John Muir Trail, Sierra High Route, High Sierra Trail 540km
Voyage en solitaire à partir de Yosemite Village sur le John Muir Trail, puis une portion du sierra High Trail de Tuolumne meadows jusqu'à read meadows, reprise sur le John Muir jusqu'au Mont Whitney et enfin le High Sierra Trail à partir de Cottonwood Lake.
Quand : 10/09/2018
Durée : 23 jours
Durée : 23 jours
Carnet publié par Monneal
le 10 déc. 2018
modifié le 06 mars 2019
modifié le 06 mars 2019
Mobilité douce
Précisions :
Bart San Francisco - Richmond
Train richmond - Merced
Bus Merced - Yosemite Village
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-
Vue d'ensemble
Le compte-rendu : Section 4 (mise à jour : 08 mars 2019)
Red Meadows-Whitney Portal 265 km
Le chemin est bien tracé, sableux. Je vois les nombreuses traces de pas des personnes qui m'ont précédé. Parmi elles, je repère vite une semelle de chaussures pieds nus, avec les orteils incrustés dans le sol, c'est François me dis-je, ses traces ont survécu à l'hiver et je les retrouve maintenant.
Il me nargue ?
Je jette mon sac à dos, enlève les jambières de mon pantalon, quitte la doudoune et m'apprête à partir en courant.
Je vais battre le record de François d’Haene, c'est décidé !
"Alain !"
" Laisse moi ! je me concentre."
"Alain !"
"Oui"
« Depuis que tu es parti, tu as dépassé plusieurs fois les 2 jours et 19 heures du record, je crois que c’est mort !"
"Ah ?"
"Oui ! tu es complètement hors-course, reprends-tes esprits, ton sac à dos, tes jambières et fais-là cool !"
« Ah bon ? »
Je continue ma marche en laissant mon esprit délirer. Plus besoin de mobiliser mes cerveaux masculins et féminins pour poser les pieds. Le chemin est bien entretenu et laisse une bonne place à la rêverie pendant que mes jambes font le job. Marcher seul permet d’être à 100% tourné vers l’extérieur et d’absorber ce qui m’entoure sans restriction ni distraction.
Je gobe les paysages comme d’autres les flambis.
J’avale les images mieux que les haribos.
J’enregistre les sensations bien mieux que Sony.
Mes yeux déclenchent plus vite que le doigt du photographe.
Mon cerveau imprime à la vitesse de la lumière.
Et j'avance avec détermination.
Quand je mesure les distances et la difficulté, je ne peux m’empêcher d’admirer les ultra-trailer, ces bêtes de course, ces joyaux de technologie hi-tech, ces mécaniques de haute précision, des formules 1 là où je me contenterai d’être un vélo, au mieux une mobylette.
La livraison en une heure.
Le colissimo des jambes.
L’engagement n’est sans doute pas le même.
La volonté d'aboutir identique.
Ces merveilles de biotechnologie sont plus dans l’excitation rapide d’un effort intense et d’un emballement rapide des kilomètres que dans une digestion lente d’un parcours aux paysages multiples. Serait-ce au détriment de la découverte et de l’imprégnation des souvenirs dans une poche disponible du cerveau ? Je pense que les rares randonneurs que je double avec leurs sacs à dos de 25 ou 30 kg disent la même chose de moi alors que j’ai vraiment le sentiment d’être dans une méditation active et apaisée.
Mes endorphines sont moins dynamiques que les ultras, moins génératrices d’une euphorie anesthésiante mais elles laissent aussi de la place à la douceur du rêve, à la sensualité du regard, à l’extase de l’observateur émerveillé.
J’ai en revanche la robustesse du diesel. Mes tendons sont faits dans un alliage rustique qui ne nécessite pas de maintenance, mes rotules aussi fiables que celles d’une Lada, mes muscles discrets avec la répartie d’un vendeur de cuisines et la solidité d'un vigile de Casino. L’entretien est minimal, le carburant à peine raffiné et les vitesses de pointe misérables.
