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Traversée du Népal à pied

(réalisé)
En 2018, je décide d'effectuer une césure dans mes études d'ingénieur pour réaliser un rêve, une première aventure de grande envergure. De Taplejung au Far West népalais, en suivant le sentier du Great Himalaya Trail (GHT), je traverse l'intégralité de l'Himalaya népalais en totale autonomie et accompagné de trois amis. En tout, cela donne 3 mois de marche mais surtout une immersion totale dans un Népal parfois très reculé à la rencontre de locaux qui vivent souvent en total décalage du reste du monde. 

Le Great Himalaya Trail est le nom donné à la trace qui traverse l'Himalaya du Bhoutan au Pakistan sur 5000 km. Au Népal, il existe une haute route, technique et en altitude et une route plus basse, la route culturelle, celle que nous avons décidé de suivre en 2018. Le compte rendu a été divisé en quatre sections principales. Bonne lecture ! 

Bande annonce du film : https://www.youtube.com/watch?v=WI-t785qpU4
Site internet pour en savoir plus sur le projet : https://400lieuessurlaterre.wordpress.com/
randonnée/trek
Quand : 20/09/2018
Durée : 87 jours
Distance globale : 1344km
Dénivelées : +65614m / -66359m
Alti min/max : 378m/5578m
Carnet publié par jerem38 le 02 avr. 2020
modifié le 05 juin 2020
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Vue d'ensemble

Le topo : Du Khumbu aux Annapurnas (mise à jour : 02 avr. 2020)

Distance section : 424km
Dénivelées section : +22940m / -24937m
Section Alti min/max : 401m/3687m

Description :

Cette section consiste en la traversée de trois régions : le Rolwaling, l'Helambu et le Manaslu. Nous empruntons des sentiers qui nous mènent de villages en villages dans un Népal plus profond et vrai. 

Nouvelle section donc, direction le Rolwaling au travers de multiples vallées beaucoup plus denses en végétation que ce dont à quoi nous commencions à nous habituer. Au menu, du dénivelé positif et négatif, quelques moments de lassitude et de « déjà vu » et surtout des rencontres avec des étrangers mais aussi des locaux. Grande nouveauté qui nous a fait le plus grand bien et qui nous pousse d’autant plus à aller vers l’autre. Autre nouveauté, plus désagréable mais presque obligée dans une telle aventure, la maladie ! Hélas, nous ne sommes pas passés au travers et cela nous a stoppé quelques jours…

La partie qui suit consiste en deux parties. Une première partie traverse l’Helambu, la région comprise entre Katmandou et le célèbre Langtang, terre de trek. Nous poursuivons donc notre marche vers l’Ouest en tirant une grande ligne droite sur la carte : les kilomètres défilent et la carte est vite rangée au fond du sac. Un plaisir ! Au menu donc, traversée de vallées, toujours, mais cette fois moins profondes, guidés par le soleil qui nous rappelle notre objectif. Nous l’accompagnons toute la journée (parfois du lever ou jusqu’au coucher) dans sa course vers l’Ouest. Il nous récompense par une magnifique luminosité, dès le milieu d’après-midi, rajoutant une touche aux spectacles des rizières en récolte. À chaque fond de vallée, nous retrouvons une rivière accompagnée de son lot de petites villes. Ces cours d’eau connaîtront à chaque fois les pieds encrassés (voir plus !) de Jérémy et Aubin, de quoi se rafraîchir et soulager les jambes raidies par les journées passées à cuire le long des pistes carrossables.
La seconde partie se poursuit sur les pistes, avec des journées où nous avalons les kilomètres, mais qui offrent maintenant des vues sur l’Himalaya. Nous sommes bien dans la région du Manaslu ! Nous contemplons donc souvent les pointes enneigées des massifs du Ganesh Himal (plusieurs 7000m), du Manaslu (couronné par le sommet éponyme de 8163m) et des Annapurnas, notre objectif à court terme.
Ce passage au Nord de Katmandou et en se rapprochant des Annapurnas se traduit par une population assez anglophone. Une fête hindou, le Dipavali, se déroulant lors de notre passage, nous rencontrons de nombreux katmandais venus retrouver leur famille dans leur village natal. C’est donc pour nous l’occasion d’échanger plus que dans le cadre commercial. Nous en apprenons davantage sur les coutumes, sur leur quotidien mais aussi sur l’impact du séisme de 2015. Cette fois-ci, nous prenons réellement conscience de la cicatrice laissée par cet événement sur les villes et les villages.

