La Loire initiatique... avec le plus beau des compagnons: un canoë canadien en bois!
La Loire initiatique
Fin d’été dernier, une idée s’est imposée à moi : il fallait que je descende la Loire, et ça allait être un voyage initiatique. Après un WE sur la Loire avec une amie, les contours du projet se sont dessinés : je ferais ça en solo, en canoë et non en kayak malgré tout ce que ça impliquait. Je me suis donc entrainée sur plusieurs mois pour fortifier mes petites épaules, j’ai contacté certaines personnes qui avaient descendu la Loire sur un long ou moyen parcours, et je me suis mise à la recherche du canoë. Deux semaines avant le départ, j’ai alors trouvé le compagnon que je n’aurais même pas imaginé au départ : un vieux canoë canadien en bois, tout restauré, magnifique, en symbiose totale avec la nature. C’était lui !
Quand celui qui l’a restauré m’a dit qu’il me le prêtait pour ce voyage, j’ai été remplie de joie. Ca y est, le voyage initiatique commençait…
Et il allait être très différent de ce que j'avais prévu!!
La 1ère vidéo est maintenant ici:
https://www.youtube.com/watch?v=PVCvyQ7i-IA&
In-joy!
Fin d’été dernier, une idée s’est imposée à moi : il fallait que je descende la Loire, et ça allait être un voyage initiatique. Après un WE sur la Loire avec une amie, les contours du projet se sont dessinés : je ferais ça en solo, en canoë et non en kayak malgré tout ce que ça impliquait. Je me suis donc entrainée sur plusieurs mois pour fortifier mes petites épaules, j’ai contacté certaines personnes qui avaient descendu la Loire sur un long ou moyen parcours, et je me suis mise à la recherche du canoë. Deux semaines avant le départ, j’ai alors trouvé le compagnon que je n’aurais même pas imaginé au départ : un vieux canoë canadien en bois, tout restauré, magnifique, en symbiose totale avec la nature. C’était lui !
Quand celui qui l’a restauré m’a dit qu’il me le prêtait pour ce voyage, j’ai été remplie de joie. Ca y est, le voyage initiatique commençait…
Et il allait être très différent de ce que j'avais prévu!!
La 1ère vidéo est maintenant ici:
https://www.youtube.com/watch?v=PVCvyQ7i-IA&
In-joy!
Quand : 25/05/2017
Durée : 30 jours
Durée : 30 jours
Distance globale :
628km
Dénivelées :
+604m /
-877m
Alti min/max : 13m/267m
Carnet publié par Floma
le 01 août 2017
modifié le 11 déc. 2017
modifié le 11 déc. 2017
2967 lecteur(s)
-
Vue d'ensemble
Le topo : Du rêve au voyage... et la 1ère semaine (mise à jour : 24 sept. 2017)
Distance section :
94.5km
Dénivelées section :
+195m /
-239m
Section Alti min/max : 218m/267m
Description :
1ère semaine!
Le compte-rendu : Du rêve au voyage... et la 1ère semaine (mise à jour : 24 sept. 2017)
Du rêve au voyage...
Nourrir le rêve, d’abord. Se dire qu'il est possible...
Depuis un WE canoë sur la Loire, je me suis dit que c’était possible. Qu’avec de l’entrainement je pouvais y arriver, que ce n’était pas hors de ma portée. Je me suis achetée une pagaie en bois, parce que c’est plus beau en bois, et pas seulement parce que ça fait une belle déco dans mon salon. Parce que ça me fait rêver…
Et au début, j'ia cherché à faire ce voyage avec quelqu'un: le canoë, ça se fait à deux!!
Or il semblerait qu’il ne se présente personne qui ait envie de partager mes délires… Alors au lieu de chercher quelqu’un qui puisse coller avec mon envie, et avec mes dates d’entrainement et de voyage, à un moment s’est présentée l’évidence : un voyage initiatique, ça se fait seul. Pas avec quelqu’un rencontré au hasard, pas dans la précipitation ou l’angoisse de ne trouver personne. J’ai déjà voyagé seule, dans différents pays, et en France en montagne, ça ne me fait pas peur. Au contraire, c’est là qu’on rencontre le plus les autres ! On va plus vers eux, et ils viennent plus vers nous, parce qu’une personne qui voyage seule, ça intrigue, ça pose des questions, ça donne envie d’avoir des réponses. Alors c’est décidé, je vais voyager seule.
Oui, descendre la Loire me fait rêver, le rêve grandit peu à peu, j’en parle autour de moi, je regarde les livres sur la Loire, ça s’étoffe. Et à force d'en parler à tous les gens que je rencontre, je discute avec Patricia, dont le mari a descendu une partie de la Loire en bateau en bois, il m’en parle avec des étoiles dans les yeux, et me parle de sa bible : La Loire vue du fleuve. Il me le prêtera si je veux. Oui !!
Se préparer physiquement.
Déjà, la découverte de mes petites épaules au cours du WE canoë m’incite à penser que j’ai besoin d’une préparation physique. Je peux pas pagayer pendant un mois sans m’entrainer avant. Direction le club le plus proche, et comme je ne trouve pas de volontaire pour m'accompagner en canoë, je pagaye seule tous les samedis aprèm. Et je me démène, j'apprends petit à petit à diriger le bateau seule, à pagayer droit.
Se préparer mentalement.
La bible de la Loire en canoë, qui enfin parle de canoë, et non seulement de kayak, est LE livre sur le sujet, je trouve tous les renseignements dont j’ai besoin, les points dangereux pour le canoë, les portages, ce à quoi s’attendre, les dangers de la Loire y sont très bien expliqués, tout ce qu’il me faut ! Avec des photos magnifiques qui font rêver, bien évidemment…
Je me souviens aussi d’un conférencier, qui lors d’une conférence sur sa traversée du Groenland, nous avait parlé de sa descente de la Loire, alors je le contacte. Effectivement, il a descendu la Loire, une fois en kayak, et une fois à la nage ! Oui, c’est un sport que je connaissais pas, la nage en eau vive. Il a la gentillesse de répondre à toutes mes questions, ça a l’air simple, bon, ok, ça devrait être jouable…
Ensuite, par magie, je tombe sur un livre dont je reconnais l'auteur: "Aventures en Loire", de Bernard Ollivier, qui a descendu la Loire en canoë, à plus de 70 ans… Sans s’être préparé, avec un certain nombre de mésaventures, dont une météo déplorable, alors, s’il l’a fait… Peut-être que moi aussi je peux !! Bon, il a un autre entrainement physique, j’avais lu son périple sur la route de la soie, moi ça fait deux ans que les seuls éléments de mon corps habitués à bosser, c’est les neurones des FH, alors j’ai du boulot ! Et entre les séances d’entrainement, je relis mes chapitres préférés, les passages qui me touchent le plus, et le rêve avance…
(PS: FH: je suis formatrice et facilitatrice en Facteurs Humains, et les FH, c'est tout plein de choses passionnantes: gestion du stress et de la fatigue, processus de prise de décision, gestion de la prise de risques, des erreurs, et puis tout ce qui est travail en équipe! Un régal, non? Ah, je pourrais en parler pendant des heures...)
Je commence à préparer mon parcours, à partir d’où je pourrais commencer, les étapes que je pourrais faire. C’est encore plus du rêve que de l’organisation, mais ça se concrétise ! Les congés sont posés à mon travail, j’ai décidé de partir pour le WE de l’Ascension, pour faire l’ascension du Mont Gerbier de Jonc ce jour-là, en clin d’œil… Et le niveau d’eau de la Loire devrait être à son meilleur, pas trop haut avec les crues du printemps qui rendraient non navigable, et pas trop bas avec l’étiage en été qui serait trop compliqué à naviguer.
Pour la suite de la préparation physique, je voulais refaire un autre WE, minimum, voire quelques jours, à pagayer, et… La vie passant vite, les journées encore plus, le temps me manque pour organiser ça, car je finis une étude universitaire cette année, en plus de mon travail.
Se préparer socialement, familialement, etc...
Un point important de la réalisation d'un rêve, c'est de savoir à qui le partager et quand. Si vous le partagez au départ, quand il est encore tout fragile, à des personnes qui vont le critiquer, vous décourager, vous casser, ça peut être dur de s'en remettre...
Si vous le partagez plus tard, quand il a déjà un peu mûri en vous, à des personnes qui vont vous soutenir, vous poser des questions, vous renvoyer des aspects auxquels vous n'aviez pas pensé, c'est tout bénéf! Ca peut éviter des cagattes pendant le voyage...
