves dans leur cocon. L'humidité déposée sur notre visage par la caresse de la nuit achève de rincer la fine pellicule de sel de la veille. 

Le ciel, la mer et la terre se séparent progressivement. C'est magnifique.
Les premiers traits d’humour fusent quant au déroulé de la nuit de chacun. Le petit déjeuner est pris rapidement et les affaires rangées avec soin au fond des sacs. 

Au programme aujourd'hui : 
  • randonnée à pied jusqu'à Porz Doun (la pointe sud-ouest de l'île),
  • traversé de la baie de Lampaul à la nage via Youc'h Korz,
  • passage de la pointe de Pern (si les conditions en mer le permettent),
  • détente au pied du patron de l'île : le phare du Créac'h.
  • bivouac hors sentier sur la côte nord.

Premières vision du réveil
Premières vision du réveil
Petite ruine le long du sentier côtier qui mène vers la pointe de Porz Doun.
Petite ruine le long du sentier côtier qui mène vers la pointe de Porz Doun.
09h00 : La côte "méridionale"

La morphologie douce de la côte sud contraste avec le nord déchiqueté de l’île . Nos pieds foulent des gazons doux et glissants, mêlés de touffes de fougères, encadrés de petits murs dont la pierre argentée de mica brille au soleil. Une brise légère apporte à nos narines un parfum délicat venu de la terre, mélange de ronce, d’ajonc et de bruyère.

Tout semble plus fragile ici. La mer, poussée par le Fromveur* à proximité, creuse des failles profondes où s’accumulent les débris du large refoulés par les flots. Autour des criques riches en algues arrachées du continent, l’eau retrouve la même transparence lumineuse que celle d’Arlan, le point de départ de notre aventure.

Nous passons les pointes de Porz an Ejen (« port du bœuf »), de Roc’h Hir (« rocher long ») puis arrivons en vue de Porz Doun (« port profond »). Nous sommes allongés dans les herbes molles et rebondissantes du bout de la pointe et observons la mer.

Se dresse fièrement au-dessus de l'eau devant nous, le phare de la Jument. Ce dernier est devenu mondialement célèbre grâce aux clichés spectaculaires du photographe Jean Guichard durant l'hiver 1989, montrant le phare dans la tempête balayé par une vague déferlante alors que son gardien se tient sur le pas de la porte.

* Fromveur : fort courant marin (cf. Jour 1)
Griffes de sorcière (espèce invasive importée d'Afrique du sud début XXe)
Griffes de sorcière (espèce invasive importée d'Afrique du sud début XXe)
Pyramide du Runiou : amer servant à la navigation maritime par des alignements avec d'autres éléments du paysage.
Pyramide du Runiou : amer servant à la navigation maritime par des alignements avec d'autres éléments du paysage.
Le phare de La Jument au loin en mer
Le phare de La Jument au loin en mer
et le Créac'h aux couleurs du drapeau breton. (source : Watch The Sea)
et le Créac'h aux couleurs du drapeau breton. (source : Watch The Sea)
10h00 : Les Cyclopes de Porz Goret

Un rayon de soleil illumine la côte et dévoile une lande coiffant l’arrondi presque féminin de la baie de Porz Goret ("port de barrage"). L’odeur des bouquets de bruyère réveille en nous des souvenirs d’enfance et rappelle notre âme à la raison. Il est temps de se remettre en route.

Nous sommes rejoint par Ronan, un seatrekker des premières heures, en provenance directe des vapeurs enchanteresses du festival du bout du monde de Crozon. Nous ne nous sommes pas vus depuis de notre dernier trek au Cap Sizun en 2021. Les retrouvailles sont chaleureuses et le plaisir de nager à nouveau ensemble dans un nouvel endroit nous rend fébriles. 

Devant nous se tient un champ de masses rocheuses, lourdes et gluantes de varech qui n’ont pu être accumulées ici que par les Cyclopes à marée basse. Le rocher de Youc'h Korz ("Roche massive aux roseaux") est singulièrement planté là au beau milieu de la baie de Lampaul. 