Mais ça avance, ça ne consomme rien et ça ne pollue pas !
Nul besoin d'avoir une équipe autour de moi, quelques sparadraps suffisent à tenir les morceaux ensembles. Ma mécanique est rassurante et moins sensible aux variations diverses que ces physiques vifs et élancés aux poches remplies de gels énergétiques. Je ne m’étrangle pas en mangeant une barre de céréale, je ne m’étouffe pas en buvant de l’eau froide, je ne vomis pas en haut des côtes et je ne porte pas un sac à dos de nouveau né.
En résumé, l’objectivité n’est pas la plus grande de mes qualités !
Pour l’instant, j’enchaine les côtes et les descentes dans un paysage qui s’assèche et ressemble à la Sierra Nevada de Roy Rogers qui a occupé quelques espaces dans mes dernières séances. Je rattrape avec mon petit moteur le dénivelé perdu à Red Meadows et me propulse d’un coup de cape magique au lac Virginia, turquoise aquatique à 3000 m, bijou bleuté tourné vers le ciel pour lui voler les attentions.
Tout cela monte et descend telles les chenilles de mon enfance. Les mètres s'accumulent jusqu'à atteindre 35 km et une altitude de 3200 m.
C'est si peu !
Les bivouacs s'empilent.
Celui là, juste après Silver Pass , mettra encore une fois mon matériel au défi du froid.
La tente va respirer un bon air d'altitude mais mon duvet tremble déjà. Il se dit qu'il ne va pas être à la hauteur. Quelle déception pour lui, considéré au départ comme une merveille de technologie, le must du voyager léger ! Il fait de son mieux, dispose les plumes comme il le peut mais ses limites sont atteintes voire dépassées à chaque nouveau campement.
Et si la nuit ressemble au Verdon l’hiver, le jour amène la chaleur du désert et ressemble au Verdon l'été.
Death Valley n’est pas si loin à l’est.
Los Angeles aspire l’eau potable à l’ouest.
Je continue ma descente vers le Sud. Le John Muir est en forme et facilite la progression des randonneurs. Le soleil l’accompagne et chauffe mes pas.
Pour me rafraichir, je profite de chaque ruisseau pour mouiller la casquette, et quelquefois d'une pause à l'ombre pour déposer ma fatigue.
Une pierre posée sur le chemin
Me tend la main
Mes jambes rapiécées
La prennent
Et m'obligent à m’asseoir
Ma tête
Si rebelle d'habitude
Ne dit rien
Trop contente de cet arrêt soudain
Finalement, j'abdique
L'ombre est douce
Et chaude
La pierre fraîche et paisible
Je m'éloigne de la marche
Et pose mon repos
Sur la fraicheur du caillou
Autour la chaleur est intense
Le silence puissant
Et j'appréhende
De remettre tout en ordre
et en mouvement
Ma tête d'abord
Pour qu'elle reprenne son rôle
Mes jambes ensuite
Et enfin moi
À nouveau sur le chemin
À nouveau sous le soleil
À compter les kilomètres
Et attendre qu'à nouveau
Une pierre me tende la main.
Chaque rencontre, aussi rare soient-elles, est intense et brève. Vu les heures matinales où je pars, je croise de temps à autre quelques campeurs disséminés dans la verdure grelottant autour de leur café que je salue par un chaleureux :
« Good morning, I’m french but I have forgotten the croissants chauds !»
Ca les fait marrer. Quel humour décapant !
Ainsi, je croise Jerry, avec qui nous entamons une discussion comparative sur nos émetteurs satellites. Nos propos dérivent ensuite sur de belles considérations sur ce que nous ressentons l’un et l’autre à travers nos expériences de marcheurs solitaires.
Je constate que la solitude ne se partage pas.