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Le compte-rendu : Du Khumbu aux Annapurnas (mise à jour : 02 avr. 2020)

Namche Bazar – Surke (+300/-1400m)

Pour sortir de cette boucle du Solu Khumbu et reprendre notre marche vers l’Ouest, il faut redescendre et, surtout, revenir sur nos pas jusqu’à Kharte ! Dur dur pour le mental ! Nous sommes tout de même reboostés à la vue des prix qui descendent progressivement. Contre 4300 roupies la nuit et le dal bhat à Lobuche, nous dépensons 1600 roupies à Surke !
Redescente donc, en suivant l’autoroute de l’Everest et sans passer par Lukla cette fois-ci. Les files de touristes se réduisent jusqu’à devenir ponctuelles. La température augmente. Le ciel se couvre. Nous sommes bien en train de quitter la zone de Namche !

Surke – Juving (+700/-1500m)

À l’image de la veille nous empruntons la même route qu’à l’aller. Le chemin n’a pas changé ! De la boue, des pierres et surtout des caravanes incessantes de mules qui nous obligent régulièrement à adapter notre marche en nous rangeant sur le bas côté.



Du Khumbu aux Annapurnas
Nous quittons la route connue pour rejoindre Karikhola, petit village très accueillant, au sein duquel nous prenons le temps d’écouter les prières des moines qui retentissent depuis le monastère surplombant les habitations.
Conclusion du jour : après la route des ânes, nous avançons dorénavant sur celle des français ! En effet, nous croisons différents groupes de l’hexagone et surtout Gildas et Jean-Paul ! Le premier, qui habite à côté de chez Aubin, effectue un tour de l’Asie et avance vers le trek de l’Everest. Il nous annonce que nous croiserons plus loin le second, qui nous conseille un magasin de fromage de nak (femelle du yack, aussi appelée dri) sur la route. Ces brefs échanges nous revigorent pour la suite !

Juving – Salung (+2100/-800m)

Premier jour réellement nouveau ! On reprend les bonnes vieilles habitudes d’avant l’Everest et on embarque à nouveau pour une séance de montagnes russes plein Ouest ! Depuis le fond de vallée à 1400m, nous remontons pour le Taskindu La situé à un peu plus de 3000m. Montée caillouteuse et drée dans le pentu sur cette route des français qui n’a jamais aussi bien portée son nom ! 

En haut du col, on redescend. Nous avons jamais vu François autant motivé. Le voilà qui trace « pleine balle » sur le sentier sinueux. La raison ? Faites un effort, c’est simple et logique ! Ah, vous voulez un indice ? Il est Haut Savoyard ! Oui c’est ça ! Il a eu vent d’une fabrique de fromage de nak dans le village d’en dessous ! Impossible de l’arrêter. Il hêle chaque personne croisée.
Where is the cheese factory ?

(Où est la fabrique de fromage ?)
Nous voilà quelques temps plus tard dans la cave d’affinage de la fromagerie, le lieux où tout les fromages vieillissent pendant trois à quatre mois. En tout, il faut compter 8 mois pour leur fabrication. Trêve de culture, François, bave aux bords des lèvres, est inarretable.
Can we taste it ?

(Pouvons-nous essayer ?)
Et c’est ainsi que nous rejoignons, après une énième traversée de vallée, Salung, les jambes fatiguées mais surtout un goût de fromage plein la bouche !



Du Khumbu aux Annapurnas
Salung – Sethe (+1200/-1400m)

Alors que nous attaquons la longue montée vers le col du jour à plus de 3500m, nous croisons le chemin de deux nonnes bouddhistes qui nous arrêtent et nous offrent, sans raison particulière si ce n’est de nous voir tout sourire,… des bonbons ! Mangue, abricot, orange, chocolat, il y en a pour tous les goûts ! Véritable coup de boost avant l’ascension !
Voici près d’un mois que nous marchons et nous éprouvons le besoin de varier notre régime alimentaire pour la pause déjeuner qui se résume en un mot, noodles (nouilles chinoises précuites). Nous ne nous imaginons pas cuisiner un civet de sanglier, une pizza au ravioles ou encore une croziflette, bien que nous en rêvons et que certains commencent à voir pousser des tacos au bout des branches des arbres, loin de là ! On vous parle là d’une innovation toute simple, des pâtes cuites au réchaud. Il se trouve que nous avons acquis un paquet d’un kilogramme de nouilles chinoises non préparées ! De quoi remplir notre estomac ! Hélas, notre façon de les cuisiner n’est sans doute pas la bonne… Après quelques minutes de cuisson, l’eau se transforme en une pâte épaisse à l’allure de porridge. Notre élan se voit freiné d’un coup. Les pâtes sont immangeables ! Seul Aubin, s’y force tant son estomac lui lance des signaux de détresse tandis que nous observons le travail des moines dans un champs. Respects !