La légende raconte que Saint Gildas et Saint Guénolé se disputaient la partie nord et la partie sud de l’île en se lançant des cailloux. L’un des deux, excédé sans doute par la situation, en aurait lancé un plus gros que les autres. Ainsi naquit l’îlot qui symbolise la frontière nord-sud d’Ouessant.
Ronan nous a rejoint au matin du jour 2.
Ronan nous a rejoint au matin du jour 2.
Dernières vérifications avant la traversée et constitution des binômes / groupes de nage.
Dernières vérifications avant la traversée et constitution des binômes / groupes de nage.
La horde se met en route.
La horde se met en route.
Nous formons à nous huit un groupe soudé, une seule et même entité.
Nous formons à nous huit un groupe soudé, une seule et même entité.
10h15 : Le rituel

Chaque mise à l’eau est un rituel propre à chacun. Je vous livre le mien.

Je saisis ma combinaison pour l’enfiler. « C'est toujours les mêmes gestes. D'abord la jambe gauche. Toujours. Puis la jambe droite. » ;). Un grognement viscéral s’échappe de ma gorge au contact froid du néoprène encore mouillé de la veille sur ma peau. Viennent ensuite les jambes, les bras puis la tête. J’ajuste le tout en défaisant les plis rebelles et claque les bords de ma cagoule sur les joues. Je sens immédiatement la chaleur corporelle reprendre le dessus. 

J’avance à petits pas dans l’eau, les palmes coincées sous le bras. Elle est encore bien fraîche, pas plus de 15 ou 16°C d’après mes genoux. Je ne suis plus de ceux qui brûlent les étapes ou qui se jettent à l’eau en criant banzaï pour oublier la morsure du froid. Ce temps-là est révolu. 

L’eau remonte lentement le long du néoprène puis arrive au niveau des cuisses, des hanches. Pause. Ayant enfilé la combinaison et mon top cagoule depuis plusieurs minutes, mon cerveau peine à traiter les informations contradictoires. Le buste est en surchauffe et les jambes sont congelées. J’inspire. 

J’étale avec mes doigts un échantillon de salive adroitement déposé à l’intérieur de mon masque puis le rince plusieurs fois dans l’eau de mer avant de l’enfiler. Ceci afin de retarder l'apparition de buée sur la vitre.

Mes paumes de mains à moitié immergées chatouillent la surface de l’eau et dessinent des figures géométriques imaginaires. J’expire. Un frisson grimpe le long de mon dos et se termine en un spasme frémissant de la nuque. Prochaine étape, le nombril, les épaules puis la disparition sous les flots. 

Je frissonne mais ce n’est pas un tremblement involontaire pour réchauffer le corps. C’est une onde de plaisir qui domine mes sens. Je suis entièrement sous l’eau. Mes cheveux dépassent de la cagoule et dansent à la surface de l’eau. Mon corps oscille librement avec le va-et-vient du ressac et retrouve ses réflexes aquatiques que la gravité a cloué sur terre. Mes bras se déploient avec légèreté, les doigts s’écartent et pianotent le fluide qui m’entoure.
Mon corps retrouve ses réflexes aquatiques.
Mon corps retrouve ses réflexes aquatiques.
L’eau est claire. La lumière du soleil pénètre dans la mer en un prisme de rayons opalins. Les laminaires, ces algues marines brunes en forme de longs rubans aplatis, dansent au ralenti de gauche à droite.

Des poissons dévoilent timidement le bout de leur nageoire entre deux rochers. Certains d’entre eux, las de leur chasse nocturne, se terrent au fond des innombrables cachettes de la côte que ma silhouette en mouvement vient ombrager. D’autres se réveillent et partent à leur tour en quête de subsistance. C’est le ballet perpétuel de la vie sur notre planète, chacun jouant son rôle dans l’évolution.
La lumière du soleil pénètre la mer en un prisme de rayons opalins.
La lumière du soleil pénètre la mer en un prisme de rayons opalins.
L’envie d’une série de mouvement de papillon me prend. Nage ô combien cavalière et libératrice. Notre odyssée amphibie peut continuer.
Je vis chaque ondulation comme un cri de liberté.
Je vis chaque ondulation comme un cri de liberté.
Rocher de Yourch Korz au milieu de la baie
(source : cnkornog-ouessant.jimdofree.com)
Rocher de Yourch Korz au milieu de la baie
(source : cnkornog-ouessant.jimdofree.com)
10h45 : Youc'h Korz ou les Colonnes d'Hercule

Nous atteignons la roche de Youc'h Korz et découvrons une imposante faille de granit la traversant de part en part sur son versant ouest. Sachant que des centaines d’oiseaux marins y trouvent refuge, dont certains probablement en période de nidification, nous décidons de ne pas débarquer sur l'île et de traverser la faille afin de perturber le moins possible leur tranquillité.