Elle s’échange, elle se compare, elle se dissèque.
Et celle-ci qui me faisait peur avant de partir devient compagne et protection. Je l’ai apprivoisée, domptée, canalisée !
Chaque marcheur se déplace avec elle et la met de côté un court instant lors de nos rencontres éphémères.
Chacun a les yeux brillants de cette exaltation qu’elle génère.
Cet amas de solitude exalte les émotions, les libère et détruit les barrières de la communication.
Tout ce qui me protège d’habitude est nettoyé, les verrous ont sauté. J’accepte ces débordements d’émotions sans obstacle.
Ce n’est pas encore la sérénité, il faudrait quelques années dans une grotte à me faire pousser les ongles pour y arriver.
Peut-être.
Mais cela donne une vague idée de ce pourrait être le renoncement.
« Renoncer c'est lâcher prise, cela apporte la liberté, la paix et nous permet d’être totalement ouverts »
Ces personnes qui vivent le voyage aussi intensément et solitaires deviennent des amis profonds en quelques instants et disparaissent aussi vite dans la poussière du sentier. Tous sont des marqueurs précieux de ces longues déambulations.
Je retrouve des sensations connues.
Je les ai vécues en hiver lors d’itinérances à ski ou en été pendant des traversées dans les alpes ou les Pyrénées.
A chaque fois la même richesse avec ceux qui étaient dans le même état d’esprit.
A chaque fois le repositionnement des valeurs.
Ce qui est important.
Ce qui l’est moins.
La marche, la course, l’effort créent des liens puissants, une empathie mutuelle et une affection soudaine et partagée pour « l’autre ».
Heureusement que je ne suis pas ultra trailer.
Ce débordement d’émotions avec les suppléments d’adrénaline et d’endorphines que produisent les courses longues me ferait exploser les vaisseaux, provoquerait une embolie des sensations, une overdose du partage, un AVC de la rencontre.
Mais aussi précieux conseil, il me dit que le Muir Ranch serait ouvert pour le resupply ! Je n’en suis pas persuadé car ils m’avaient répondu le contraire suite à un mail de ma part. J’envisage de faire le petit détour pour vérifier, mais quoiqu’il en soit, j’ai prévu suffisamment de nourriture pour arriver à Whitney portal. Et mon sac à dos blessé serait très vexé d’avoir porté inutilement. Je ne lui dirai pas.
A l’approche du lac Thomas Edison, nombreux sont ceux qui abandonnent, sac trop lourds, jambes trop faibles, moral trop bas, préparation succincte. J’en croise quelques uns qui s’excusent presque de ne pas continuer.
Ceux qui ne sont pas pressés et ont choisi de faire un JMT en plus de 21 jours, moyenne proposée par le topographic map guide, profitent du ferry qui accoste à 2 km du chemin et traversent le lac pour faire le plein de nourriture à Vermillon Resort. De fait, je croise peu de monde, peut-être entre 5 et 10 par jour ce qui est l’avantage de septembre …
Et aussi une belle crotte d’ours en plein milieu du chemin.
Le chemin est bien tracé, sableux. Je vois les nombreuses traces de pas des personnes qui m'ont précédé. Parmi elles, je repère vite une semelle de chaussures pieds nus, avec les orteils incrustés dans le sol, c'est François me dis-je, ses traces ont survécu à l'hiver et je les retrouve maintenant.
Il me nargue ?
Je jette mon sac à dos, enlève les jambières de mon pantalon, quitte la doudoune et m'apprête à partir en courant.
Je vais battre le record de François d’Haene, c'est décidé !
"Alain !"
" Laisse moi ! je me concentre."
"Alain !"
"Oui"
« Depuis que tu es parti, tu as dépassé plusieurs fois les 2 jours et 19 heures du record, je crois que c’est mort !"
"Ah ?"
"Oui ! tu es complètement hors-course, reprends-tes esprits, ton sac à dos, tes jambières et fais-là cool !"