Du Khumbu aux Annapurnas
Ce n’est décidément pas notre journée en terme d’alimentation. Le soir et après une descente très casse-pattes, à notre plus grand regret, aucun refill (service supplémentaire) n’est prévu pour le dal bhat. Horreur ! Sacrilège ! Fatché ! Il est pourtant de tradition de resservir du riz et des lentilles une fois la première ration terminée. Après négociation avec la gérante, nous nous en tirons avec une deuxième (petite…) ration, pas de quoi nous rassasier !.. Une seule solution, se coucher tôt afin que le temps passe plus vite d’ici au dal bhat du lendemain soir.

Sethe – Shivalaya (+1300/-2100m)

Petite humeur au départ, la journée de la veille a laissé des traces et c’est en silence que nous poursuivons notre descente. À cet instant, nous n’imaginions pas que cette journée marquerait le périple de 400 lieues sur la Terre. Qui plus est, en positif !
Après avoir passé la pause goûter de 10h aux côtés de Kinjal Karki, une petite népalaise de 9 ans à l’anglais impressionant, et après avoir échangé quelques mots avec une concurrente du Raid Grenoble INP (oui oui, le monde est petit !), nous atteignons un énième col à Deurali.

Du Khumbu aux Annapurnas
C’est ici que la formidable petite histoire commence. Nous rencontrons un groupe de népalais, mené par Bijay Shadi, le chef de famille. Il reviennent du festival Dashain qui a lieu tous les ans en octobre au cours duquel les hindous (80% de la population népalaise) se réunissent. À l’image de Noël pour nous, c’est une fête dédiée à Durga, la déesse mère, source de vie. En fin de festival, les hindous reçoivent la tika, une marque assez large sur le front constituée de grains de riz colorés en rouge.

Vous vous en doutez donc, c’est un groupe très jovial, que nous croisons ! Il est déjà 15h et nous hésitons à faire la descente vers Shivalaya annoncée en 2h. Devant notre indécision, Bijay nous invite à marcher avec eux pour une descente bistarai bistarai, ou en français, doucement doucement ! C’est donc bien accompagnés que nous poursuivons notre marche. Les gens parlent fort, le temps passe vite, nous sommes heureux !

Du Khumbu aux Annapurnas
Nous sommes même invités à déguster un milk tea (lait de vache ou de nak dans lequel est infusé le thé, le tout accompagné d’un peu d’eau et de sucre, un délice !) et à assister à une démonstration d’art martiaux délivrée par les enfants de Bijay, scolarisés en école militaire. Après plus de 3h30 de marche (bistarai ils avaient dit), c’est à la frontale que nous arrivons à Shivalaya où nous sommes dirigés vers un petit hôtel tout sauf touristique, dans le genre que nous apprécions tant. Rendez-vous pris avec Bijay, cet homme généreux et ouvert, en janvier lorsque nous serons du côté de Katmandou !

Shivalaya – Jiri Bazar (+700/-600m)

Petite journée au programme dans le but de rejoindre Jiri Bazar, grosse ville sur notre parcours, au sein de laquelle nous pourrons prendre une après-midi de repos. Enfin, c’était ce qui était prévu au départ !
Qui des concombres de la veilles ou des chowmeins (nouilles fraîches cuisinées avec des légumes) du midi a bien pu venir déranger nos plans ? Nul ne le saura jamais. Toujours est-il que dans l’après midi Thibaud tombe malade et renonce même au dal bhat du soir ! Durant la nuit, c’est Aubin et Jérémy qui tournent dans un cycle parfait pour garder les toilettes. Indigestion alimentaire ?