Nous pénétrons en nous faufilant dans cette anfractuosité qui me rappelle le défilé des Thermopyles*. De hautes parois rocheuses nous toisent telles les colonnes d’Hercule et guident nos coups de palme.

Nous nageons l’un derrière l’autre, les sens aux aguets. La vitre de notre masque est à moitié immergée afin de surveiller à la fois sous l’eau et en surface les obstacles éventuels sur le parcours. Ça passe ! Nous arrivons dans une petite cuvette abritée du vent et sans ressac et nous amusons à quelques apnées. Le clapotis de l'eau en surface nous servant à la fois de guide et de plafond de verre.

* Thermopyles : point stratégique en Grèce dans lequel de nombreuses batailles y ont été livrées.
Petite pause avant de traverser la faille cachée de Yourch Korz, le rocher situé au milieu de la Baie de Lampaul.
Petite pause avant de traverser la faille cachée de Yourch Korz, le rocher situé au milieu de la Baie de Lampaul.
Le défilé des Thermopyles
Le défilé des Thermopyles
La roche de You'ch Korz passée, nous remettons les gaz vers le nord de la baie de Lampaul en prenant comme repère visuel le phare du Créac'h. L'idée est de raccrocher la côte un peu à gauche de la cale de Bouguezen et de tirer vers l'ouest pour passer la pointe de Pern avant que le courant ne pousse trop et ne nous envoie dans la Manche.
Colonie de cormorans sur leur rocher.
Colonie de cormorans sur leur rocher.
11h30 : Le cormoran

Nous sommes accueillis à la fin de cette petite traversée de baie (700 m) par un animal que j'affectionne tout particulièrement : le cormoran. Du vieux breton morbran, composé de mor (« mer ») et de bran (« corbeau ») signifiant littéralement « corbeau de mer » Le cormoran est le compagnon idéal pour un moment de solitude face à l‘océan. 

Discret par nature à l'instar de son cousin éloigné le goéland, jamais il ne trouble le silence et la beauté du moment par un geste incongru ou un cri inutile. Rarement mis en valeur dans la littérature, il n’attend rien des hommes. C’est un artiste à lui tout seul qui contemple la vie au travers de son œil bleu pâle. Chaque matin lorsque la nuit s’en va, il quitte sa grotte natale pour aller pêcher. 

Perché sur son rocher, il s’agite et commence sa journée marine en scrutant cette ligne blanche tracée par l’aube à l’horizon. Moment solennel où la nature se recueille et où la vie attend les premiers rayons du soleil pour s’activer. Contrairement à l’emblème national de notre pays, il ne croit pas lui qu’il fera lever l’astre céleste en poussant un cri dissonant. Il est seul et médite en l’attendant passionnément de tout son être pour l’admirer et le saluer. 

Lorsqu’il s’envole pour sa pêche lointaine, c’est un gladiateur prêt à se jeter dans l’arène. Bombant fièrement le torse devant ses congénères et écartant ses ailes d’un signe de victoire. Sous l’eau, ce mirmillon aquatique étonne par ses capacités pulmonaires et mène une lutte éprouvante avec des poissons apeurés par tant de ferveur dans l'effort et de trajectoires imprévisibles.
Sous l’eau, c’est un mirmillon aquatique. (source : jacquespoulard-photos.fr)
Sous l’eau, c’est un mirmillon aquatique. (source : jacquespoulard-photos.fr)
Après le bain du matin, il sort de l’eau puis déploie à nouveau ses ailes afin d’exposer son ventre au soleil. Ceci lui permet d’augmenter sa température interne et d’accélérer une digestion qui blanchira avec indifférence le promontoire sous ses pieds. C’est là que seul, en famille ou entre amis, il vit les meilleurs moments de sa journée. 

Sa silhouette biscornue prolonge le rocher sous ses pattes palmées en un corps élancé, le bec pointé vers le ciel. Une léthargie profonde s’empare de lui. Mimétisme fortuit ou intentionnel, la ressemblance avec notre allure, notre façon d’évoluer et de contempler les éléments est saisissante.