« Ah bon ? »
Je continue ma marche en laissant mon esprit délirer. Plus besoin de mobiliser mes cerveaux masculins et féminins pour poser les pieds. Le chemin est bien entretenu et laisse une bonne place à la rêverie pendant que mes jambes font le job. Marcher seul permet d’être à 100% tourné vers l’extérieur et d’absorber ce qui m’entoure sans restriction ni distraction.
Je gobe les paysages comme d’autres les flambis.
J’avale les images mieux que les haribos.
J’enregistre les sensations bien mieux que Sony.
Mes yeux déclenchent plus vite que le doigt du photographe.
Mon cerveau imprime à la vitesse de la lumière.
Et j'avance avec détermination.
Quand je mesure les distances et la difficulté, je ne peux m’empêcher d’admirer les ultra-trailer, ces bêtes de course, ces joyaux de technologie hi-tech, ces mécaniques de haute précision, des formules 1 là où je me contenterai d’être un vélo, au mieux une mobylette.
La livraison en une heure.
Le colissimo des jambes.
L’engagement n’est sans doute pas le même.
La volonté d'aboutir identique.
Ces merveilles de biotechnologie sont plus dans l’excitation rapide d’un effort intense et d’un emballement rapide des kilomètres que dans une digestion lente d’un parcours aux paysages multiples. Serait-ce au détriment de la découverte et de l’imprégnation des souvenirs dans une poche disponible du cerveau ? Je pense que les rares randonneurs que je double avec leurs sacs à dos de 25 ou 30 kg disent la même chose de moi alors que j’ai vraiment le sentiment d’être dans une méditation active et apaisée.
Mes endorphines sont moins dynamiques que les ultras, moins génératrices d’une euphorie anesthésiante mais elles laissent aussi de la place à la douceur du rêve, à la sensualité du regard, à l’extase de l’observateur émerveillé.
J’ai en revanche la robustesse du diesel. Mes tendons sont faits dans un alliage rustique qui ne nécessite pas de maintenance, mes rotules aussi fiables que celles d’une Lada, mes muscles discrets avec la répartie d’un vendeur de cuisines et la solidité d'un vigile de Casino. L’entretien est minimal, le carburant à peine raffiné et les vitesses de pointe misérables.
Mais ça avance, ça ne consomme rien et ça ne pollue pas !
Nul besoin d'avoir une équipe autour de moi, quelques sparadraps suffisent à tenir les morceaux ensembles. Ma mécanique est rassurante et moins sensible aux variations diverses que ces physiques vifs et élancés aux poches remplies de gels énergétiques. Je ne m’étrangle pas en mangeant une barre de céréale, je ne m’étouffe pas en buvant de l’eau froide, je ne vomis pas en haut des côtes et je ne porte pas un sac à dos de nouveau né.
En résumé, l’objectivité n’est pas la plus grande de mes qualités !
Pour l’instant, j’enchaine les côtes et les descentes dans un paysage qui s’assèche et ressemble à la Sierra Nevada de Roy Rogers qui a occupé quelques espaces dans mes dernières séances. Je rattrape avec mon petit moteur le dénivelé perdu à Red Meadows et me propulse d’un coup de cape magique au lac Virginia, turquoise aquatique à 3000 m, bijou bleuté tourné vers le ciel pour lui voler les attentions.
Tout cela monte et descend telles les chenilles de mon enfance. Les mètres s'accumulent jusqu'à atteindre 35 km et une altitude de 3200 m.
C'est si peu !
Les bivouacs s'empilent.
Celui là, juste après Silver Pass , mettra encore une fois mon matériel au défi du froid.
La tente va respirer un bon air d'altitude mais mon duvet tremble déjà. Il se dit qu'il ne va pas être à la hauteur. Quelle déception pour lui, considéré au départ comme une merveille de technologie, le must du voyager léger ! Il fait de son mieux, dispose les plumes comme il le peut mais ses limites sont atteintes voire dépassées à chaque nouveau campement.