Ca faisait déjà quelques mois que je m'entrainais, j'en ai parlé à des kayakistes dont on m'avait dit qu'ils avaient descendu la Loire, et je me suis pris quelques petites reflexions qui auraient pu me décourager, comme "t'as pas le niveau", "tu vas pas y arriver". J'ai décidé d'y réfléchir: est-ce qu'il pouvait avoir raison? Peut-être que je me lançais dans quelque chose de trop gros pour moi? J'ai posé les risques, les peurs, et j'ai aussi posé en face, la pertinence de celui qui m'avait dit ça: il ne m'avait pas vue pagayer, il ne connaissait rien de moi (ceux qui me connaissent savent à quel point je peux me lancer dans des choses... surprenantes! Et les mener à bout...) M'est venu la raison potentielle de ces critiques: je ne possédait pas le bon vocabulaire... En ayant fait la part des choses, ça donne du recul, ça évite de prendre les peurs des autres pour soi, ou de ne rien écouter non plus! Certains avertissements valent aussi leur pesant d'or...
Et j'ia réalisé certains très grands rêves, grâce au soutien de certaines personnes. Merci pour toujours!
Se préparer matériellement.
Grâce à notre super revue "carnets d'aventures", j'ai vu qu'il existait des lyophilisés, alors, banco, ce sera moins lourd. Quelques matériels à acheter, à emprunter... Je cherche depuis janvier un gilet de sauvetage où je serais confortable, nulle part je ne trouve de modèle pour femme!! Le seul truc qui change quand ils ont la prétention de vendre un modèle femme, c'est qu'il est rose!! J'en deviens verte de rage... Finalement une de mes collègues FH qui va bientôt faire quelques 8000m dans l'Himalaya et qui cherche des moon boots pour ramener le même nombre d'orteils, m'entraine sur une pente glissante: les boutiques parisiennes consacrées au trekking et sports nature, et là, magie, je découvre LE gilet de sauvetage, en plus, il va bien dans la nature: il est vert!!
Rendue 2 semaines avant le départ, je n'ai toujours pas trouvé de canoë! Je commence un peu à paniquer, c'est quand même un point essentiel pour le voyage...
Puis j'ai un contact avec quelqu'un qui possède un canoë en bois, le courant passe, il me raconte l’histoire du canoë, j’adore ! Il l’a récupéré dans un état pitoyable, certaines parties étaient pourries, cassées, et il l’a tout retapé, remis en état de naviguer, poncé, vernis, embelli… On prévoit alors de se rencontrer pour essayer le canoë, et j'ai du coup la chance de goûter les marais vendéens, il n'y a pas de courant mais ça donne un avant-goût de ce qui m'attend.
Je voulais louer ce magnifique canoë, mais son reconstructeur ne veut rien savoir. En plus, il me prête une paire de roues... Je suis quand même embêtée de juste « emprunter » le canoë et ses roues, mais il ne veut rien entendre, je sens sa générosité de cœur dans cette offre, toute sa philosophie de vie s’y retrouve : nous allons faire du « canoë-sharing » !
Le moment où on monte le canoë sur le toit de la voiture m’émeut : ça y est, le voyage devient concret !
Quelques jours plus tard, un ami me fait faire du CTT : canoë-tout terrain ! Dans son terrain vague, plein de creux, de bosses, et de voies ferrées qui trainent, j’enchaine les tractages, les passages d’obstacles, et je constate que mon idée de canoë-4 roues au lieu de 2, à l’origine pour soulager mes petits bras, est difficile à appliquer : ça passe mal, ça tourne mal, je force… Et il faut soulever le canoë à chaque fois. Je me décourage, lui rigole, oui, il m’avait dit que 4 roues ça allait être compliqué, et j’ai une petite tendance têtue… Je rentre chez moi abattue, quand tout à coup, tout s’éclaire ! J’ai pris le problème dans le mauvais sens ! Il ne faut pas chercher à soulever le canoë, il faut appuyer dessus ! Si j’appuie, avec tout mon poids, tout sera simple ! Youpi, ça va le faire !
Le départ
Puis, à peine remise de ma soutenance universitaire (deux jours avant le départ! Vous imaginez le stress et les nuits blanches! Est-ce que j'ai bien tout prévu???), départ pour le Mont Gerbier des Joncs et le Puy-en-Velay avec une super copine, randos magiques dans ce haut lieu du voyage initiatique...
Puis nous partons longer les bords de Loire en voiture, on fait voir du pays au canoë, histoire de le familiariser avec le fleuve...
Je comptais mettre le canoë à l'eau à la hauteur de St Etienne, vers Montrond, Feurs, et partout le niveau d'eau est trop bas! Première déconvenue... Je commence à comprendre que dans les semaines qui viennent, ça n'est pas moi qui choisirai, mais... la Loire!
On se rabat sur Roanne, et en cherchant un point d'embarquement, on rencontre Pascal, champion d'aviron qui nous donne le bon tuyau pour embarquer. Et depuis, il a fini 5e de la coupe du monde!! Bravo Pascal! On suivra tes exploits en Floride, fin septembre...
Et l'embarquement va être plus compliqué que prévu, le bois est une matière vivante...
Nourrir le rêve, d’abord. Se dire qu'il est possible...
Depuis un WE canoë sur la Loire, je me suis dit que c’était possible. Qu’avec de l’entrainement je pouvais y arriver, que ce n’était pas hors de ma portée. Je me suis achetée une pagaie en bois, parce que c’est plus beau en bois, et pas seulement parce que ça fait une belle déco dans mon salon. Parce que ça me fait rêver…
Et au début, j'ia cherché à faire ce voyage avec quelqu'un: le canoë, ça se fait à deux!!
Or il semblerait qu’il ne se présente personne qui ait envie de partager mes délires… Alors au lieu de chercher quelqu’un qui puisse coller avec mon envie, et avec mes dates d’entrainement et de voyage, à un moment s’est présentée l’évidence : un voyage initiatique, ça se fait seul. Pas avec quelqu’un rencontré au hasard, pas dans la précipitation ou l’angoisse de ne trouver personne. J’ai déjà voyagé seule, dans différents pays, et en France en montagne, ça ne me fait pas peur. Au contraire, c’est là qu’on rencontre le plus les autres ! On va plus vers eux, et ils viennent plus vers nous, parce qu’une personne qui voyage seule, ça intrigue, ça pose des questions, ça donne envie d’avoir des réponses. Alors c’est décidé, je vais voyager seule.
Oui, descendre la Loire me fait rêver, le rêve grandit peu à peu, j’en parle autour de moi, je regarde les livres sur la Loire, ça s’étoffe. Et à force d'en parler à tous les gens que je rencontre, je discute avec Patricia, dont le mari a descendu une partie de la Loire en bateau en bois, il m’en parle avec des étoiles dans les yeux, et me parle de sa bible : La Loire vue du fleuve. Il me le prêtera si je veux. Oui !!
Se préparer physiquement.
Déjà, la découverte de mes petites épaules au cours du WE canoë m’incite à penser que j’ai besoin d’une préparation physique. Je peux pas pagayer pendant un mois sans m’entrainer avant. Direction le club le plus proche, et comme je ne trouve pas de volontaire pour m'accompagner en canoë, je pagaye seule tous les samedis aprèm. Et je me démène, j'apprends petit à petit à diriger le bateau seule, à pagayer droit.
Se préparer mentalement.
La bible de la Loire en canoë, qui enfin parle de canoë, et non seulement de kayak, est LE livre sur le sujet, je trouve tous les renseignements dont j’ai besoin, les points dangereux pour le canoë, les portages, ce à quoi s’attendre, les dangers de la Loire y sont très bien expliqués, tout ce qu’il me faut ! Avec des photos magnifiques qui font rêver, bien évidemment…
Je me souviens aussi d’un conférencier, qui lors d’une conférence sur sa traversée du Groenland, nous avait parlé de sa descente de la Loire, alors je le contacte. Effectivement, il a descendu la Loire, une fois en kayak, et une fois à la nage ! Oui, c’est un sport que je connaissais pas, la nage en eau vive. Il a la gentillesse de répondre à toutes mes questions, ça a l’air simple, bon, ok, ça devrait être jouable…
Ensuite, par magie, je tombe sur un livre dont je reconnais l'auteur: "Aventures en Loire", de Bernard Ollivier, qui a descendu la Loire en canoë, à plus de 70 ans… Sans s’être préparé, avec un certain nombre de mésaventures, dont une météo déplorable, alors, s’il l’a fait… Peut-être que moi aussi je peux !! Bon, il a un autre entrainement physique, j’avais lu son périple sur la route de la soie, moi ça fait deux ans que les seuls éléments de mon corps habitués à bosser, c’est les neurones des FH, alors j’ai du boulot ! Et entre les séances d’entrainement, je relis mes chapitres préférés, les passages qui me touchent le plus, et le rêve avance…
(PS: FH: je suis formatrice et facilitatrice en Facteurs Humains, et les FH, c'est tout plein de choses passionnantes: gestion du stress et de la fatigue, processus de prise de décision, gestion de la prise de risques, des erreurs, et puis tout ce qui est travail en équipe! Un régal, non? Ah, je pourrais en parler pendant des heures...)