Lorsque la mer se retire et qu’elle met à nu ses entrailles, un monde nouveau lui apparaît. Son regard est attiré par une faune et une flore exceptionnelles. Il tourne la tête pour mieux voir ces rochers tapissés de coquillages, d’algues brunes, vertes ou roses qui sèchent au soleil. 

Il sait que le temps lui est compté pour admirer ces trésors dévoilés et il profite de chaque minute de l’après-midi pour jouir du spectacle. C’est un poète stoïque et non pas un savant excentrique.

La fin de la journée approche. Il est temps pour lui de quitter son rocher en se jetant à la mer, ou en regagnant son refuge d’un vol au raz de l’eau, direct et millimétré. Ses yeux se ferment progressivement aux lumières du soleil couchant tapissant le plafond de sa grotte sacrée.
Formation serrée à l'approche de la pointe de Pern.
Formation serrée à l'approche de la pointe de Pern.
12h00 : La pointe de Pern

Beg ar Pern (« Pointe des amas » au sens paquet de mer ou lame). Aussi déroutante que Stonehenge, avec ses pierres levées, ses rochers sombres et chaotiques qui subissent à l’année les assauts répétés de la mer. L’Océan, jusqu’alors maître unique du large, arrive ici et s’acharne furieusement sur ces premiers obstacles venus à sa rencontre.

Ceux qui connaissent l’endroit savent de quoi nous parlons. Pour les autres, dîtes-vous que c’est en quelque sorte le Cap Horn du coin. Situé à la pointe nord-ouest de l’île, le déchainement des forces de la nature à cet endroit est fréquent. Surtout en hiver lorsque l’éclat des phares se noie dans une brume qui aveugle tout et que l’océan frappe ces rocs comme s’ils étaient des enclumes.

Un lieu où la mer harcèle continuellement la terre en hiver en une chorégraphie démesurée des éléments ; le vent tenant le rôle de chef d’orchestre de cette symphonie impétueuse. Les grands monstres rocheux semblent eux boire ce flot avec une voracité telle, que la houle déborde de leur gorge noyée d’eau salée en de petites cascades suintantes le long de la pierre. Le mugissement de la houle venue s’éclater sur le haut de la grève ferait presque trembler le sol sous les pieds.

Jour 2
Les fois où le bleu de la mer est visible en hiver sont rares, le vacarme est incessant et le bouillonnement d’écume permanent. Un chaudron ardent au milieu duquel se dresse fièrement le phare de Nividic, dont la construction achevée en 1936 fut un enfer qui dura 24 ans. 

En été, l’endroit renait sous une clarté pure. Le soleil vernit la mer et les montagnes d’eau laissent place à des rides capricieuses. Les mouettes sèchent leurs plumes, les abeilles bourdonnent et l’air est tout embaumé de l’odeur de la lande avoisinante. 

Les conditions particulièrement clémentes des jours passés et le faible coefficient de marées de l’heure à laquelle nous nous trouvons s’avèrent être de précieux alliés. Guidés par Armel qui connait presque chaque roche sous l'eau, nous entamons la nage en rasant la côte. 

La navigation dans la zone se révèle être des plus ludique avec des zones de calme, des contres, des zones tampons et des veines d'eau où le courant est tel, que nous sentons le fluide glisser le long du corps et masser nos petits mollets d'humains. Certains d'entre nous, grisés par la joie du moment et du lieu, remettent une pièce dans la machine et décident de contourner à nouveau la roche du premier pylône ayant servi à la construction du phare.

La concentration est là. Le plaisir aussi. Avec comme fil d’Ariane : le bon sens et le respect des règles de sécurité. 
C’est une quête de sensations et non de performances ou de gloire. 

Dans cet obscur corps à corps avec le courant, nous devinons, davantage que nous la suivons, la route qui nous fera passer la pointe. 
Tout se déroule comme prévu.
Tout se déroule comme prévu.
Nos corps creusent un sillon dans cette étendue d’eau salée.
Nos corps creusent un sillon dans cette étendue d’eau salée.
Dans l’aveuglement des vagues et du sel sur nos masques, nous distinguons une sortie. Les nerfs se relâchent. 

La fatigue et le froid pénètrent doucement en nous et notre nage ralentit. Pendant quelques instants nous nous laissons porter par la mer. J’enlève mon masque et m’abandonne au gré du clapot sur ma cagoule. 