Jiri Bazar – Singati Bazar (+900/-1900m)

Ça y est, nous voilà requinqués après 3 jours de pause forcés, imposés par une petite bestiole intestinale (et d’une reprise un peu hâtive d’ingestion de samosas dans un restaurant de traverse)…
Le programme pour les jours à venir est un peu flou. Nous avons fait le stock pour une potentielle nuit en tente et avons fait le plein d’informations auprès du gérant de l’hôtel. En effet, ni notre carte 1:100000 bourrée d’erreur, ni MAPS.ME (explorateurs 2.0) ne peuvent nous éclairer sur ce qu’il y a à la fin d’une piste qui monte au dessus de Jiri. Le gérant nous a promis la big jungle alors nous attaquons vers l’inconnu.
Finalement, la piste se poursuit dans la forêt et nous arrivons sans trop de difficultés (une seule fausse piste suivie 5 minutes) au village de Sarakapti. À partir de là, nous entamons la descente vers Singati à travers de nombreux villages où les locaux nous indiquent le chemin. Ce sera donc bel et bien dans un hôtel que nous dormirons ce soir-là !

Singati Bazar – Sangba (+1300/-600m)

Nous entrons dans le parc national du Gaurishankar et qui dit parc dit permis ! Nous avions élaboré diverses stratégies pour éviter celui-ci mais rien à faire, la gardienne nous coupe dans notre élan et ne sera pas hyper compréhensive devant nos tentatives de négociation. 3000 roupies à sortir pour chaque tête, soit l’équivalent du budget journalier pour 4 sur lequel nous nous tablons !
Nous attaquons la montée raide à la sortie de Singati au cours de laquelle une femme nous offre des aumba, sorte de pommes très fermes et pleines de pépins difficilement mangeable au final. Qu’importe, c’est l’intention qui compte ! Nous croisons également la route d’un « convoi mortuaire » hindou, précédé d’un homme sonnant une conque. Étrange expérience.
La suite de la journée se résume en un sentier balcon qui offre une vue lointaine sur le fond de la vallée et sur le versant d’en face et ses nombreuses rizières. Splendide !


Du Khumbu aux Annapurnas
Fin de journée comme on les aime ! Alors que nous arrivons au petit village de Sangba pour trouver le lodge indiqué par les locaux en chemin, quelques villageois nous indiquent un petit magasin. Le propriétaire nous ouvre une pièce dans l’arrière boutique, une sorte de cabanon ou de réserve qui dispose de trois lits recouverts par des sacs de riz. Ce n’est certainement pas le lodge que l’on nous avait promis mais voilà exactement ce que nous étions venus chercher au Népal. Après avoir suivi les enfants pour une visite du village, nous passons une soirée de rêve aux côtés de cette famille généreuse qui nous prépare un dal bhat à base de pomme de terre et de eiskus, sorte de courge très tendre que nous aimons tant.

Sangba – Dolongsa (+1900/-1000m)

En vu, le Tinsang La, col à plus de 3300m. Tiens, ça faisait un bail ! On met François devant et c’est partit droit entre les rizières en terrasses.
En chemin, nous croisons un népalais fort sympathique qui nous fait visiter une petite maison en pierre, perdue au bord d’un torrent. C’est ici qu’il travaille ! Au centre de la pièce, de la farine de riz est produite à l’aide d’un moulin hydraulique.

Les mètres de dénivelé défilent à la vitesse de la lumière, nous sommes en jambe ! La tente, ce n’est toujours pas pour ce soir et nous arrivons à tirer jusqu’au petit village de Dolongsa après une longue journée sur les sentiers !



Du Khumbu aux Annapurnas
À l’image de la veille, nous sommes accueillis le soir dans un lieu insolite. La maison dans laquelle nous atterrissons n’a rien d’un lodge bien que le propriétaire le dise. La famille, encore une fois adorable et très généreuse, nous accueille avec un verre de rakshi (alcool de riz). Ils nous libèrent deux lits. Des lits une place bien évidemment ! Après tirage au sort, on retrouve François et Thibaud dans les lits et Jérémy et Aubin au sol sur leur matelas gonflables Sea to Summit. Finalement, ce ne seront pas les ronflements incessants de la mamie avec qui l’on partage la pièce (et ceux d’Aubin !) qui seront les plus perturbants mais bien la lumière restée (volontairement ?) allumée toute la nuit… Drôle d’habitude pour cette maisonnée qui a la chance d’assister chaque soir à un magnifique coucher de soleil !
Du Khumbu aux Annapurnas
Dolongsa – Barabise (+100/-1700m)

Dernière étape symbolique qui marque notre changement de carte (bien que le col de la veille marque sans doute la vraie sortie de la région du Rolwaling), nous poursuivons la descente entamée la veille. Nous longeons la même piste en traversant de nombreux villages, retrouvant petit à petit les engins motorisés quittés à Singati.
Étape courte donc, qui se termine en fin de matinée à Barabise, charmant bazar où nous prenons une après-midi… en espérant que celle-ci n’ait pas le même effet qu’à Jiri !