Je commence à préparer mon parcours, à partir d’où je pourrais commencer, les étapes que je pourrais faire. C’est encore plus du rêve que de l’organisation, mais ça se concrétise ! Les congés sont posés à mon travail, j’ai décidé de partir pour le WE de l’Ascension, pour faire l’ascension du Mont Gerbier de Jonc ce jour-là, en clin d’œil… Et le niveau d’eau de la Loire devrait être à son meilleur, pas trop haut avec les crues du printemps qui rendraient non navigable, et pas trop bas avec l’étiage en été qui serait trop compliqué à naviguer.
Pour la suite de la préparation physique, je voulais refaire un autre WE, minimum, voire quelques jours, à pagayer, et… La vie passant vite, les journées encore plus, le temps me manque pour organiser ça, car je finis une étude universitaire cette année, en plus de mon travail.
Se préparer socialement, familialement, etc...
Un point important de la réalisation d'un rêve, c'est de savoir à qui le partager et quand. Si vous le partagez au départ, quand il est encore tout fragile, à des personnes qui vont le critiquer, vous décourager, vous casser, ça peut être dur de s'en remettre...
Si vous le partagez plus tard, quand il a déjà un peu mûri en vous, à des personnes qui vont vous soutenir, vous poser des questions, vous renvoyer des aspects auxquels vous n'aviez pas pensé, c'est tout bénéf! Ca peut éviter des cagattes pendant le voyage...
Ca faisait déjà quelques mois que je m'entrainais, j'en ai parlé à des kayakistes dont on m'avait dit qu'ils avaient descendu la Loire, et je me suis pris quelques petites reflexions qui auraient pu me décourager, comme "t'as pas le niveau", "tu vas pas y arriver". J'ai décidé d'y réfléchir: est-ce qu'il pouvait avoir raison? Peut-être que je me lançais dans quelque chose de trop gros pour moi? J'ai posé les risques, les peurs, et j'ai aussi posé en face, la pertinence de celui qui m'avait dit ça: il ne m'avait pas vue pagayer, il ne connaissait rien de moi (ceux qui me connaissent savent à quel point je peux me lancer dans des choses... surprenantes! Et les mener à bout...) M'est venu la raison potentielle de ces critiques: je ne possédait pas le bon vocabulaire... En ayant fait la part des choses, ça donne du recul, ça évite de prendre les peurs des autres pour soi, ou de ne rien écouter non plus! Certains avertissements valent aussi leur pesant d'or...
Et j'ia réalisé certains très grands rêves, grâce au soutien de certaines personnes. Merci pour toujours!
Se préparer matériellement.
Grâce à notre super revue "carnets d'aventures", j'ai vu qu'il existait des lyophilisés, alors, banco, ce sera moins lourd. Quelques matériels à acheter, à emprunter... Je cherche depuis janvier un gilet de sauvetage où je serais confortable, nulle part je ne trouve de modèle pour femme!! Le seul truc qui change quand ils ont la prétention de vendre un modèle femme, c'est qu'il est rose!! J'en deviens verte de rage... Finalement une de mes collègues FH qui va bientôt faire quelques 8000m dans l'Himalaya et qui cherche des moon boots pour ramener le même nombre d'orteils, m'entraine sur une pente glissante: les boutiques parisiennes consacrées au trekking et sports nature, et là, magie, je découvre LE gilet de sauvetage, en plus, il va bien dans la nature: il est vert!!
Rendue 2 semaines avant le départ, je n'ai toujours pas trouvé de canoë! Je commence un peu à paniquer, c'est quand même un point essentiel pour le voyage...
Puis j'ai un contact avec quelqu'un qui possède un canoë en bois, le courant passe, il me raconte l’histoire du canoë, j’adore ! Il l’a récupéré dans un état pitoyable, certaines parties étaient pourries, cassées, et il l’a tout retapé, remis en état de naviguer, poncé, vernis, embelli… On prévoit alors de se rencontrer pour essayer le canoë, et j'ai du coup la chance de goûter les marais vendéens, il n'y a pas de courant mais ça donne un avant-goût de ce qui m'attend.
Je voulais louer ce magnifique canoë, mais son reconstructeur ne veut rien savoir. En plus, il me prête une paire de roues... Je suis quand même embêtée de juste « emprunter » le canoë et ses roues, mais il ne veut rien entendre, je sens sa générosité de cœur dans cette offre, toute sa philosophie de vie s’y retrouve : nous allons faire du « canoë-sharing » !
Le moment où on monte le canoë sur le toit de la voiture m’émeut : ça y est, le voyage devient concret !
Quelques jours plus tard, un ami me fait faire du CTT : canoë-tout terrain ! Dans son terrain vague, plein de creux, de bosses, et de voies ferrées qui trainent, j’enchaine les tractages, les passages d’obstacles, et je constate que mon idée de canoë-4 roues au lieu de 2, à l’origine pour soulager mes petits bras, est difficile à appliquer : ça passe mal, ça tourne mal, je force… Et il faut soulever le canoë à chaque fois. Je me décourage, lui rigole, oui, il m’avait dit que 4 roues ça allait être compliqué, et j’ai une petite tendance têtue… Je rentre chez moi abattue, quand tout à coup, tout s’éclaire ! J’ai pris le problème dans le mauvais sens ! Il ne faut pas chercher à soulever le canoë, il faut appuyer dessus ! Si j’appuie, avec tout mon poids, tout sera simple ! Youpi, ça va le faire !
Le départ
Puis, à peine remise de ma soutenance universitaire (deux jours avant le départ! Vous imaginez le stress et les nuits blanches! Est-ce que j'ai bien tout prévu???), départ pour le Mont Gerbier des Joncs et le Puy-en-Velay avec une super copine, randos magiques dans ce haut lieu du voyage initiatique...
Puis nous partons longer les bords de Loire en voiture, on fait voir du pays au canoë, histoire de le familiariser avec le fleuve...
Je comptais mettre le canoë à l'eau à la hauteur de St Etienne, vers Montrond, Feurs, et partout le niveau d'eau est trop bas! Première déconvenue... Je commence à comprendre que dans les semaines qui viennent, ça n'est pas moi qui choisirai, mais... la Loire!
On se rabat sur Roanne, et en cherchant un point d'embarquement, on rencontre Pascal, champion d'aviron qui nous donne le bon tuyau pour embarquer. Et depuis, il a fini 5e de la coupe du monde!! Bravo Pascal! On suivra tes exploits en Floride, fin septembre...
Et l'embarquement va être plus compliqué que prévu, le bois est une matière vivante...
Initiation N°1
En fait, le fleuve, c’est comme la vie. Il y a des rochers.
Il y a des rochers dans le passage, qui sont parfois annoncés avec des petits remous, des frisottis à la surface, et parfois pas.
Il y a aussi des frisottis sans rochers dessous.
Allez savoir quoi faire avec ces frisottis ou pas!! Etre attentif et vigilant en permanence? Profiter et se casser le nez au premier rocher? Comment conjuguer la beauté du voyage avec cette attention de tous les instants?
Parce que pour l'instant, pour être vraiment honnête, j'ai plus stressé que pris plaisir.
Ok c'est plus simple de prendre plaisir quand tout est calme devant, qu'on a de l'eau sous la quille, et pas de gros blocs de roche incroyables qui se cachent... Mais quand c'est comme ça, il va falloir trouver un moyen de se détendre avec les frisottis, les gros blocs de roche, les cailloux de partout quand c'est pas des barres de fer qui traînent...
La conclusion de la journée d'hier, c'était : que du stress, avant de me poser sur mon île...
Alors je me suis dit le soir dans ma récapitulation de la journée (exercice méditatif depuis plus de 5 ans, qui m'aide beaucoup à évoluer), je peux pas continuer comme ça, je suis pas ici pour me faire des longues journées de stress, il va falloir que je trouve un moyen de me détendre.
Je me suis entraînée à ça aujourd'hui...
Un des trucs que j'ai trouvés, c'est de mettre à plat mes peurs, puis de penser en termes de confiance: si je me renverse, je saurai faire face; si j'abime le canoë, je ferai face et j´assumerai mes responsabilités, si je perds tout mon chargement, et bien je sais nager et je saurai rentrer à Nantes autrement, etc.
Vous voyez le principe.
Ce soir, l'épreuve du feu: je suis arrivée à Chambilly sur une barre de gros rochers invisible de loin, et avec trop de courant pour trouver la berge: du coup, j'ai dirigé le canoë pour passer entre deux gros rochers, et je me suis tombée dans des gros remous creux derrière, en plus en travers. Je me suis vue renversée, et tout de suite j'ai pensé: "garder l'équilibre du bateau!" J'ai équilibré le canoë et dans les remous la pagaie a sauté! Le canoë a été pas loin du tout de se retourner, mais l'équilibrage l'a remis d'aplomb. Et après plusieurs stratégies et quelques centaines de mètres, j'ai réussi à récupérer la pagaie, merci les pagaies en double!!