Que la vie est étrange qui emporte ainsi nos corps perdus et nous pousse à ces immersions volontaires ! Mon esprit est obscurci d’une fatigue saine et bénéfique. Une fois débarqués, nous tanguons grotesquement dans nos combinaisons sous l'œil interloqué des touristes venus observer le paysage.

Nous nous abandonnons à la beauté sauvage des lieux et dégustons nos graines du repas de midi sous un soleil régénérateur.

La pointe de Pern par temps calme.
La pointe de Pern par temps calme.
et en tempête (source : Ouest France)
et en tempête (source : Ouest France)
Le phare de Nividic sur la gauche de l'image.
Le phare de Nividic sur la gauche de l'image.
Pause déjeuner au soleil.
Pause déjeuner au soleil.
La grève de Porz Glaz avec ses galets blancs polis, semblables à un champ d’œufs d‘autruche fossilisés.
La grève de Porz Glaz avec ses galets blancs polis, semblables à un champ d’œufs d‘autruche fossilisés.
Prochaine étape : le colosse
Prochaine étape : le colosse
Kenavo Nividic
Kenavo Nividic
15h00 : Le Colosse

Après une petite heure de marche, nous arrivons au pied d’un des plus puissants phares du monde : Ar Créac’h (« Le promontoire» ou « Son éminence » en breton). Sa majestuosité nous ferait presque plier le genou en guise de révérence.

Ce colosse construit en 1863, est le gardien de l'une des routes maritimes les plus fréquentées de l'Atlantique : le rail d’Ouessant (cf. § Jour 1). Il guide les bateaux qui entrent et sortent de la Manche. 
Le style n'est pas des plus esthétique mais nous randonnons combis sur le sac afin qu'elles sèchent le plus possible avant la prochaine mise à l'eau.
Le style n'est pas des plus esthétique mais nous randonnons combis sur le sac afin qu'elles sèchent le plus possible avant la prochaine mise à l'eau.
Phare du Creac’h (source : pennarbed.fr)
Phare du Creac’h (source : pennarbed.fr)
Identifiable par sa tour de 55 mètres de haut (75 m par rapport au niveau de la mer) à bandes blanches et noires, ses deux lanternes superposées émettent un faisceau lumineux d’une portée de 60 kilomètres environ !

Certains prétendent que son éclat serait visible par temps clair depuis le Cap Lizard, au sud-ouest de l'Angleterre. Au vu de la distance qui les sépare (170 km) et de la rotondité de la Terre à prendre en compte par rapport à la hauteur respective des deux phares, il faudrait faire le calcul pour lever le doute sur la véracité de l’affirmation ci-dessus. Mais laissons Pythagore et Thalès de côté pour revenir à la beauté sauvage du site. 

Le monument peint aux couleurs du drapeau breton (« Gwenn ha du » signifiant « blanc et noir ») prend aux tripes par la simplicité du symbole et pourrait à lui seul prétendre au rang de septième merveille de la Bretagne.
Une piscine naturelle qui n'attend que nous.
Une piscine naturelle qui n'attend que nous.
Passée l’émotion des lieux, nous explorons la côté déchiquetée aux alentours et tombons sur une énorme piscine naturelle alimentée par la houle venant du large. L'occasion rêvée pour une petite trempette improvisée, libéré de tout notre barda. :)
La baignade terminée, en route vers la prochaine étape : Yuzin.
La baignade terminée, en route vers la prochaine étape : Yuzin.
18h00 : Yuzin

Passée l'émotion du Créac'h et de la pause salée dans une eau à 14°C, nous arrivons à la cale de Yuzin pour la dernière nuit de l'aventure. Nous trouvons un bloc de rochers un peu excentré du sentier côtier et décidons d'y manger le repas du soir. Au menu : risotto aux champignons et au chorizo puis tartines de miel d'Ouessant en dessert. Un régal.
Risotto aux champignons
Risotto aux champignons
Lumières de soleil couchant sur la côte nord de l'île.
Lumières de soleil couchant sur la côte nord de l'île.
Un voile rose métallique se dépose sur la mer et les falaises.
Un voile rose métallique se dépose sur la mer et les falaises.
Pour la nuit, nous attendrons que le soleil soit couché avant de se glisser dans nos sacs de couchage à la belle étoile et à l'abri des regards. 
Certains d'entre nous, attirés par les sirènes de la camaraderie houblonnée, tenteront une excursion au bourg une fois la nuit tombée afin de prolonger la soirée.:D
Jour 2
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