Barabise – Jalbire (+1700/-1700m)

Départ brutal, mais coutumier, par un escalier à la népalaise puis en suivant les shortcuts, de petits raccourcis parfois cachés par la végétation mais toujours bien connus des locaux. Nous pouvons les remercier, certains permettent de gagner de nombreuses minutes et surtout d’éviter des pistes beaucoup plus monotones. Nous voilà donc rapidement 500m au dessus de Barabise, sur une piste offrant une belle vue dégagée vers le Sud.

À la pause déjeuner ou la pause « riz » (nous avons abandonné les nouilles chinoises pour ce produit local et rentable tant au niveau de notre porte monnaie que de notre estomac ! – sauf Thibaud, resté au menu enfant), des jeunes filles nous offrent à nouveau des aumbas mûres cette fois ! Nous en profitons pour analyser leur façon de les déguster : la peau ne se mange pas. Quelques minutes plus tard nous nous prêtons au jeu. Finalement le fruit nous plaît bien !

En fin de journée, pour redescendre dans la vallée de Jalbire, nous tentons un shortcut dans les rizières. Ce sont les plus difficiles à suivre et nous ne comptons plus les fois où nous nous y sommes perdus. Pour faire simple, sur chaque terrasse se trouve une sente étroite qui suit son contour. Vous comprendrez que sur une parcelle aux centaines de terrasses, le terrain se transforme très rapidement en véritable labyrinthe ! Une fois encore nous nous enlisons dans les tréfonds de ces cultures et c’est seulement grâce à l’aide d’une famille d’agriculteurs très aimable que nous vous écrivons aujourd’hui (rires).



Du Khumbu aux Annapurnas
Rien de mieux qu’une petite soirée à la bougie en écoutant Riptide de Vance Joy dans notre chambre 2 places pour clore les péripéties journalières !

Jalbire – Okhreni (+1800/-300m)

Accrochez-vous, ce 31 octobre fut une journée mémorable pour 400 lieues sur la Terre.
À midi, c’est toujours la même histoire. En sortant notre réchaud pour cuisiner, nous devenons l’attraction du village.
Petite remarque qui revient toujours à la vue du contenu de notre popote :
« Only rice ?! »

(Que du riz ? !)
Il faut dire que les népalais ne mangent jamais de riz nature mais l’accompagnent toujours pour donner le fameux dal bhat !
Alors que nous arrivons au petit village de Khobre (ne figurant même pas sur notre carte, on le rappelle, hyper précise), les villageois s’adonnent à une cérémonie. Certains, en ronde, dansent et chantent tandis que d’autres les observent depuis leur chaise. Ils célèbrent le Lhabab Düchen, fête annuelle bouddhiste qui tombe cette année le 31 octobre. Ce jour correspond, dans leur calendrier, à l’anniversaire du retour de Bouddha depuis le monde des dieux. Le bonheur est au rendez-vous et ça se lit sur leurs visages.

On nous convie à la fête en nous offrant du milk tea ainsi que de nombreuses victuailles alimentaires telles que des pommes, des sucreries et même des popcorns ! Que demande de plus l’estomac d’un trekkeur affamé dont le régime alimentaire se résume à des noodles, des biscuits secs et du riz ? On nous passe même autour du cou la Khata, l’écharpe de bienvenue ! Nous sommes sur un petit nuage et entreprenons de trouver un endroit pour dormir. Par chance, Quentin, un jeune français en volontariat chez les moines et présent pour l’occasion (quel plaisir de parler un peu français en dehors de la bande !) fait marcher ses contacts. Nous tombons alors sur une pépite : Patam Sherpa Lama.
Du Khumbu aux Annapurnas
Ce népalais de 65 ans qui ne parle pas un mot d’anglais accepte de nous loger pour la nuit. Nous le suivons jusqu’à sa petite maison rustique, au village d’Okhreni qu’il est heureux de nous faire visiter.

Après un tour à l’imposante statue de Bouddha qui semble toujours nous fixer, nous assistons et participons, au coin du feu, à la préparation du dal bhat. Les échanges sont simples et la gestuelle prend vite le dessus.
Du Khumbu aux Annapurnas
Okhreni – Gyaltung (+900/-2400m)

Nous voilà déjà en novembre, le temps passe vite sur les sentiers ! La Khata d’adieu offerte par Patam autour du cou, nous assistons à un magnifique lever de soleil.
À midi, il nous est offert aumbas et un genre de citron vert ! Idéal pour accompagner le riz !
Comme il est coutume ces derniers temps, nous terminons la journée en beauté en nous perdant dans les rizières. 
Un plongeon dans la rivière pour soigner quelques tensions dans les jambes et au lit !