Bref, une grosse trouille qui m'a fait boire presque un litre d'eau (oui, quand on a très peur, on a très soif après!)
Mais j'ai fait face.
Et sur la Loire comme dans la vie, il y a toujours des imprévus, des gros rochers ou des galères, et c'est aussi nos expériences qui bâtissent notre expérience, et notre expérience qui construit qui on est.
Et on aura toujours à faire face, à tout ce qu'on ne peut anticiper...
Anticiper ce qu'on peut, avec une attention raisonnable, et faire face à ce qui arrive avec de la confiance en la capacité à faire face, c'est exactement ce qu’on propose dans les stages Facteurs Humains, non?
Je ne sais plus de qui est la phrase: fais attention à tes pensées, elles de viennent des actes, fais attention à tes actes, ils deviennent des habitudes, fais attention à tes habitudes, elles deviennent ta personnalité, et fais attention à ta personnalité, elle devient ton destin.
Alors je vais continuer de m'entraîner à la confiance... Entre autres!
Parce qu’admirer les libellules et les vols de cigogne, c'est pas mal non plus!
En fait, le fleuve, c’est comme la vie. Il y a des rochers.
Il y a des rochers dans le passage, qui sont parfois annoncés avec des petits remous, des frisottis à la surface, et parfois pas.
Il y a aussi des frisottis sans rochers dessous.
Allez savoir quoi faire avec ces frisottis ou pas!! Etre attentif et vigilant en permanence? Profiter et se casser le nez au premier rocher? Comment conjuguer la beauté du voyage avec cette attention de tous les instants?
Parce que pour l'instant, pour être vraiment honnête, j'ai plus stressé que pris plaisir.
Ok c'est plus simple de prendre plaisir quand tout est calme devant, qu'on a de l'eau sous la quille, et pas de gros blocs de roche incroyables qui se cachent... Mais quand c'est comme ça, il va falloir trouver un moyen de se détendre avec les frisottis, les gros blocs de roche, les cailloux de partout quand c'est pas des barres de fer qui traînent...
La conclusion de la journée d'hier, c'était : que du stress, avant de me poser sur mon île...
Alors je me suis dit le soir dans ma récapitulation de la journée (exercice méditatif depuis plus de 5 ans, qui m'aide beaucoup à évoluer), je peux pas continuer comme ça, je suis pas ici pour me faire des longues journées de stress, il va falloir que je trouve un moyen de me détendre.
Je me suis entraînée à ça aujourd'hui...
Un des trucs que j'ai trouvés, c'est de mettre à plat mes peurs, puis de penser en termes de confiance: si je me renverse, je saurai faire face; si j'abime le canoë, je ferai face et j´assumerai mes responsabilités, si je perds tout mon chargement, et bien je sais nager et je saurai rentrer à Nantes autrement, etc.
Vous voyez le principe.
Ce soir, l'épreuve du feu: je suis arrivée à Chambilly sur une barre de gros rochers invisible de loin, et avec trop de courant pour trouver la berge: du coup, j'ai dirigé le canoë pour passer entre deux gros rochers, et je me suis tombée dans des gros remous creux derrière, en plus en travers. Je me suis vue renversée, et tout de suite j'ai pensé: "garder l'équilibre du bateau!" J'ai équilibré le canoë et dans les remous la pagaie a sauté! Le canoë a été pas loin du tout de se retourner, mais l'équilibrage l'a remis d'aplomb. Et après plusieurs stratégies et quelques centaines de mètres, j'ai réussi à récupérer la pagaie, merci les pagaies en double!!
Bref, une grosse trouille qui m'a fait boire presque un litre d'eau (oui, quand on a très peur, on a très soif après!)
Mais j'ai fait face.
Et sur la Loire comme dans la vie, il y a toujours des imprévus, des gros rochers ou des galères, et c'est aussi nos expériences qui bâtissent notre expérience, et notre expérience qui construit qui on est.
Et on aura toujours à faire face, à tout ce qu'on ne peut anticiper...
Anticiper ce qu'on peut, avec une attention raisonnable, et faire face à ce qui arrive avec de la confiance en la capacité à faire face, c'est exactement ce qu’on propose dans les stages Facteurs Humains, non?
Je ne sais plus de qui est la phrase: fais attention à tes pensées, elles de viennent des actes, fais attention à tes actes, ils deviennent des habitudes, fais attention à tes habitudes, elles deviennent ta personnalité, et fais attention à ta personnalité, elle devient ton destin.
Alors je vais continuer de m'entraîner à la confiance... Entre autres!
Parce qu’admirer les libellules et les vols de cigogne, c'est pas mal non plus!
Initiation N°2
L'autonomie, c'est pas faire les choses tout seul.
J'en reviens pas de toute l'aide que j'ai eue, et que je viens d'avoir...
Passant à côté de St Yan, j'ai fait un petit coucou à une super collègue FH qui y travaille, qui s’est faite remplacer au travail pour venir me voir, et qui m'a fait rencontrer son chef, Nicolas, kayakiste. Qui m'a donné un coup de main immense, je sais pas comment j'aurais pu passer les rochers sous le pont canal de Digoin sans lui! Enfin, passer les rochers sous le pont canal est une manière de parler, parce que je les ai pas passés!! J'ai dû les prendre sur le côté...
C’était mon premier barrage, et je pensais naïvement que lorsqu’il y avait un barrage, tout était prévu à côté pour passer facilement en kayak ou canoë. J’ai vu arriver Gwen et Nicolas, pimpants et élégants, contrairement à moi qui étais en mode aventure, pleine de vase et de sueur, et nous nous sommes retrouvés dans le champ en amont du pont canal, plein de bosses et de creux, impossible à rouler pour Canoë. La connaissance du lieu de Nicolas et sa pratique de kayakiste ont été précieuses : Rive gauche, il y avait de la place pour passer le canoë à la corde, jusqu’à un certain point : le barrage rocheux. Mais pourquoi donc ils ont mis tous ces rochers derrière le pont ?!? Bref, il fallait débarquer au bord d’une rive, et rembarquer en aval des blocs rocheux. Nicolas a donc été se transformer de chef contrôleur en kayakiste, et Gwen est restée discuter avec moi jusqu’à devoir aller remplacer son collègue sympa au micro.
Nicolas est arrivé par l’eau avec son kayak de compétition, top léger, top court, un kayak idéal pour surfer sur les vagues les plus folles, et dans les rapides les plus tempétueux, le genre de petit bolide qui pourrait faire des loopings sur l’eau. Mais pour Canoë, en allant voir l’endroit pour rembarquer, il y avait un dénivelé de la taille d’un homme entre l’herbe et la rive !! Comment passer un tel dénivelé seule ? Seule je n’aurais pas pu. Donc avec Nicolas, on a déchargé, transporté, fait glisser Canoë du haut de ce talus mal placé, et rechargé. Nicolas et son bolide de compétition sont passés par une petite passe entre les rochers, qui demandait agilité, loopings, et réactivité, que je suis loin d’avoir, même si j’avais été dans un kayak semblable. Ca demandait aussi un casque de sécurité…
Donc on a pagayé ensemble jusqu’au camping situé un peu plus loin, et échangé sur différents sujets : les randonnées nautiques, les collègues que l’on connaissait tous les deux, les FH, et mon chargement un peu lourd (j’ai pris des tonnes d’eau potable, mais au vu des 3 à 5 litres quotidiens…).
Et le lendemain, où je me suis retrouvée au boulot à St Yan, Nicolas me parlant d'un périple en vélo-kayak qu'il avait fait avec des amis, je lui dis "tiens, ça me fait penser à un article que j'ai lu dans la revue Carnets d'Aventure", il me répond: "Oui c'était moi!" Et oui, Carnets d'aventure relie les voyageurs...
Et Nicolas m'a mise en contact avec Serge, oceiste confirmé, (il aime les canoës comme celui qui voyage avec moi, il en a deux!!) et ce matin, j'ai eu droit à des supers conseils sur le centrage de mon chargement, sur la manière de se positionner à genoux (ca y est, vous pouvez définitivement m'appeler Pocahontas!!😂), sur les risques spécifiques au canoë en Loire et comment les déjouer, bref, tout ce qu’il me manquait sur le canoë en bois!
Et Serge m'a amenée voir Jean-Pierre, patron d'un magasin d'accastillage pour avoir plus de corde pour les passages difficiles, et Jean-Pierre m'a fait don de sa corde personnelle!
Vous voyez le truc??