Et si la nuit ressemble au Verdon l’hiver, le jour amène la chaleur du désert et ressemble au Verdon l'été.
Death Valley n’est pas si loin à l’est.
Los Angeles aspire l’eau potable à l’ouest.
Je continue ma descente vers le Sud. Le John Muir est en forme et facilite la progression des randonneurs. Le soleil l’accompagne et chauffe mes pas.
Pour me rafraichir, je profite de chaque ruisseau pour mouiller la casquette, et quelquefois d'une pause à l'ombre pour déposer ma fatigue.
Une pierre posée sur le chemin
Me tend la main
Mes jambes rapiécées
La prennent
Et m'obligent à m’asseoir
Ma tête
Si rebelle d'habitude
Ne dit rien
Trop contente de cet arrêt soudain
Finalement, j'abdique
L'ombre est douce
Et chaude
La pierre fraîche et paisible
Je m'éloigne de la marche
Et pose mon repos
Sur la fraicheur du caillou
Autour la chaleur est intense
Le silence puissant
Et j'appréhende
De remettre tout en ordre
et en mouvement
Ma tête d'abord
Pour qu'elle reprenne son rôle
Mes jambes ensuite
Et enfin moi
À nouveau sur le chemin
À nouveau sous le soleil
À compter les kilomètres
Et attendre qu'à nouveau
Une pierre me tende la main.
Chaque rencontre, aussi rare soient-elles, est intense et brève. Vu les heures matinales où je pars, je croise de temps à autre quelques campeurs disséminés dans la verdure grelottant autour de leur café que je salue par un chaleureux :
« Good morning, I’m french but I have forgotten the croissants chauds !»
Ca les fait marrer. Quel humour décapant !
Ainsi, je croise Jerry, avec qui nous entamons une discussion comparative sur nos émetteurs satellites. Nos propos dérivent ensuite sur de belles considérations sur ce que nous ressentons l’un et l’autre à travers nos expériences de marcheurs solitaires.
Je constate que la solitude ne se partage pas.
Elle s’échange, elle se compare, elle se dissèque.
Et celle-ci qui me faisait peur avant de partir devient compagne et protection. Je l’ai apprivoisée, domptée, canalisée !
Chaque marcheur se déplace avec elle et la met de côté un court instant lors de nos rencontres éphémères.
Chacun a les yeux brillants de cette exaltation qu’elle génère.
Cet amas de solitude exalte les émotions, les libère et détruit les barrières de la communication.
Tout ce qui me protège d’habitude est nettoyé, les verrous ont sauté. J’accepte ces débordements d’émotions sans obstacle.
Ce n’est pas encore la sérénité, il faudrait quelques années dans une grotte à me faire pousser les ongles pour y arriver.
Peut-être.
Mais cela donne une vague idée de ce pourrait être le renoncement.
« Renoncer c'est lâcher prise, cela apporte la liberté, la paix et nous permet d’être totalement ouverts »
Ces personnes qui vivent le voyage aussi intensément et solitaires deviennent des amis profonds en quelques instants et disparaissent aussi vite dans la poussière du sentier. Tous sont des marqueurs précieux de ces longues déambulations.
Je retrouve des sensations connues.
Je les ai vécues en hiver lors d’itinérances à ski ou en été pendant des traversées dans les alpes ou les Pyrénées.
A chaque fois la même richesse avec ceux qui étaient dans le même état d’esprit.
A chaque fois le repositionnement des valeurs.
Ce qui est important.
Ce qui l’est moins.
La marche, la course, l’effort créent des liens puissants, une empathie mutuelle et une affection soudaine et partagée pour « l’autre ».
Heureusement que je ne suis pas ultra trailer.