Gyaltung – Samundratar (+1400/-1300m)

Katmandou n’est plus très loin au Sud et cela se retranscrit par des sentes qui deviennent chemins puis pistes carrossables empruntées par de nombreux véhicules. Nous mangeons donc pas mal de poussière !

Au col du jour, nous perdons François. Il n’a pas pris le shortcut dans la montée et nous a attendu dans un virage sans que jamais nous n’y passions. Nous attendrons notre Haut-Savoyard en assistant à l’échauffement et au chant des écoliers du village, le tout en terminant nos biscuits coconuts. Heureusement, le soir, quelques samoussas nous ferons patienter jusqu’au dal bhat.

Samundratar – Betrawati (+1200/-1400m)

Grosse journée au programme, environ 35km ! Nous avalons notre petit déjeuner à la frontale, alors que toute la ville est encore au lit (personne debout avant 6h dans cette région), et c’est parti pour 10km de pistes bitumés. Nous nous reconfortons avec un levé de soleil sur les rizières, salué par le passage d’un singe au milieu de celles-ci.
Au sommet de notre montée sèche quotidienne, nous sommes encore chaleureusement accueillis pour la pause de midi ! Les villageois, toujours passionnés par notre réchaud et notre popote, nous proposent des nattes pour nous assoir après nous avoir fait goûter un nouveau fruit, l’amala ! S’en suit une agréable discussion avec Ayjon Dhakel, la formidable rencontre du jour !

Du Khumbu aux Annapurnas
Comme dirait François :
« On n’est pas d’ici ! »

Autrement dit, il nous reste de la route donc nous traçons ! Effectivement, c’est après 9h30 de marche et les pieds en compote que Betrawati sort enfin de sa cachette ! Rien de tel pour bien apprécier la journée de repos du lendemain.

Betrawati – Myagang (+1500m)

La panse remplie à coup de samoussas, d’omelettes, de pommes de terre et bien évidemment de dal bhat, nous reprenons un peu de hauteur. Un trio d’aigles (chil en népalais) nous escorte lors de notre ascension, quel plaisir de les admirer !
À Buntang pour le déjeuner, nous faisons la connaissance de Gopal. Il nous apprend qu’il a fait 4 ans en Afghanistan au sein de l’armée américaine avant de rentrer à son village dévasté par le tremblement de terre de 2015. En effet, beaucoup de soldats népalais s’engagent dans les armées étrangères, notamment indienne, américaine et britannique. Eh oui ! Depuis que les guerriers Ghurkas (le fameux guerrier népalais) ont repoussé bravement les armées britaniques, armés de leur couteau traditionnel, le Khukuri, à l’époque du colonialisme, ils sont toujours engagés dans les rangs de nos voisins d’outre Manche.

À midi, il doit retourner travailler dans les champs. Ici, les villageois s’entraident pour les productions agricoles. Il ne paie pas ceux qui viennent l’aider dans ses terrasses mais en échange les aidera à son tour lorsqu’il s’agira de récolter leurs terrasses.

À Myagang, nous atterrissons dans un charmant petit lodge, avec vue, à 2100m d’altitude. Le soleil se lève côté Sud-est au-dessus des crêtes à perte de vue et se couche côté Nord-ouest derrière les Annapurnas, le massif du Manaslu et le massif du Ganesh Himal. Petit coin très sympa donc !
Du Khumbu aux Annapurnas
Nous terminons la journée avec (encore !) une belle rencontre, celle de Binod. Soucieux de notre bien être et avec son anglais fluide, nous sympathisons très rapidement. Il travaille à la construction d’une nouvelle route (comprendre piste) à proximité et dort donc au même endroit que nous ! Afin de payer les études de ses enfants, il part travailler régulièrement dans les pays du Golfe, dans des chaînes de restauration rapide notamment, car le salaire y est plus important qu’au Népal. Après le tremblement de terre, il est rentré dans son village natal pour aider en tant que volontaire à la reconstruction de son pays. Maintenant que les économies s’amenuisent, il compte retourner à Dubaï dans 6 mois pour environ 10 ans, soit le temps nécessaire pour que ses enfants terminent leurs études. Tous les 2 ans, à l’expiration de son Visa, l’entreprise pour laquelle il travaillera lui paiera les billets d’avions pour un retour au pays durant 2 mois. Être aussi loin aussi longtemps de sa famille n’est pas toujours facile pour lui. Son histoire illustre très bien la vie de nombreux népalais qui partent travailler dans les pays du Golfe ou en Corée du Sud, attirés par les salaires plus avantageux. En effet, en 2011, les versements faits par les travailleurs migrants à leur famille représentait 20% du PIB du Népal et le nombre de népalais travaillant à l’étranger avait déjà été multiplié par 5 en 10 ans.