Donc je suis vraiment touchée par toute cette chaîne humaine... Ça va droit au cœur!
Et faire les choses en autonomie (avec mes tonnes d'eau minérale...) et en solo, c'est bien, et en même temps, les faire dans un maillon de cette grande chaîne humaine, c'est mille fois plus riche !
L'autonomie, c'est pas faire les choses tout seul.
J'en reviens pas de toute l'aide que j'ai eue, et que je viens d'avoir...
Passant à côté de St Yan, j'ai fait un petit coucou à une super collègue FH qui y travaille, qui s’est faite remplacer au travail pour venir me voir, et qui m'a fait rencontrer son chef, Nicolas, kayakiste. Qui m'a donné un coup de main immense, je sais pas comment j'aurais pu passer les rochers sous le pont canal de Digoin sans lui! Enfin, passer les rochers sous le pont canal est une manière de parler, parce que je les ai pas passés!! J'ai dû les prendre sur le côté...
C’était mon premier barrage, et je pensais naïvement que lorsqu’il y avait un barrage, tout était prévu à côté pour passer facilement en kayak ou canoë. J’ai vu arriver Gwen et Nicolas, pimpants et élégants, contrairement à moi qui étais en mode aventure, pleine de vase et de sueur, et nous nous sommes retrouvés dans le champ en amont du pont canal, plein de bosses et de creux, impossible à rouler pour Canoë. La connaissance du lieu de Nicolas et sa pratique de kayakiste ont été précieuses : Rive gauche, il y avait de la place pour passer le canoë à la corde, jusqu’à un certain point : le barrage rocheux. Mais pourquoi donc ils ont mis tous ces rochers derrière le pont ?!? Bref, il fallait débarquer au bord d’une rive, et rembarquer en aval des blocs rocheux. Nicolas a donc été se transformer de chef contrôleur en kayakiste, et Gwen est restée discuter avec moi jusqu’à devoir aller remplacer son collègue sympa au micro.
Nicolas est arrivé par l’eau avec son kayak de compétition, top léger, top court, un kayak idéal pour surfer sur les vagues les plus folles, et dans les rapides les plus tempétueux, le genre de petit bolide qui pourrait faire des loopings sur l’eau. Mais pour Canoë, en allant voir l’endroit pour rembarquer, il y avait un dénivelé de la taille d’un homme entre l’herbe et la rive !! Comment passer un tel dénivelé seule ? Seule je n’aurais pas pu. Donc avec Nicolas, on a déchargé, transporté, fait glisser Canoë du haut de ce talus mal placé, et rechargé. Nicolas et son bolide de compétition sont passés par une petite passe entre les rochers, qui demandait agilité, loopings, et réactivité, que je suis loin d’avoir, même si j’avais été dans un kayak semblable. Ca demandait aussi un casque de sécurité…
Donc on a pagayé ensemble jusqu’au camping situé un peu plus loin, et échangé sur différents sujets : les randonnées nautiques, les collègues que l’on connaissait tous les deux, les FH, et mon chargement un peu lourd (j’ai pris des tonnes d’eau potable, mais au vu des 3 à 5 litres quotidiens…).
Et le lendemain, où je me suis retrouvée au boulot à St Yan, Nicolas me parlant d'un périple en vélo-kayak qu'il avait fait avec des amis, je lui dis "tiens, ça me fait penser à un article que j'ai lu dans la revue Carnets d'Aventure", il me répond: "Oui c'était moi!" Et oui, Carnets d'aventure relie les voyageurs...
Et Nicolas m'a mise en contact avec Serge, oceiste confirmé, (il aime les canoës comme celui qui voyage avec moi, il en a deux!!) et ce matin, j'ai eu droit à des supers conseils sur le centrage de mon chargement, sur la manière de se positionner à genoux (ca y est, vous pouvez définitivement m'appeler Pocahontas!!😂), sur les risques spécifiques au canoë en Loire et comment les déjouer, bref, tout ce qu’il me manquait sur le canoë en bois!
Et Serge m'a amenée voir Jean-Pierre, patron d'un magasin d'accastillage pour avoir plus de corde pour les passages difficiles, et Jean-Pierre m'a fait don de sa corde personnelle!
Vous voyez le truc??
Donc je suis vraiment touchée par toute cette chaîne humaine... Ça va droit au cœur!
Et faire les choses en autonomie (avec mes tonnes d'eau minérale...) et en solo, c'est bien, et en même temps, les faire dans un maillon de cette grande chaîne humaine, c'est mille fois plus riche !
Initiation N° 3
S’abriter des orages… Et les laisser passer.
Pleine de gratitude envers tout ce qui vient de se passer, je m’apprête à vivre mon premier orage. Je m’abrite sous un arbrisseau avant qu’il pleuve, il y a plein de grands et forts arbres dans les parages, alors la foudre ne peut décemment pas venir frapper ce jeune et tendre abri. Il pleut quelques gouttes, un orage vraiment tout mignon, ça tonne dans le très loin, puis le soleil revient et je reprends le pagayage toute confiante.
En fin d’après-midi, un autre orage menace, alors je prends refuge sur une magnifique ile rocheuse, en attendant la pluie. Avant, un petit coup de fil aux neveux, et pendant que nous discutons, je vois l’orage se rapprocher, il faut que je raccroche. J’éteins complètement le téléphone, je m’équipe pour traverser la tempête : il fait très chaud pour l’instant mais ça va se rafraichir : polaire en dessous, veste imperméable au-dessus, mon TARP me sert de bâche pour le chargement de Canoë, et je remonte mon short, pour éviter de prendre l’eau et le froid. Je m’assieds sur mon petit banc de méditation, je rabats ma capuche, et les premières gouttes s’écrasent violemment au sol, sur les arbustes autour et sur moi. Je reste stoïque, je médite, effectivement la température chute, j’ai eu raison de mettre la polaire, le vent se lève, le tonnerre tonne, les éclairs tombent.
Mes jambes ont un peu froid, mais c’est secondaire, les organes vitaux sont au chaud et au sec, tout va bien. La pluie tombe à verse, le vent souffle, le tonnerre tonne, les éclairs tombent.
Je repense à ce voyage, à la discussion avec les neveux, au soutien de mon frère qui regarde mon parcours avec ses enfants, ça me tient chaud au cœur. La pluie tombe à seaux, le vent hurle, le tonnerre tonne de plus belle, les éclairs tombent dans les environs.
Et comme si ça ne suffisait pas, un groupe de rock s’installe derrière la colline en face, et me hurle dans les oreilles. Ils vont réussir à gueuler plus fort que le tonnerre, c’est garanti. Le temps passe, la pluie persiste et signe, le vent me refroidit un peu, le tonnerre lutte pour jouer plus fort que les rockeurs, mais les éclairs toujours plus proches ne leur font pas peur, ils continuent leur vacarme.
Une voiture qui laisse ses fenêtres ouvertes ? Une maison derrière la berge haute ? Une grange où des jeunes font une soirée répèt ? Ils vont bien finir par arrêter, ça ne peut pas durer toute la soirée. J’étais ok pour méditer sur l’orage, mais là, les hurlements de rock sous l’orage, je dis non !! Et pourtant ça dure, mes souhaits ne sont pas exaucés. La pluie tombe encore, le vent souffle toujours, le tonnerre tonne fréquemment, et les éclairs continuent de tomber.
Le prochain éclair est pour la colline d’en face. Mince, l’orage n’a pas l’air de beaucoup se déplacer… Il commence à être tard, il faudrait que je monte le camp. Mais je peux pas monter le camp sous cette pluie torrentielle, ni planter la tente avec ses arceaux en métal sous les éclairs… Comment faire ? Et la musique toujours à fond, pitié ! Ah, ça commence à baisser, super ! Parce que la pluie tombe toujours, le vent souffle encore, le tonnerre tonne sans discontinuer, et les éclairs tombent, proches et puissants.
J’aimerais les prendre en photo tellement ils sont beaux. Mais mettre mon appareil photo sous cette pluie battante n’est pas envisageable. J’ia un peu froid. Je reste stoïque, malgré les heures qui passent, je n’ai pas bougé depuis le départ. De temps à autre, j’étire une jambe, mais cette position de méditation est très confortable et me permet de méditer longtemps sans douleur. Ahhhh, le concert reprend ! Non, l’orage, je veux bien, la pluie et le vent aussi, mais pitié, pas les hurlements en même temps ! Ma capacité de résistance a des limites ! Et le temps passe… Je peux pas rester toute cette nuit sous l’orage, avec ces hurlements dans les oreilles. Mais pour rester cette nuit, il faudrait pouvoir monter la tente. Or, la pluie continue à pleuvoir, le vent à venter, le tonnerre à tonner, et les éclairs à éclairer.