Ce débordement d’émotions avec les suppléments d’adrénaline et d’endorphines que produisent les courses longues me ferait exploser les vaisseaux, provoquerait une embolie des sensations, une overdose du partage, un AVC de la rencontre.
Mais aussi précieux conseil, il me dit que le Muir Ranch serait ouvert pour le resupply ! Je n’en suis pas persuadé car ils m’avaient répondu le contraire suite à un mail de ma part. J’envisage de faire le petit détour pour vérifier, mais quoiqu’il en soit, j’ai prévu suffisamment de nourriture pour arriver à Whitney portal. Et mon sac à dos blessé serait très vexé d’avoir porté inutilement. Je ne lui dirai pas.
A l’approche du lac Thomas Edison, nombreux sont ceux qui abandonnent, sac trop lourds, jambes trop faibles, moral trop bas, préparation succincte. J’en croise quelques uns qui s’excusent presque de ne pas continuer.
Ceux qui ne sont pas pressés et ont choisi de faire un JMT en plus de 21 jours, moyenne proposée par le topographic map guide, profitent du ferry qui accoste à 2 km du chemin et traversent le lac pour faire le plein de nourriture à Vermillon Resort. De fait, je croise peu de monde, peut-être entre 5 et 10 par jour ce qui est l’avantage de septembre …
Et aussi une belle crotte d’ours en plein milieu du chemin.
J’écarquille les yeux, je cherche ….
Quelques bouts de bois, des arbres coupés, des feuillages noircis…
Si j’avais vu autant d’ours que j’ai vu de souches qui ressemblent à des ours, alors j’en aurais vu des ours !
Plus je gagne de l’altitude et plus le paysage s’assèche. Les grandes dalles de granit s’élargissent au milieu des redwood les plus robustes dont le tronc rougit et s’épaissit. La Selden pass affiche 3321 m et le chemin s’élance dans une descente bordée de prairies jaunies et d’arbres qui se densifient pour aboutir au Muir Trail Ranch.
Deux jours et demi pour arriver là depuis Red Meadows et le « là » est bien ouvert, merci Jerry, pas pour y dormir dans les chalets qui sont bien fermés, mais pour la bourse d’échange.
De quoi s’agit-il ?
Sous une bâche, une grande table en bois.
Deux bancs, un de chaque côté.
Sur le côté, une planche de bois
Sur la planche des « Buckets », gros bidons plastiques alimentaires et dans chacun des trésors en libre service et gratuits. Chaque randonneur fatigué de manger ses pâtes infâmes, épuisé par le poids du sac à dos, dégouté de la randonnée y dépose ce qu’il veut et récupère ce qui lui fait envie.
On y trouve de la nourriture maison, des lyophilisés, des barres, des dizaines de bombes anti-insectes.
C’est Ali Baba !
Quand j’arrive, Daniel Spielman, un américain dépité dont les yeux ne brillent pas d’euphorie a l’aspect d’un randonneur épuisé, déprimé n’ayant pas prévu assez de temps et encore moins d’énergie pour faire le JMT dans sa totalité.
Il est en train de vider un bucket qu’il avait fait livrer au Ranch.
Pour 80 $, les propriétaires les récupèrent à cheval à la poste de Bishop, située à une soixantaine de km et les ramènent, moyen simple et couteux de faire le plein de nourriture à mi-parcours du John Muir.
Mes yeux brillent tels ceux du vautour attendant la fin probable de la vache agonisante. Son bucket, fraichement récupéré est rempli de merveilles gustatives… je me débarrasse de mes infâmes pâtes complètes, de mes nouilles chinoises. Je dévore mes restes de viandes séchées. Je laisse les barres les moins calorifiques.
Je repars avec le plein de lyophilisés, omelettes au lardons, lasagnes, plats cuisinés.
De bonnes barres bourrées de calories.
Des légumes vegan sous vide.
Des viandes séchées fraîches !
Que du sec et léger.