Myagang – Lapang (+500/-2000m)

Comme il nous l’a promis la veille, Binod est présent à notre réveil pour nous indiquer le chemin à emprunter. Finalement, il nous accompagne pendant plus d’une heure pour nous guider ! Nous empruntons une piste récente et il nous explique que c’est son chantier en cours qui devrait prendre fin dans quelques jours seulement. Une vue, toujours plus belle, sur les sommets environnants nous accompagnent et nous ne voyons pas le temps passer !

Du Khumbu aux Annapurnas
Près de 1500m plus bas, nous arrivons au fond d’une ancienne vallée glaciaire large et croisons au lodge… un groupe de touriste venu faire un petit bout de trek dans la région !

Lapang – Okhle (+800/-600m)

Dans la brume épaisse, nous optons pour marcher dans le lit de la rivière. Mauvaise idée, mais nous aurons bien rigolé ! Nous commençons par passer par des marécages où les herbes nous dépassent et nous donnent l’impression qu’un jaguar peut jaillir à tout moment !

Du Khumbu aux Annapurnas
Il faut ensuite traverser plusieurs bras de rivière sur de gros galets instables. La chute n’est pas au programme du jour mais nous pouvons tester l’imperméabilité de nos chaussures dites « GoreTex ». N’est-ce pas Aubin ? Pas de plongeon donc mais après quelques traversées quelques peu border line, nous sommes dans l’obligation de revenir sur nos pas et de rejoindre la terre ferme !

Un peu plus loin, nous sommes vites remis sur pied par le thé et les flocons d’avoine que nous offre un local, Bidur ! Par la même occasion, nous prenons conscience des conséquences du séisme de 2015… La maison dans laquelle il vit est constituée de tôles comme nous en croisons beaucoup. Il nous explique qu’avant il vivait à cet endroit dans une haute maison, détruite par le tremblement de terre. À quelques mètres de son abris de fortune, il nous montre aussi la maison qu’il est en toujours en train de construire, 3 ans après la catastrophe.

Plus loin, alors que nous arrivons sur un plateau aride perché avant la ville d’Arughat, nous pouvons constater les vestiges de nombreuses maisons en brique par-dessus lesquelles les villages se reconstruisent, dans des matériaux souvent plus rustiques.
Le midi, Rupak nous installe devant sa boutique pour notre riz quotidien. Il nous offre des nattes et des tabourets et passe la pause avec nous. Celle-ci se termine par une comparaison de nos différents couteaux et couteaux suisses. L’occasion pour nous de voir de plus près le fameux Khukuri !
À Arughat, nous arrivons dans la ville en plein festival hindou, le Dipavali, qui marque le nouvel an Newar (habitants de la vallée de Katmandou). De nombreuses personnes sont marquées au front du tika et le bazar grouille de monde. Des étals de poudres colorées parsèment les rues : les gens les achètent pour former des dessins devant l’entrée de leur maison.

Du Khumbu aux Annapurnas
En fin d’après-midi, nous commençons à chercher un toit pour la nuit. De village en village, nous terminons à Okhle où une famille accepte de faire de la place dans son débarras pour que nous y étalions nos matelas Sea to Summit. À l’occasion du festival, ils décorent la maison avec des bougies et des guirlandes et nous assistons avant de nous coucher à un jeu où parents, enfants et amis parient de l’argent.
Du Khumbu aux Annapurnas
Okhle – Gorkha (+900/-700m)

Si certaines journées de l’épopée 400 lieues sur la Terre resteront gravées dans nos mémoires pour leur richesse, celle-ci marquera nos souvenirs au fer rouge, cuisante, comme l’une des pires. Jérémy peut vous en parler, le mode auto aura été le maître mot de la journée.
Du lever du soleil à la fin d’après-midi, nous suivons une même piste carrossable, parfois goudronnée, accompagnés par les motos, les Jeeps, les bus et surtout la poussière en suspension laissée dans leur sillage.
Seule distraction de la journée, une petite portion d’une grosse heure dans un shortcut big jungle, au milieu des ronces (François a sorti la machette). Finalement, nous perdons du temps en s’enlisant dans la forêt, mais ça a le mérite de nous faire respirer un peu d’air pur !
À Gorkha, plus grosse ville traversée jusqu’à maintenant, nous atterissons dans un hôtel luxueux pour nos standards : douche pour tout le monde. De quoi se décrasser de cette longue journée !