Un peu d’éclaircie derrière les nuages noirs : peut-être une accalmie ? Je guette, avec anxiété. Mais derrière le ciel plus clair se profilent des TCU : Towering Cumulus, qui ne présagent rien de mieux que de la pluie, du vent, du tonnerre, des éclairs.
Bon, je fais quoi, là ? Le soir tombe, il flotte, il vente, il tonne, et ça foudroie à tire-larigot.
Impossible de monter la tente, et je peux pas passer la nuit sous la flotte, je vais me refroidir malgré mon équipement. Il y a un village derrière le talus, au loin, devant la colline, et si j’allais demander de l’aide ? Ils ont peut-être une chambre d’hôtes vide en basse saison ? Sans concert de rock sous la fenêtre… Parce que là, entre la pluie, le vent, le tonnerre et les éclairs, j’en ai ma claque.
Ca fait des heures que je suis plantée là, des heures que j’attends que ça se calme, et ça ne se calme pas. Le ciel devient de plus en plus noir, bientôt je ne pourrai plus rien faire et surtout pas naviguer, alors maintenant qu’il n’y a pas trop d’éclairs, c’est peut-être le moment de bouger et d’aller demander de l’aide. D’ailleurs, dans son livre, Bernard Ollivier a aussi eu l’occasion de demander de l’aide quand il ne trouvait pas d’hébergement, et que la météo était horrible. Là aussi on peut vraiment dire que la météo est horrible. Donc, ok, ma décision est prise, et mise en actes immédiatement, pas de temps à perdre pour arriver au village avant la nuit : je reprends l’eau, et je me dirige vers la berge opposée, et après le creux du S, je trouve exactement ce qu’il me faut : un micro passage derrière des herbes, devant un peu de forêt. Il y aura bien un chemin pour aller jusqu’au village, forcément. La pluie s’est un peu calmée pour me laisser passer, le vent s’adoucit, le tonnerre tonne moins, les éclairs éclaircissent moins.
Pour un peu, je regretterais ma décision, il n’y a aucun chemin, je taille le mien à coups de machette : oui, dans mon chargement il y avait une machette… Ahah, la bonne blague : voici que faire d’une pagaie dans les plans foireux : toujours la garder sur soi, bien calée au fond de sa poche, au cas où on rencontrerait au détour d’un chemin, un ours affamé, un loup qui a soif d’une jolie brebis ou un sanglier puant. Et toujours avec une pagaie sur soi pour s’en servir comme d’une machette dans la jungle des forêts où aucun chemin n’est tracé. Je suis en short, pieds nus dans mes sandales, et les ronces se battent avec les orties pour savoir qui sera la plus belle, la plus grande, la plus coupante ou irritante. Donc toujours avoir une machette sur soi pour faire du canoë sous les orages.
Enfin, je débouche dans un champ. Mais ce n’est pas fini ! Le champ est immense, et le village plus loin que prévu depuis l’ile, où je ne voyais pas grand-chose en fin de compte. Je marche, je galope, armée de ma pagaie et de mon gilet de sauvetage, au moins je suis crédible dans ma demande d’aide… Enfin un chemin, qui me mène vers le village. Là, la première maison a l’air occupée, un homme à l’intérieur, je regarde un peu plus loin pour trouver une femme mais aucune lumière, je reviens donc sur mes pas, et je demande au monsieur s’il connait quelqu’une qui pourrait m’héberger quand je vois une femme arriver dans le coin de la pièce. Avec leur étonnement bien légitime, je réponds à leurs questions :
-D’où vous venez ?
-De Nantes
-De Nantes ? Mais c’est pas le bon sens ?
-Euh non, j’ai embarqué à Roanne, et je vais vers Nantes !
-Et vous êtes vraiment en canoë ?
-Oui je l’ai laissé dans la forêt dans cette direction.
-Dans cette direction, mais c’est pas par là qu’il faut passer, c’est là-bas qu’il y a l’endroit pour les canoës-kayaks ! (en ‘indiquant la direction opposée…) Bon, attendez, on va voir ça.
Malgré mes incohérences, sa femme me fait rentrer et téléphone à la Maire pour savoir s’il y a des chambres d’hôtes dans le village. La réponse est négative, au moins pour cette année, il y en a en construction. Ils discutent un moment entre eux, puis l’homme me dit qu’il va aller voir avec moi pour le canoë, qu’ils vont m’héberger pour cette nuit. Je leur sauterais au cou de joie ! Nous embarquons dans sa voiture, il me pose un peu plus de questions et a du mal à comprendre mon arrivée : effectivement, il y a un endroit à l’opposé de ma forêt sans chemins, spécifique pour les bivouacs en bord de Loire, bref, pourquoi je suis allée me fourrer là ? Je retrouve le chemin que j’ai tracé, et quand nous arrivons près de Canoë, il me croit, je récupère quelques vêtements secs pour la nuit, et il m’aide à remonter Canoë et l’arrimer plus solidement que ce que j’avais fait, c’est vrai, il a raison, les pluies d’orage peuvent faire monter le niveau de l’eau rapidement.
Jean-Paul est ancien kayakiste, le seul des environs ! Il m’emmène voir l’endroit où les randonneurs nautiques montent le bivouac, alors c’est vrai, c’est beaucoup plus sympa et accessible que ma forêt sans chemin, il y a un foyer pour faire un feu de camp, bref, le top du top du bivouac. Je ne l’ai pas vu de la Loire. Peut-être que j’étais occupée à autre chose, mais en fait, c’est plus en amont, et à ce moment-là, je ne cherchais pas du tout un bivouac, je regardais les nuages : non je ne rêvassais pas !! Et je suis passée près de l’autre rive, pour suivre le courant, n’est-ce pas… Le concert de rock se poursuit, plus faible au niveau sonore que sur l’ile, il parait que c’est la première répétition d’un voisin, c’est encore ma sacrée chance avec les concerts qui cohabitent très bien avec mon envie de silence… Le soleil est magnifique, nous avons le plus beau coucher de soleil depuis mon départ, le ciel est en feu, il flamboie de toutes ses forces, et envoie des rayons roses et rouge fluo dans toute l’atmosphère. Après avoir inondé, soufflé, tonné, et foudroyé toute la vallée, l’orage est passé. Un petit pincement au cœur de ne pas être restée plus longtemps sur l’ile, au lieu de venir embêter ces gentils voisins du fleuve… Mais ça, c’est le biais rétrospectif : je ne pouvais pas deviner la suite de l’histoire avec les informations que j’avais quand je suis partie de l’ile, et sur le moment, c’était la décision la plus raisonnable à prendre avec le soir et les nuages d’orages qui arrivaient à nouveau.
Au retour chez lui, mon hôte me montre l’échelle des crues du fleuve, qui a été réalisée d’après sa maison, où les différents niveaux de montée des eaux ont été notifiés, à chaque débordement, et ils sont nombreux. A l’intérieur, Marie-Christine m’a préparé à manger, à dormir, bref, je suis traitée comme un coq en pâte, même si les critiques pleuvent :
-Quand même, quand je pense que vous êtes seule sur le fleuve, c’est pas du tout raisonnable ! Si j’étais votre mère, je vous flanquerais la fessée ! Vous travaillez dans quoi ?
-Dans la formation aux risques…
-Encore mieux ! C’est ça que vous leur montrez, aller seul faire du canoë sous l’orage ??
Petit à petit, nous faisons connaissance, nous regardons une émission des Racines et des Ailes, en discutant de différents sujets, et je me sens en totale sécurité, au chaud, au sec, sous la chaleur humaine et bienveillante de mes hôtes... Jean-Paul m'explique pourquoi il y a ces rochers sous certains ponts: ils sont vieux, et la force de la Loire finit par emporter certaines pierres de leurs piles, qui menacent de faire effondrer le pont. La seule solution qui a été trouvée a été de casser la force du courant avec ces barres de rochers, pour limiter l'érosion. Bon, au moins, je peux comprends intellectuellement, même si je regrette bien les conséquences pour la navigation...
Le lendemain, après une magnifique nuit de sommeil tellement récupératrice que je serais bien restée une nuit de plus, ils me chouchoutent tant et bien, et me remmènent jusqu’au canoë, avec force conseils pour la suite du périple : conseils de connaisseur de Jean-Paul sur les difficultés nautiques à venir, conseils de Marie-Christine sur les dangers incroyables que je cours à faire ce voyage seule qu’il vaudrait mieux que je rentre tout de suite en train chez mes parents, mais voyant mon obstination, elle a une mission pour moi : leur envoyer une carte quand j’arriverai à Nantes ! En attendant, j’ai même le numéro de téléphone en cas de pépin, valable jusque la Charité, après ils n’ont plus autant de connaissances prêtes à secourir une océiste trempée par les orages !