Je ne suis pas moins mais mieux lourd qu’avant!
Je porte du plaisir et de la saveur, c’est presque plus facile.
"Qui porte du plaisir, marche sans faiblir !"
Après quelques jours à manger sommaire, on se contente de peu !
Je continue de voir régulièrement les chaussures à orteil gravées dans le sable. Le parcours est de plus en plus sec et rocailleux, accompagnant un torrent qui coule bruyamment dans un canyon que le chemin essaie de suivre avec peine et dénivelée.
J’ai quitté Yosemite pour rentrer dans Kings Canyon. Cette frontière de parcs existe bien, le paysage a changé, le soleil est plus chaud, les arbres moins nombreux.
Quelques bouts de bois, des arbres coupés, des feuillages noircis…
Si j’avais vu autant d’ours que j’ai vu de souches qui ressemblent à des ours, alors j’en aurais vu des ours !
Plus je gagne de l’altitude et plus le paysage s’assèche. Les grandes dalles de granit s’élargissent au milieu des redwood les plus robustes dont le tronc rougit et s’épaissit. La Selden pass affiche 3321 m et le chemin s’élance dans une descente bordée de prairies jaunies et d’arbres qui se densifient pour aboutir au Muir Trail Ranch.
Deux jours et demi pour arriver là depuis Red Meadows et le « là » est bien ouvert, merci Jerry, pas pour y dormir dans les chalets qui sont bien fermés, mais pour la bourse d’échange.
De quoi s’agit-il ?
Sous une bâche, une grande table en bois.
Deux bancs, un de chaque côté.
Sur le côté, une planche de bois
Sur la planche des « Buckets », gros bidons plastiques alimentaires et dans chacun des trésors en libre service et gratuits. Chaque randonneur fatigué de manger ses pâtes infâmes, épuisé par le poids du sac à dos, dégouté de la randonnée y dépose ce qu’il veut et récupère ce qui lui fait envie.
On y trouve de la nourriture maison, des lyophilisés, des barres, des dizaines de bombes anti-insectes.
C’est Ali Baba !
Quand j’arrive, Daniel Spielman, un américain dépité dont les yeux ne brillent pas d’euphorie a l’aspect d’un randonneur épuisé, déprimé n’ayant pas prévu assez de temps et encore moins d’énergie pour faire le JMT dans sa totalité.
Il est en train de vider un bucket qu’il avait fait livrer au Ranch.
Pour 80 $, les propriétaires les récupèrent à cheval à la poste de Bishop, située à une soixantaine de km et les ramènent, moyen simple et couteux de faire le plein de nourriture à mi-parcours du John Muir.
Mes yeux brillent tels ceux du vautour attendant la fin probable de la vache agonisante. Son bucket, fraichement récupéré est rempli de merveilles gustatives… je me débarrasse de mes infâmes pâtes complètes, de mes nouilles chinoises. Je dévore mes restes de viandes séchées. Je laisse les barres les moins calorifiques.
Je repars avec le plein de lyophilisés, omelettes au lardons, lasagnes, plats cuisinés.
De bonnes barres bourrées de calories.
Des légumes vegan sous vide.
Des viandes séchées fraîches !
Que du sec et léger.
Je ne suis pas moins mais mieux lourd qu’avant!
Je porte du plaisir et de la saveur, c’est presque plus facile.
"Qui porte du plaisir, marche sans faiblir !"
Après quelques jours à manger sommaire, on se contente de peu !
Je continue de voir régulièrement les chaussures à orteil gravées dans le sable. Le parcours est de plus en plus sec et rocailleux, accompagnant un torrent qui coule bruyamment dans un canyon que le chemin essaie de suivre avec peine et dénivelée.
J’ai quitté Yosemite pour rentrer dans Kings Canyon. Cette frontière de parcs existe bien, le paysage a changé, le soleil est plus chaud, les arbres moins nombreux.