Gorkha – Palungtar (+500/-1000m)

Nous partons de bon matin en direction d’une rivière en fond de vallée. Lassés de la journée précédente, nous quittons la piste et pour les shortcuts au milieu d’une jungle humide. Nous sommes bien contents de nous perdre au milieu de cette verdure luxuriante !

Après avoir avalé notre kilo de riz quotidien, nous repartons en suivant une route bitumée qui nous mènera jusqu’à notre destination du soir. Pas un seul bananier le long de celle-ci n’échappe aux regards de François et Aubin. Malheureusement, le précieux sésame reste introuvable, même après une tentative désespérée en grimpant à l’un d’eux. Impossible de trouver une banane mûre ! La journée se termine par un beau soleil couchant mais surtout par une belle partie de Carrom. Des enfants nous apprennent les règles de ce jeu, qui ressemble au billard mais avec des palets en guise de boules et nos doigts à la place des queues. Notre niveau (des plus bas) est une belle source de rigolade autour de la table !

Palungtar – Udipur (+500/-200m)

Maintenant que nous avons rejoint la vallée de la rivière Marsyangadi Nadi, nous lui tenons compagnie pour un long moment, remontant jusqu’à sa source dans le massif des Annapurnas. Nous suivons donc une piste en parallèle, toute la journée.
Nous sommes tirés de nos rêveries du mode auto par des enfants jouant sur une grande roue quelque peu artisanale. Toute fabriquée de bois et actionnée à la force des bras, François leur prête main forte pour la faire tourner.


Du Khumbu aux Annapurnas
Plus loin, ce sont des singes qui attirent notre attention. C’est la première fois que nous en voyons autant, jouant et sautant de branche en branche.

La journée bien avancée, nous sommes interrompu par des jeunes, sono poussée à fond, qui dansent le long de la route. Ils nous interpellent les automobilistes et nous invitent à les rejoindre. Aubin et Jérémy vont taper des bâtons au milieu d’eux !

Udipur – Besisahar (+200m)

Journée extra courte, idéale pour avoir une après-midi supplémentaire dans la pause d’un jour initialement prévue. Cet arrêt est le bienvenue, ça commence à tirer sur un tendon du côté de Jérémy… Nous rallongeons la pause de 10h avancée à 8h30 et prenons le temps de contempler les paysages, les Annapurnas dans le viseur.

À l’arrivée, stupeur ! Les prix ont monté brusquement en quelques kilomètres, mais pire… impossible pour Aubin de mettre la main sur son caleçon de rechange !
Commentaires
mehdi - 15 juin 2020
4 messages
Les gars vous m'avez fait rêver !!!! Merci pour ce carnet de voyage, je pense qu'il va m'être grandement utile pour organiser cette traversée inchallah.
En tout cas, chapeau les artistes, vous avez envoyer du lourd avec cette traversée.
Et juste une question, GHT est un peu balisé, pas du tout.. j'ai télécharger la trace GPX mais avec des cartes seulement .. faisable ?
Merci en tout cas.

jerem38 - 16 juin 2020
1 messages
Salut ! Merci pour ton message, content que ce soit utile ! Tu comptes le faire ? Pas sur que la trace GPX te soit d'une grande aide..! Je l'ai tracé grosso modo à posteriori, si tu regardes dans le Dhorpatan j'ai été obligé de tirer des droites car il y a pas de chemins/villages sur le fond de carte. C'est pas du tout balisé donc nous on utilisait trois outils principaux : les cartes de trek népalaises pas hyper précises mais ça te donne un peu de recul, l'application Maps.me où il y a pas mal de chemins sauf dans le Dhorpatan et dans les coins très sauvages et un topo de Linda Bezemer très très précis qu'on avait téléchargé sur le téléphone en anglais mais légèrement has been maintenant, il faut dire que des routes se créent tout les jours au Népal ! Ce qu'on faisait surtout c'est qu'on repérait sur le topo/carte le nom du prochain village et on demandait à chaque local qu'on croisait la direction ;) Si tu as besoin d'infos, n'hésite pas à m'envoyer un mail à jerem.bigearobase orange point fr c'est avec plaisir