Une petite question avant l’embarquement, sur mon âge, et le résultat est direct : « Et bien, vous venez de prendre 10 ans de plus en quelques secondes ! On avait fait un petit pari hier soir… » Nous nous quittons avec beaucoup de chaleur, après des embrassades et des remerciements bien mérités pour leur hospitalité et leur gentillesse.
Le temps est clair, les nuages hauts dans le ciel, la menace de hier soir semble lointaine.
L’orage est passé.
Je suis vivante.
Et en plus, j’ai rencontré des gens supers. Merci l’orage.
S’abriter des orages… Et les laisser passer.
Pleine de gratitude envers tout ce qui vient de se passer, je m’apprête à vivre mon premier orage. Je m’abrite sous un arbrisseau avant qu’il pleuve, il y a plein de grands et forts arbres dans les parages, alors la foudre ne peut décemment pas venir frapper ce jeune et tendre abri. Il pleut quelques gouttes, un orage vraiment tout mignon, ça tonne dans le très loin, puis le soleil revient et je reprends le pagayage toute confiante.
En fin d’après-midi, un autre orage menace, alors je prends refuge sur une magnifique ile rocheuse, en attendant la pluie. Avant, un petit coup de fil aux neveux, et pendant que nous discutons, je vois l’orage se rapprocher, il faut que je raccroche. J’éteins complètement le téléphone, je m’équipe pour traverser la tempête : il fait très chaud pour l’instant mais ça va se rafraichir : polaire en dessous, veste imperméable au-dessus, mon TARP me sert de bâche pour le chargement de Canoë, et je remonte mon short, pour éviter de prendre l’eau et le froid. Je m’assieds sur mon petit banc de méditation, je rabats ma capuche, et les premières gouttes s’écrasent violemment au sol, sur les arbustes autour et sur moi. Je reste stoïque, je médite, effectivement la température chute, j’ai eu raison de mettre la polaire, le vent se lève, le tonnerre tonne, les éclairs tombent.
Mes jambes ont un peu froid, mais c’est secondaire, les organes vitaux sont au chaud et au sec, tout va bien. La pluie tombe à verse, le vent souffle, le tonnerre tonne, les éclairs tombent.
Je repense à ce voyage, à la discussion avec les neveux, au soutien de mon frère qui regarde mon parcours avec ses enfants, ça me tient chaud au cœur. La pluie tombe à seaux, le vent hurle, le tonnerre tonne de plus belle, les éclairs tombent dans les environs.
Et comme si ça ne suffisait pas, un groupe de rock s’installe derrière la colline en face, et me hurle dans les oreilles. Ils vont réussir à gueuler plus fort que le tonnerre, c’est garanti. Le temps passe, la pluie persiste et signe, le vent me refroidit un peu, le tonnerre lutte pour jouer plus fort que les rockeurs, mais les éclairs toujours plus proches ne leur font pas peur, ils continuent leur vacarme.
Une voiture qui laisse ses fenêtres ouvertes ? Une maison derrière la berge haute ? Une grange où des jeunes font une soirée répèt ? Ils vont bien finir par arrêter, ça ne peut pas durer toute la soirée. J’étais ok pour méditer sur l’orage, mais là, les hurlements de rock sous l’orage, je dis non !! Et pourtant ça dure, mes souhaits ne sont pas exaucés. La pluie tombe encore, le vent souffle toujours, le tonnerre tonne fréquemment, et les éclairs continuent de tomber.
Le prochain éclair est pour la colline d’en face. Mince, l’orage n’a pas l’air de beaucoup se déplacer… Il commence à être tard, il faudrait que je monte le camp. Mais je peux pas monter le camp sous cette pluie torrentielle, ni planter la tente avec ses arceaux en métal sous les éclairs… Comment faire ? Et la musique toujours à fond, pitié ! Ah, ça commence à baisser, super ! Parce que la pluie tombe toujours, le vent souffle encore, le tonnerre tonne sans discontinuer, et les éclairs tombent, proches et puissants.
J’aimerais les prendre en photo tellement ils sont beaux. Mais mettre mon appareil photo sous cette pluie battante n’est pas envisageable. J’ia un peu froid. Je reste stoïque, malgré les heures qui passent, je n’ai pas bougé depuis le départ. De temps à autre, j’étire une jambe, mais cette position de méditation est très confortable et me permet de méditer longtemps sans douleur. Ahhhh, le concert reprend ! Non, l’orage, je veux bien, la pluie et le vent aussi, mais pitié, pas les hurlements en même temps ! Ma capacité de résistance a des limites ! Et le temps passe… Je peux pas rester toute cette nuit sous l’orage, avec ces hurlements dans les oreilles. Mais pour rester cette nuit, il faudrait pouvoir monter la tente. Or, la pluie continue à pleuvoir, le vent à venter, le tonnerre à tonner, et les éclairs à éclairer.
Un peu d’éclaircie derrière les nuages noirs : peut-être une accalmie ? Je guette, avec anxiété. Mais derrière le ciel plus clair se profilent des TCU : Towering Cumulus, qui ne présagent rien de mieux que de la pluie, du vent, du tonnerre, des éclairs.
Bon, je fais quoi, là ? Le soir tombe, il flotte, il vente, il tonne, et ça foudroie à tire-larigot.
Impossible de monter la tente, et je peux pas passer la nuit sous la flotte, je vais me refroidir malgré mon équipement. Il y a un village derrière le talus, au loin, devant la colline, et si j’allais demander de l’aide ? Ils ont peut-être une chambre d’hôtes vide en basse saison ? Sans concert de rock sous la fenêtre… Parce que là, entre la pluie, le vent, le tonnerre et les éclairs, j’en ai ma claque.
Ca fait des heures que je suis plantée là, des heures que j’attends que ça se calme, et ça ne se calme pas. Le ciel devient de plus en plus noir, bientôt je ne pourrai plus rien faire et surtout pas naviguer, alors maintenant qu’il n’y a pas trop d’éclairs, c’est peut-être le moment de bouger et d’aller demander de l’aide. D’ailleurs, dans son livre, Bernard Ollivier a aussi eu l’occasion de demander de l’aide quand il ne trouvait pas d’hébergement, et que la météo était horrible. Là aussi on peut vraiment dire que la météo est horrible. Donc, ok, ma décision est prise, et mise en actes immédiatement, pas de temps à perdre pour arriver au village avant la nuit : je reprends l’eau, et je me dirige vers la berge opposée, et après le creux du S, je trouve exactement ce qu’il me faut : un micro passage derrière des herbes, devant un peu de forêt. Il y aura bien un chemin pour aller jusqu’au village, forcément. La pluie s’est un peu calmée pour me laisser passer, le vent s’adoucit, le tonnerre tonne moins, les éclairs éclaircissent moins.
Pour un peu, je regretterais ma décision, il n’y a aucun chemin, je taille le mien à coups de machette : oui, dans mon chargement il y avait une machette… Ahah, la bonne blague : voici que faire d’une pagaie dans les plans foireux : toujours la garder sur soi, bien calée au fond de sa poche, au cas où on rencontrerait au détour d’un chemin, un ours affamé, un loup qui a soif d’une jolie brebis ou un sanglier puant. Et toujours avec une pagaie sur soi pour s’en servir comme d’une machette dans la jungle des forêts où aucun chemin n’est tracé. Je suis en short, pieds nus dans mes sandales, et les ronces se battent avec les orties pour savoir qui sera la plus belle, la plus grande, la plus coupante ou irritante. Donc toujours avoir une machette sur soi pour faire du canoë sous les orages.
Enfin, je débouche dans un champ. Mais ce n’est pas fini ! Le champ est immense, et le village plus loin que prévu depuis l’ile, où je ne voyais pas grand-chose en fin de compte. Je marche, je galope, armée de ma pagaie et de mon gilet de sauvetage, au moins je suis crédible dans ma demande d’aide… Enfin un chemin, qui me mène vers le village. Là, la première maison a l’air occupée, un homme à l’intérieur, je regarde un peu plus loin pour trouver une femme mais aucune lumière, je reviens donc sur mes pas, et je demande au monsieur s’il connait quelqu’une qui pourrait m’héberger quand je vois une femme arriver dans le coin de la pièce. Avec leur étonnement bien légitime, je réponds à leurs questions :
-D’où vous venez ?
-De Nantes
-De Nantes ? Mais c’est pas le bon sens ?
-Euh non, j’ai embarqué à Roanne, et je vais vers Nantes !
-Et vous êtes vraiment en canoë ?
-Oui je l’ai laissé dans la forêt dans cette direction.
-Dans cette direction, mais c’est pas par là qu’il faut passer, c’est là-bas qu’il y a l’endroit pour les canoës-kayaks ! (en ‘indiquant la direction opposée…) Bon, attendez, on va voir ça.
Malgré mes incohérences, sa femme me fait rentrer et téléphone à la Maire pour savoir s’il y a des chambres d’hôtes dans le village. La réponse est négative, au moins pour cette année, il y en a en construction. Ils discutent un moment entre eux, puis l’homme me dit qu’il va aller voir avec moi pour le canoë, qu’ils vont m’héberger pour cette nuit. Je leur sauterais au cou de joie ! Nous embarquons dans sa voiture, il me pose un peu plus de questions et a du mal à comprendre mon arrivée : effectivement, il y a un endroit à l’opposé de ma forêt sans chemins, spécifique pour les bivouacs en bord de Loire, bref, pourquoi je suis allée me fourrer là ? Je retrouve le chemin que j’ai tracé, et quand nous arrivons près de Canoë, il me croit, je récupère quelques vêtements secs pour la nuit, et il m’aide à remonter Canoë et l’arrimer plus solidement que ce que j’avais fait, c’est vrai, il a raison, les pluies d’orage peuvent faire monter le niveau de l’eau rapidement.
Jean-Paul est ancien kayakiste, le seul des environs ! Il m’emmène voir l’endroit où les randonneurs nautiques montent le bivouac, alors c’est vrai, c’est beaucoup plus sympa et accessible que ma forêt sans chemin, il y a un foyer pour faire un feu de camp, bref, le top du top du bivouac. Je ne l’ai pas vu de la Loire. Peut-être que j’étais occupée à autre chose, mais en fait, c’est plus en amont, et à ce moment-là, je ne cherchais pas du tout un bivouac, je regardais les nuages : non je ne rêvassais pas !! Et je suis passée près de l’autre rive, pour suivre le courant, n’est-ce pas… Le concert de rock se poursuit, plus faible au niveau sonore que sur l’ile, il parait que c’est la première répétition d’un voisin, c’est encore ma sacrée chance avec les concerts qui cohabitent très bien avec mon envie de silence… Le soleil est magnifique, nous avons le plus beau coucher de soleil depuis mon départ, le ciel est en feu, il flamboie de toutes ses forces, et envoie des rayons roses et rouge fluo dans toute l’atmosphère. Après avoir inondé, soufflé, tonné, et foudroyé toute la vallée, l’orage est passé. Un petit pincement au cœur de ne pas être restée plus longtemps sur l’ile, au lieu de venir embêter ces gentils voisins du fleuve… Mais ça, c’est le biais rétrospectif : je ne pouvais pas deviner la suite de l’histoire avec les informations que j’avais quand je suis partie de l’ile, et sur le moment, c’était la décision la plus raisonnable à prendre avec le soir et les nuages d’orages qui arrivaient à nouveau.
Au retour chez lui, mon hôte me montre l’échelle des crues du fleuve, qui a été réalisée d’après sa maison, où les différents niveaux de montée des eaux ont été notifiés, à chaque débordement, et ils sont nombreux. A l’intérieur, Marie-Christine m’a préparé à manger, à dormir, bref, je suis traitée comme un coq en pâte, même si les critiques pleuvent :
-Quand même, quand je pense que vous êtes seule sur le fleuve, c’est pas du tout raisonnable ! Si j’étais votre mère, je vous flanquerais la fessée ! Vous travaillez dans quoi ?
-Dans la formation aux risques…
-Encore mieux ! C’est ça que vous leur montrez, aller seul faire du canoë sous l’orage ??
Petit à petit, nous faisons connaissance, nous regardons une émission des Racines et des Ailes, en discutant de différents sujets, et je me sens en totale sécurité, au chaud, au sec, sous la chaleur humaine et bienveillante de mes hôtes... Jean-Paul m'explique pourquoi il y a ces rochers sous certains ponts: ils sont vieux, et la force de la Loire finit par emporter certaines pierres de leurs piles, qui menacent de faire effondrer le pont. La seule solution qui a été trouvée a été de casser la force du courant avec ces barres de rochers, pour limiter l'érosion. Bon, au moins, je peux comprends intellectuellement, même si je regrette bien les conséquences pour la navigation...
Le lendemain, après une magnifique nuit de sommeil tellement récupératrice que je serais bien restée une nuit de plus, ils me chouchoutent tant et bien, et me remmènent jusqu’au canoë, avec force conseils pour la suite du périple : conseils de connaisseur de Jean-Paul sur les difficultés nautiques à venir, conseils de Marie-Christine sur les dangers incroyables que je cours à faire ce voyage seule qu’il vaudrait mieux que je rentre tout de suite en train chez mes parents, mais voyant mon obstination, elle a une mission pour moi : leur envoyer une carte quand j’arriverai à Nantes ! En attendant, j’ai même le numéro de téléphone en cas de pépin, valable jusque la Charité, après ils n’ont plus autant de connaissances prêtes à secourir une océiste trempée par les orages !
Une petite question avant l’embarquement, sur mon âge, et le résultat est direct : « Et bien, vous venez de prendre 10 ans de plus en quelques secondes ! On avait fait un petit pari hier soir… » Nous nous quittons avec beaucoup de chaleur, après des embrassades et des remerciements bien mérités pour leur hospitalité et leur gentillesse.
Le temps est clair, les nuages hauts dans le ciel, la menace de hier soir semble lointaine.
L’orage est passé.
Je suis vivante.
Et en plus, j’ai rencontré des gens supers. Merci l’orage.
Initiation N°4
La force du courant, les FH, et l'allègement.
Hier et aujourd'hui j'ai franchi des passes compliquées, comme la dernière que vous avez en photo... Non mais vous avez vu les rochers partout!! Je m'attendais pas à ce genre de choses avant de commencer... Mais depuis Digoin,les collègues m'avaient prévenue, les pêcheurs du coin aussi, et je flippais...
Et avec les supers conseils de Serge, j'ai fait plus de FH en 24 h qu'au boulot! Pour moi qui voulais prendre des vacances!!😊
Lever de doute, repérages, passage avec toutes les précautions nécessaires, et être devant: en contrôle aérien on dit qu'il faut être devant le trafic, ben là c'est pareil: il faut aller plus vite que le courant quand on est dedans.
Là je suis passée en grande partie à la cordelle,et je suis très contente de m'être allégée: ce matin, entre 6 et 7 kg sont partis par la poste, le canoë est moins lourd comme ça, il passe mieux, et ça fera ça de moins à porter...
Donc je suis super contente que mon canoë chéri et moi on ait pu passer ces endroits, je suis fière de nous, et il m'a dit qu'il était ok pour caresser les rochers, en douceur, ce qu'il a fait ce matin. En pilotage avion, on dit souvent "posé, pas cassé", là je pourrais dire "passé, pas cassé"!!
Donc une leçon d'humilité de la Loire: le courant fort est plus fort que moi. Il peut me retourner, tout casser, bref, on a intérêt à faire avec lui, et non contre lui...
Alors comment faire avec ce courant??
Voici deux conseils de Serge, que je trouve bien valables pour la vie en général: prendre le courant, toujours rester aligné dans l'axe quand c'est rapide.
Et prendre de la vitesse, aller plus vite que lui, et un petit coup de pagaie pour ajuster la direction...
La force du courant, les FH, et l'allègement.
Hier et aujourd'hui j'ai franchi des passes compliquées, comme la dernière que vous avez en photo... Non mais vous avez vu les rochers partout!! Je m'attendais pas à ce genre de choses avant de commencer... Mais depuis Digoin,les collègues m'avaient prévenue, les pêcheurs du coin aussi, et je flippais...
Et avec les supers conseils de Serge, j'ai fait plus de FH en 24 h qu'au boulot! Pour moi qui voulais prendre des vacances!!😊
Lever de doute, repérages, passage avec toutes les précautions nécessaires, et être devant: en contrôle aérien on dit qu'il faut être devant le trafic, ben là c'est pareil: il faut aller plus vite que le courant quand on est dedans.
Là je suis passée en grande partie à la cordelle,et je suis très contente de m'être allégée: ce matin, entre 6 et 7 kg sont partis par la poste, le canoë est moins lourd comme ça, il passe mieux, et ça fera ça de moins à porter...
Donc je suis super contente que mon canoë chéri et moi on ait pu passer ces endroits, je suis fière de nous, et il m'a dit qu'il était ok pour caresser les rochers, en douceur, ce qu'il a fait ce matin. En pilotage avion, on dit souvent "posé, pas cassé", là je pourrais dire "passé, pas cassé"!!
Donc une leçon d'humilité de la Loire: le courant fort est plus fort que moi. Il peut me retourner, tout casser, bref, on a intérêt à faire avec lui, et non contre lui...
Alors comment faire avec ce courant??
Voici deux conseils de Serge, que je trouve bien valables pour la vie en général: prendre le courant, toujours rester aligné dans l'axe quand c'est rapide.
Et prendre de la vitesse, aller plus vite que lui, et un petit coup de pagaie pour ajuster la direction...